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Journal of Thoracic Oncology

Double immunothérapie par Nivolumab et Ipilimumab : les résultats à 4 ans de l’étude de phase III CheckMate 227.

2.01
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janvier 2022

Immunothérapie, Traitement des stades IV

Nous avons commenté ici les premiers résultats positifs  de l’étude CheckMate 227 (cliquer ici), un essai de phase III complexe qui comparait deux schémas d’immunothérapie, soit nivolumab+ipilimumab soit nivolumab seul à une chimiothérapie en première ligne dans deux  populations de malades définis par leur statut PD-L1  positif ou négatif :

  • Les patients dont le statut PD-L1 était positif étaient randomisés pour recevoir :
    • Soit nivolumab 3mg/kg toutes les 2 semaines et ipilimumab 1mg/kg toutes les 6 semaines (n=396),
    • Soit une chimiothérapie (n=397),
    • Soit nivolumab à 240 mg toutes les 2 semaines.
  • Les patients dont le statut PD-L1 était négatif étaient randomisés pour recevoir :
    • Soit nivolumab 3mg/kg toutes les 2 semaines et ipilimumab 1mg/kg toutes les 6 semaines (n=396),
    • Soit une chimiothérapie (n=397),
    • Soit nivolumab à 360 mg toutes les 3 semaines et chimiothérapie.

Le cross over n’était pas autorisé. 

Tous ces malades étaient atteints de cancers bronchiques non à petites cellules non antérieurement traités et ne présentaient ni mutation activatrice de l'EGFR ni  translocation ALK-EML4. En cours d’étude, la mesure de la charge mutationnelle a été introduite et les premiers résultats fournis en avril étaient très centrés sur l’intérêt de la charge mutationnelle qui permettait de définir deux groupes de patients : 

  • Ceux dont la charge mutationnelle était élevée : leur taux de PFS à un an lorsqu‘ils  étaient traités par nivolumab et ipilimumab était de 42,6% alors qu’il n’était que de  13,2% sous chimiothérapie. La survie sans progression médiane était de 7,2 mois chez les malades traités par immunothérapie vs 5,5 mois chez ceux traités par chimiothérapie. 
  • Alors que chez les malades dont la charge mutationnelle était basse il n’y avait pas de différence significative de survie sans progression.  

Un an plus tard nous avons commenté une deuxième publication consacrée principalement aux données de survie (cliquer ici).  Avec une durée médiane de suivi de 29,3 mois, la durée médiane de survie globale et les taux de survie à 1 et 2 ans des malades qui exprimaient PD-L1 à au moins 1% étaient significativement supérieurs chez les patients traités pas nivolumab et ipilimumab comparativement aux patients sous chimiothérapie (17,1 vs 14,9 mois). La survie était également augmentée chez ceux qui n’exprimaient pas PDL1 (17,2 vs 12,2 mois). 

De nouveaux résultats sont maintenant disponibles avec un suivi minimum de 49,4 mois. 

Comme le montre le tableau ci-dessous, les patients exprimant PD-L1 à un taux ≥ 1% continuaient à bénéficier de la double immunothérapie par rapport à la chimiothérapie. Ce bénéfice était observé aussi bien pour les non épidermoïdes (HR = 0,81 (0,67-0,99)) que pour les épidermoïdes (HR = 0,68 (0,51-0,89)). 

