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Thorax

Le diagnostic de pneumopathies interstitielles sur les scanners de dépistage du cancer du poumon est-il utile ?

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août 2022

Dépistage

Il y a près de 10 ans que nous commentions ici un article de Radiology qui attirait l’attention sur le fait que près de 10% des scanners de dépistages objectivaient des signes de pneumopathie interstitielle (cliquer ici).  Dans cet article, il était précisé qu’à deux ans de suivi, les scanners des participants qui avaient des lésions non fibreuses étaient améliorés une fois sur deux, mais que ceux qui avaient mis en évidence des lésions fibreuses progressaient plus d’une fois sur trois et ne s’amélioraient jamais. Mais finalement, ce dépistage de lésions interstitielles est-il réellement utile ? C’est une question qu’on peut se poser alors que, 10 ans plus tard, d’importants progrès thérapeutiques ont été observés dans le traitement des fibroses. 

Cette étude rétrospective répond partiellement à cette question. Elle a été conduite au Royal Brompton Hospital de 2018 à 2021 à partir de l’étude pilote de dépistage de l’ouest de Londres menée chez des fumeurs âgés de 55 à 75 ans qui comportait un scanner de base suivi par un deuxième 18 à 24 mois plus tard. 

Sur 1853 sujets examinés par scanner faiblement dosé, 78 (4,2%) avaient des images interstitielles intéressant plus de 5% du poumon et 59 (3,2%) avaient les critères permettant de définir une pneumopathie interstitielle. Parmi ces derniers 16 ont été exclus en général parce qu’ils n’ont pas été complètement évalués.  

Les 43 restant (2,3%) ont été adressés à un centre spécialisé pour l’évaluation de ces pneumopathies. Leur âge médian était de 68,8 ans, 37,2% étaient des femmes et le tabagisme cumulé moyen était de 40 PA. Moins de la moitié des patients étaient asymptomatiques, les autres se plaignaient d’une toux, d’une dyspnée ou les deux. Plus de la moitié des patients avaient une exposition notamment aux oiseaux (11%), aux moisissures (7%), ou à l’amiante (26%). Enfin 80% des patients avaient des râles crépitants à l’auscultation. La CVF et la DLCO moyennes étaient respectivement de 89 et 63%. 

Vingt huit des 43 patients ont eu un diagnostic précis tel que fibrose idiopathique (n=13), pneumopathie d’hypersensibilité, sarcoïdose,  hystiocytose etc.   

Onze  des 43 malades ont immédiatement été traités : par pirfenidone ou nintedanib chez 8 des 13 patients qui avaient une fibrose idiopathique et aussi corticoïdes ou corticoïdes et méthotrexate chez 3 patients qui avaient une sarcoïdose ou une PHS. 

L’intérêt de cette étude n’est pas de signaler une fois de plus qu’une pneumopathie interstitielle peut être découverte sur un scanner thoracique de dépistage de sujets asymptomatiques, mais de montrer que cette découverte est utile en débouchant, environ une fois sur quatre, sur  l’institution d’un traitement spécifique. 

Souvenons nous néanmoins  que ces pneumopathies interstitielles n’ont pas toutes été dépistées (c'est à dire décelées chez des sujets asymptomatiques) puisque la moitié de ces personnes présentaient une toux ou une dyspnée. De même il n’est pas inintéressant de noter que  80% des sujets examinées avaient des râles crépitants, ce qui, une fois encore, démontre que l’interrogatoire et l’examen clinique doivent garder toute leur place.  

Reference

Lung cancer screening provides an opportunity for early diagnosis and treatment of interstitial lung disease 

Hewitt RJ, Bartlett EC, Ganatra R, Butt H, Kouranos V, Chua F, Kokosi M, Molyneaux PL, Desai SR, Wells AU, Jenkins RG, Renzoni EA, Kemp SV, Devaraj A, George PM.

Thorax 2022 Aug 8. Epub ahead of print. 

Auteur

Bernard Milleron

Rédacteur en chef d'EM-Onco.