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New England Journal of Medicine

Osimertinib dès la première ligne ? FLAURA, une importante étude de phase III.

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novembre 2017

Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs, EGFR, Thérapeutique ciblée, Traitement des stades IV

Il y a moins d’un an, nous commentions les résultats de l’étude AURA3, une étude de phase III  comparant l’osimertinib (AZD 9291) à chimiothérapie chez les patients présentant une mutation T790 M : le HR de survie sans progression  était à 0,28 en faveur de l’osimertinib el le taux de PFS à un an était de 44% avec l’osimertinib vs 10% avec la chimiothérapie. L’osimertinib devenait alors, sans contestation possible, le traitement de référence des patients traités par inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR de première ou deuxième  génération en progression, à chaque fois qu’ils présentaient une mutation T790M (cliquer ici).

Mais les choses évoluent très vite car l’osimertinib inhibe non seulement les tumeurs qui ont une mutation de résistance T790M, mais aussi celles qui présentent une mutation de sensibilité usuelle. De plus son activité chez les patients qui ont des métastases cérébrales et son bon profil de toxicité en font un excellent candidat pour la première ligne.  

Le but de cette étude de phase III FLAURA, dont les résultats viennent d’être accessibles,  est de le prouver en comparant chez des patients porteurs d’une mutation activatrice de l'EGFR l’osimertinib à un inhibiteur de la tyrosine kinase de première génération.

Méthodes

Pour être éligibles à cette étude à promotion industrielle, les patients devaient avoir un cancer bronchique non à petites cellules avancé ou métastatique, ne pas avoir été traités, et être éligibles pour recevoir un traitement par gefitinib ou erlotinib. Ils devaient présenter une mutation usuelle (Ex19del ou L858R).  Ils pouvaient avoir des métastases cérébrales à condition qu’elles soient cliniquement stables.

Ils étaient randomisés en double aveugle sur un mode 1/1 entre :

  • soit 80 mg/jour d’osimertinib,
  • soit 250 mg/jour de gefitinib ou 150 mg/jour d’erlotinib.

Ils étaient stratifiés selon le type de mutation (Ex19del ou L858R) et l’origine asiatique ou non.

Cinq mois après le début de l’étude, en avril 2015, un crossover a été autorisé permettant aux patients du bras standard de recevoir en deuxième ligne de l’osimertinib.  

L'objectif principal était la survie sans progression déterminée par les investigateurs. Une deuxième détermination de la PFS par un comité indépendant a été systématiquement réalisée.

Les objectifs secondaires étaient la survie globale, le taux de réponse,  la durée de réponse, le taux de contrôle de la maladie, la profondeur de la réponse et la toxicité.

Il fallait observer 359 événements (progression ou décès) chez 530 patients randomisés pour détecter un HR de PFS de 0,71.

Résultats

Parmi 994 patient screenés dans 132 sites de 29 pays, 556 ont été randomisés. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties :  il y avait plus de 60 % d’asiatiques et plus de 60 % d’anciens fumeurs. Autour de 20 % présentaient des métastases cérébrales et plus de 60 % une délétion de l’exon 19.

A la date de point, la durée médiane d’exposition au traitement par osimertinib était de 16,2 mois et de 11,5 mois pour ceux qui recevaient un traitement standard. À cette même date 49 % des patients du bras expérimental étaient en progression ou décédés versus 74 % dans le bras standard.  La poursuite du traitement du fait d’un bénéfice clinique en progression était autorisée et ce fût  le cas de 67 % des patients du bras expérimental et de 70 % de ceux du bras standard.  Au total 55 patients (43 %) du bras standard ont reçu de l’osimertinib à la progression dans le cadre du crossover autorisé.

Les principaux résultats sont résumés sur le tableau ci-dessous :

 

Osimertinib

Standard

p

PFS médiane de l’ensemble de la population (mois)

18,9

10,2

 

HR de progression ou décès (95% CI) (%)

0,46 (0,37-0,57)

<0,001

Taux de réponse (%)

80

76

 

Taux de contrôle de la maladie (%)

97

92

 

Temps d’obtention de la réponse (semaines)

6,1

6,1

 

Durée médiane de réponse (mois)

17,2

8,5

 

Survie médiane (mois)

NA

NA

 

Taux de survie à 18 mois (95% CI) (%)

83

(78-87)

71

65-76)

 

Outre l’importante augmentation significative de survie sans progression dans le bras expérimental, on retiendra également que :

  • La survie sans progression mesurée par un panel indépendant était confirmée.
  • Cette supériorité de la PFS était observée dans tous les groupes prédéfinis : asiatiques ou non, types de mutation, métastases cérébrales ou non.
  • A la date de point, seulement 25 % des données de survie étaient matures mais dès maintenant, le pourcentage des patients vivant à 18 mois, est nettement supérieur dans le bras expérimental et l’examen des courbes de survie montre qu’elles s’écartent de façon précoce et importante.

Les effets adverses de grade ≥3 ont été rapportés chez moins de patients du groupe osimertinib (34 % versus 45 %). La plupart des toxicités sont les mêmes avec notamment dans le bras expérimental et dans le bras standard respectivement 58% vs 78% de signes cutanés (rash et acné), 58% et 57% de diarrhées, et 36% de sécheresses cutanées dans les 2 bras. Des allongements de l’espace QT ont été rapportés plus fréquemment chez les patients du bras expérimental (10 % versus 5 %) sans conséquences fatales. Des pneumopathies interstitielles diffuses ont été rapportées chez 11 patients du groupe expérimental et 6 du bras standard, ici aussi sans conséquences fatales. Aucun effet adverse fatal n’a été rapporté à l’osimertinib et un (une diarrhée) a été rapporté comme possiblement en rapport avec le traitement standard.

Cette étude de phase III dont Jean Charles Soria, est le premier signataire est certainement l’une des plus importante de l’année. Elle démontre avec une méthodologie parfaite que l’osimertinib, administré dès la première ligne, est plus beaucoup plus actif qu’un traitement standard par gefitinib ou erlotinib puisqu’il parvient à presque doubler la durée médiane de survie sans progression, et ce avec un profil de toxicité plutôt meilleur. La démonstration d’une prolongation significative de la survie n’est pas encore apportée mais l’aspect des courbes et le taux de survie à 18 mois font penser qu’elle le sera, et cela bien qu’un crossover ait été autorisé.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Reference

Osimertinib in Untreated EGFR-Mutated Advanced Non–Small-Cell Lung Cancer

Soria JC, Ohe Y, Vansteenkiste J, Reungwetwattana T, Chewaskulyong B, Lee KH, Dechaphunkul A, Imamura F, Nogami N, Kurata T, Okamoto I, Zhou C, Cho BC, Cheng Y, Cho EK, Voon PJ,  Planchard D,  Su WC,  Gray JE, Lee S-M, Hodge R, Marotti M, Rukazenkov Y,
and Ramalingam SS, for the FLAURA Investigators

N Eng J Med, in press Nov 19, 2017 

Auteur

Bernard Milleron

Rédacteur en chef d'EM-Onco.