Vous êtes ici

Lung Cancer

Quel est en France et en Allemagne l’impact de l’immunothérapie sur le devenir des malades atteints de CBNPC de stades avancés ?

1.02
Average: 1 (1 vote)
octobre 2022

Immunothérapie, Traitement des stades IV

Il est classique de dire que l’arrivée des inhibiteurs de point de contrôle immunitaires dans l’arsenal thérapeutique du CBNPC a constitué une révolution mais ceci est bien souvent basé sur les résultats des essais cliniques et des impressions personnelles des cliniciens. Peu de données sont disponibles quant à l’impact réel que ces traitements ont eu à l’échelle d’une population globale, non sélectionnée comme dans les essais d’enregistrement. C’est justement l’objet de la publication rapportée ici qui évalue l’impact que les molécules d’immunothérapies ont eu sur le devenir des patients CBNPC localement avancés et métastatiques, en France et en Allemagne, depuis 2015 (date de la première mise à disposition du Nivolumab dans le cadre des ATU). En première ligne, pour les patients exprimant PDL1>50%, le pembrolizumab a été remboursé depuis 2017, en janvier en Allemagne et en mai en France. 

L’étude est une étude observationnelle basée sur deux bases de données existantes, l’ESME-AMLC et CRISP. La première est un programme académique rétrospectif de vrai vie qui collecte les données de centres universitaires et non universitaires (30 sites en France au moment de l’analyse). La seconde base de données est issue de 170 centres (centres cancérologie, hôpitaux généraux et universitaires). 

Les patients de la cohorte Française ont été inclus entre le 1er janvier 2015 et le 31 décembre 2018 avec un suivi jusqu’en Aout 2019. Ceux de la cohorte Allemande entre le 1 janvier 2016 et le 31 décembre 2018, avec un suivi jusqu’en juin 2020. 

Au total, dans le cohorte ESME-AMLC ce sont 8046 patients avec un CBNPC sans réarrangement de ALK ou mutation d’EGFR qui ont commencé leur 1ere ligne de traitement entre 2015 et 2018, comprenant 1793 patients avec une histologie épidermoïde (22.3 %). Dans la base CRISP, ce sont 2359 patients qui ont débuté leur traitement entre 2016 et 2018 dont 506 patients avec une histologie épidermoïde (21.4 %). Le testing PDL1 s’est développé progressivement au fil des ans dans les deux cohortes. De même la proportion de patients exposés aux immunothérapies a augmenté de façon significative au fil des ans (p<0.01 pour les épidermoïdes et non épidermoïdes dans la cohorte française et dans la cohorte allemande). 

En termes d’efficacité, dans la cohorte française, la médiane d’OS des épidermoïdes était de 15.5 mois [14.3–16.7] avec des taux de survie à 1 an et 2 ans de respectivement 58.2% et 36.8 %. Il n’est pas noté d’évolution significative de la survie à 2 ans au fil des ans entre 2015 et 2017 (mais recul insuffisant pour 2018). La PFS à 1 an était de 18.6 %, 18.4 %, 16.4 % et 26.1 % pour les années 2015, 2016, 2017 et 2018. Pour les patients non épidermoïdes, la médiane de survie était de 14.1 mois (13.4-14.6) et le taux de survie à 1 et 2 ans était de respectivement 54.8% et 36.5%. Là encore, il n’est pas noté d’évolution significative au fil des ans.  Le taux de survie sans progression à un an était de 15.1 %, 14.9 %, 15.8 % et 18.5 % en 2015, 2016, 2017 et 2018. 

Dans la cohorte allemande, la médiane de survie globale des épidermoïdes était de 10.9 mois [9.8–12.9] avec un taux de survie à 1 et 2 ans de 47.3 % et 25.6 %. En 2016 on notait une survie particulièrement élevée à 15.2 mois [8.2–25.9] et une OS à 2 ans de 42.1 %. La PFS à 1 an était de 29.9 %, 23.1 % et 20.7 % en 2016, 2017 et 2018, respectivement. Pour les non épidermoïdes, la médiane de survie était de 11.9 mois [10.9–13.0] et la survie à 1 et 2 ans de 49.7 % et 30.8 %, respectivement. Là non plus l’évolution n’était pas significative au fil des ans. La PFS à 1 an était de 21.9 %, 24.5 % et 28.2 % en 2016, 2017 et 2018, respectivement.  

Il s’agit d’une large cohorte reflétant la « vraie vie » et les bénéfices obtenus par l’utilisation précoce d’une innovation thérapeutique à l’échelle d’une population. Les patients traités en France paraissent discrètement plus jeunes que les patients recevant l’immunothérapie en Allemagne sans que les auteurs n’aient d’explication. A noter qu’approximativement 12 à 18% des patients avaient un PS 2 ou au-delà au moment de l’initiation de l’immunothérapie, patients qui étaient habituellement exclus des essais cliniques. Le taux de patients traités au fil des années confirme l’adoption extrêmement rapide de ces nouvelles molécules sans que les toxicités potentielles et nouvelles ne semblent constituer un frein chez les cliniciens. 

Il n’est pas noté d’évolution significative de la survie sur la période étudiée. Les auteurs émettent l’hypothèse qu’une durée plus longue serait peut-être nécessaire pour détecter une amélioration. Il est par ailleurs possible que la survie ait été surestimée dans la cohorte française du fait de son caractère rétrospectif. La survie étonnamment longue des patients allemands en 2016 n’est pas expliquée. 

Les données de survies à 2 ans observées dans ces cohortes semblent en tout cas en phase avec les données issues de essais d’enregistrement associant l’immunothérapie avec la chimiothérapie mais supérieures aux essais concernant les patients prétraités par chimiothérapie (plutôt voisine de 20% dans ces essais). 

Reference

Impact of immune checkpoint inhibitors on the management of locally advanced or metastatic non-small cell lung cancer in real-life practice in patients initiating treatment between 2015 and 2018 in France and Germany. 

Griesinger F, Pérol M, Girard N, Durand-Zaleski I, Zacharias S, Bosquet L, Jänicke M, Quantin X, Groth A, Fleitz A, Calleja A, Patel S, Lacoin L, Daumont MJ, Penrod JR, Carroll R, Waldenberger D, Reynaud D, Thomas M, Chouaid C. 

Lung Cancer 2022; 172 : 65-74

Auteur

Anonyme