 

Nivolumab + Ipilimumab

Nivolumab

Chimiothérapie

PD-L1  ≥ 1%

N

396

396

397

Médiane de survie (mois) (95%CI)

17,1 (15-20,1)

15,7 (13,3-18,1)

14,9 (12,7-16,7)

HR (vs chimiothérapie) (95%CI)

0,76 (0,65-0,90)

0,91 (0,78-1,06)

 

Taux de survie à 4 ans (%)

29

21

18

PD-L1  ≥ 50%

 

N

205

214

192

Médiane de survie (mois) (95%CI)

21,2 (15,5-31,6)

18,1 (14,4-22,1)

14 (10-18,6

HR (vs chimiothérapie) (95%CI)

0,66 (0,52-0,84)

0,83 (0,66-1,03)

 

Taux de survie à 4 ans (%)

37

26

20

PD-L1  < 1%

 

Nivolumab + Ipilimumab

Nivolumab + Chimiothérapie 

Chimiothérapie

N

167

177

186

Médiane de survie (mois) (95%CI)

17,2 (12,8-22)

15,2 (12,3-19,8)

12,2 (9,2-14,3)

HR (vs chimiothérapie) (95%CI)

0,64 (0,51-0,81)

0,82 (0,65-1,02)

 

Taux de survie à 4 ans (%)

24

13

10

Le taux de patients vivants sans progression à 4 ans était de 14% sous double immunothérapie vs 4% sous chimiothérapie et la durée médiane de réponse était sous nivolumab et ipilimumab de 23,2 mois contre seulement 6,7 mois sous chimiothérapie. 

Ces différences étaient observées de façon encore plus importante chez les patients exprimant PD-L1  à au moins 50% et la double immunothérapie bénéficiait également aux patients dont la tumeur n’exprimait pas PD-L1.  (cf tableau ci-dessus). 

Enfin le taux de survie étaient numériquement plus élevés sous nivolumab et ipilimumab que sois nivolumab seul, les courbes de survie globale se séparant à environ 1 an. 

Puisque la plupart des évènements secondaires immunologiques surviennent dans les 6 premiers mois, cette publication n’apporte pas de nouveau signal de toxicité. 

Parmi les patients exprimant PD-L1 à au moins 1 %, 66 (16,9 %) ont eu un effet secondaire qui a conduit à l’arrêt du traitement par nivolumab et ipilimumab. Ils avaient alors reçu un nombre médian de doses de 7,5 pour le nivolumab et de 3 pour l’ipilimumab. Ces patients qui avaient interrompu la double immunothérapie avaient une survie médiane de 30,6 mois et un taux de survie à quatre ans de 44 %. Parmi ces patients, 53 % étaient répondeurs au traitement et la durée médiane de réponse depuis l’arrêt du traitement était de 52 mois, plus de la moitié d’entre eux ayant maintenu la réponse pendant au moins 3 ans après l’arrêt du traitement. 

Cet article est pour nous probablement le plus important des 3 articles rapportant les résultats de cette étude parce qu’il montre un bénéfice important et durable de la double immunothérapie par nivolumab et ipilimumab qui s’étend à tous les groupes de patients quelle que soient l’expression de PD-L1  ou l’histologie de leur tumeur.  Par ailleurs cette étude confirme que les patients répondeurs dont le traitement a  été interrompu pour toxicité peuvent avoir de très longues réponses sans aucun traitement.  La double immunothérapie est donc bien une option pour ces malades 

 

Reference

First-Line Nivolumab Plus Ipilimumab in Advanced NSCLC: 4-Year Outcomes From the Randomized, Open-Label, Phase 3 CheckMate 227 Part 1 Trial.

Paz-Ares LG, Ramalingam SS, Ciuleanu TE, Lee JS, Urban L, Caro RB, Park K, Sakai H, Ohe Y, Nishio M, Audigier-Valette C, Burgers JA, Pluzanski A, Sangha R, Gallardo C, Takeda M, Linardou H, Lupinacci L, Lee KH, Caserta C, Provencio M, Carcereny E, Otterson GA, Schenker M, Zurawski B, Alexandru A, Vergnenegre A, Raimbourg J, Feeney K, Kim SW, Borghaei H, O'Byrne KJ, Hellmann MD, Memaj A, Nathan FE, Bushong J, Tran P, Brahmer JR, Reck M.

J Thorac Oncol 2021. Online ahead of print.

Auteur

Bernard Milleron

Rédacteur en chef d'EM-Onco.