Vous êtes ici

Journal of Clinical Oncology

Le Brigatinib chez les patients traités par crizotinib : ALTA une nouvelle étude de phase II randomisée

1.02
Average: 1 (1 vote)
mai 2017

ALK, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs, Thérapeutique ciblée

Il y a 3 mois nous commentions sur ce site les résultats d’une étude muticentrique de phase I/II  dans laquelle le brigatinib avait été administré notamment à 79 patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules avec réarrangement ALK, qui presque tous avaient reçu du crizotinib. Ceux qui ont reçu du crizotinib avaient un taux de réponse de 72% et les 8 qui n’en avaient pas reçu ont tous répondu. De plus, 8 des 15 malades qui avaient des métastases cérébrales mesurables ont répondu.  La survie sans progression médiane des patients qui avaient reçu du crizotinib était de 13,2 mois.

Le brigatinib semblait donc être un anti-ALK de nouvelle génération particulièrement prometteur d’autant qu’il serait in vitro actif sur des modèles résistant incluant G1202R qui constitue un mécanisme de résistance aux inhibiteurs de ALK (cliquer ici).

Toutefois ces résultats intéressants avaient été atteints au prix d’une toxicité non négligeable (cliquer ici) et dans des études d’escalade de doses des effets adverses pulmonaires parfois sévères très précoces (dans les 24-48 premières heures) ont été observés.

Sur la base de ces résultats il était donc logique de poursuivre l’étude de ce médicament dans une étude randomisée comparant  deux doses de brigatinib:

  • Soit 90 mg par jour,
  • Soit 180 mg par jour après une dose initiale de 90 mg pendant 7 jours.

L’étude ALTA proposée ici est une étude randomisée de phase II dans laquelle les patients devaient avoir un cancer bronchique non à petites cellules avec une translocation ALK-EML4 localement avancé ou métastatique. Ils devaient avoir reçu du crizotinib et être en progression. Ils devaient ne pas avoir reçu d’autres anti-ALK. Ils ne devaient pas avoir d’antécédents de pneumopathie médicamenteuse ni avoir de métastase cérébrale symptomatique ou nécessitant de fortes doses de corticoïdes. 

Ils étaient stratifiés selon la présence ou l’absence de métastases cérébrales et la réponse au crizotinib.

L’objectif principal était le taux de réponses confirmées. Les objectifs secondaires étaient notamment le taux de réponse cérébrale, la durée de réponse, la survie sans progression, la tolérance et la qualité de vie.

En un an, 222 patients ont été inclus dans 71 centres de 18 pays. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties.

Les résultats en terme d’efficacité sont résumés sur le tableau ci-dessous[1] :

 

90 mg

180 mg

N

112

110

Réponsespartielles (%)

50 (45)

53 (48)

Réponses complètes (%)

4 (4)

5 (5)

Réponses intracraniales si métastases cérébrales (%)

42

67

Taux de contrôle (%)

87 (78)

92 (84)

Durée de réponse (mois)

13,8

13,8

PFS médiane (mois)

9,2

15,6

Taux de survie à 1 an (%)

71

80

A noter que dans le bras B, une réponse a été observée chez un patient qui avait une mutation G1202R.

Les effets secondaires rapportés au traitement  les plus fréquents sont des effets gastro-intestinaux (nausées et diarrhée).

En ce qui concerne les événements pulmonaires, on retrouve dans cette étude  une fréquence élevée d’événements pulmonaires qui surviennent après un temps médian de traitement très court de deux jours.

Il s’agit de dyspnée, d’hypoxie, de toux et de pneumopathies  qui sont survenus  chez 14 patients (6 %). Sept d’entre avait des effets de grade ≥3.  Parce qu’ils sont précoces, ses effets sont survenus dans les deux bras à la dose de 90 mg. Aucun d’entre eux n’a été décrit à la dose de 180 mg.

  • Chez 6 de ces malades, le traitement a été interrompu puis réintroduit sans problème,
  • Chez un d’entre eux, il a été continué et une dose réduite à 60 mg sans problème également,
  • Chez 7 patients le traitement a été interrompu. Un de ces patients est décédé au septième jour dans un tableau de pneumopathie avec dyspnée et toux. L’autopsie a révélé une lymphangite carcinomateuse et les lésions de dommage alvéolaire ainsi qu’un épanchement péricardique.

La qualité de vie s’est améliorée au début du traitement durant les 7 premiers mois. 

A la suite de cette étude de phase II, le brigatinib a été considéré comme un traitement prometteur et continue à être développé à la dose de 180 mg.

Le brigantinib est donc un anti-ALK de nouvelle génération qui est actif après échec du crizotinib administré en première ligne. Il est trop tôt pour dire si son activité sera différente de celle des autres anti-ALK de nouvelle génération mais il semble bien que son profil de toxicité soit différent, les événements pulmonaires précoces dont certains  sont rapportés au traitement nécessiteront une gestion attentive des premiers jours de traitement. 

Quant à son utilisation dès la première ligne, rappelons que deux études de phase III comparent un anti-ALK de nouvelle génération au crizotinib sont en cours :

  • l’essai  randomisé de phase III ALEX qui compare alectinib et crizotinib (cliquer ici) dont les résultats seront communiqués au prochain congrès de l’ASCO.  
  • Et l’essai  randomisé de phase III ALTA-1L comparant en première ligne le brigatinib au crizotinib (cliquer ici) .

 

 

[1] Ont été indiquées les réponses confirmées et revues par un comité indépendant

Reference

Brigatinib in Patients With Crizotinib-Refractory Anaplastic Lymphoma Kinase-Positive Non-Small-Cell Lung Cancer: A Randomized, Multicenter Phase II Trial.

Kim DW, Tiseo M, Ahn MJ, Reckamp KL, Hansen KH, Kim SW, Huber RM, West HL, Groen HJM, Hochmair MJ, Leighl NB, Gettinger SN, Langer CJ, Paz-Ares Rodríguez LG, Smit EF, Kim ES, Reichmann W, Haluska FG, Kerstein D, Camidge DR.

J Clin Oncol. 2017 May  [Epub ahead of print]

Auteur

Bernard Milleron

Rédacteur en chef d'EM-Onco.