Vous êtes ici

Journal of Thoracic Oncology

Lorsqu’on administre une irradiation prophylactique cérébrale à un malade atteint de CBPC, faut-il éviter d’irradier l’hippocampe ?

2.01
Average: 2 (1 vote)
mai 2021

Cancers à petites cellules, Métastases cérébro-ménagées, Radiothérapie

L’irradiation prophylactique cérébrale diminue l’incidence des métastases cérébrales des patients atteints de cancer bronchique à petites cellules et il est possible qu’elle prolonge également la survie globale de ces patients (cliquer ici pour un accès gratuit) même si une importante étude randomisée japonaise  conteste cette hypothèse (cliquer ici). Toutefois cette irradiation prophylactique cérébrale est souvent associée à un déclin des facultés neurocognitives qu’il nous faut mettre en balance avec le bénéfice de ce traitement (cliquer ici)

Différents explications ont été proposées  pour expliquer cet effet secondaire dont l’un des plus importants est la dégradation de l’hippocampe, une structure cérébrale particulièrement importante pour apprendre et mémoriser. Or, une étude de phase II, l’étude RTOG 0933 apporte des arguments pour penser que, comparativement à des contrôles historiques, la protection de l’hippocampe lors de l’irradiation prophylactique cérébrale permettrait de préserver la mémoire et la qualité de vie (cliquer ici pour un accès gratuit)

L’étude randomisée de phase III dont nous commentons ici les résultats a été menée pour confirmer ou infirmer ces résultats chez des patients atteints de cancer bronchique à petites cellules et recevant une irradiation prophylactique cérébrale. 

L'objectif principal était la mesure du déclin des réponses à 4 mois au Hopkins Verbal Learning Test-Revised (HVLT-R), un test de mémoire basé sur la mémorisation de mots particulièrement approprié au suivi des patients. Les objectifs secondaires étaient l’incidence et le siège des métastases cérébrales observées, la survie sans progression, la survie globale et la qualité de vie ainsi que d’autre objectifs cognitifs.   

Pour être inclus, les patients devaient avoir plus de 18 ans, un cancer bronchique à petites cellules de stade limité ou étendu, sans signes de métastases cérébrales sur une I.R.M. préalable. Ils devaient également ne pas avoir progressé après une chimioradiothérapie pour les stades localisés ou une chimiothérapie pour les disséminés. 

Les patients étaient randomisés pour recevoir soit une irradiation prophylactique cérébrale classique de 25 Gy en 10 fractions, soit une irradiation prophylactique cérébrale identique associée à une préservation de l’hippocampe (celui-ci ne devant recevoir que moins de 10 Gy) . Des tests neuropsychologiques très précis évaluant notamment la mémoire, l’attention, la fonction motrice devaient être réalisés initialement puis à 4, 8, 12, 18 et 24 mois après la fin de l’irradiation prophylactique cérébrale. Pour démontrer une différence de déclin cognitif de 30% et compte tenu qu’une partie des patients ne pourraient pas tous faire ces tests, il fallait randomiser 168 patients. 

En 5 ans 168 patients ont été randomisés dans 10 centres belges et hollandais, 84 dans chaque bras. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties. Le temps de suivi médian des patients vivant était de deux ans. 

Les données concernant l'objectif principal étaient disponibles pour 102 patients et aucune différence  n'a été observée : 29% des patients du bras standard et 28% de ceux du bras expérimental ont eu une diminution ≥5 points du Verbal Learning Test-Revised à 4 mois. De même, les performances des autres tests cognitifs n’ont pas été modifiées. 

En tout 31 patients ont développé des métastases cérébrales après cette irradiation, 17 dans le bras standard et 14 dans le bras expérimental. Ainsi l’incidence cumulé de métastases cérébrales à deux ans était de 20 % dans le bras standard et de 16 % dans le bras expérimental.  Quant à la survie, 102 des 168 patients sont décédés et les durée médiane de survie était de 19,9 mois dans le bras standard et 18,5 mois dans le bras expérimental sans qu’aucune différence significative de survie ne soit observée. 

La négativité de cette étude permet de considérer que, dans l’état actuel des connaissances, la protection de l’hippocampe ne doit pas être proposée aux patients en dehors d’essais thérapeutiques. 

 

 

Reference

Phase 3 Randomized Trial of Prophylactic Cranial Irradiation With or Without Hippocampus Avoidance in SCLC (NCT01780675).

Belderbos JSA, De Ruysscher DKM, De Jaeger K, Koppe F, Lambrecht MLF, Lievens YN, Dieleman EMT, Jaspers JPM, Van Meerbeeck JP, Ubbels F, Kwint MH, Kuenen MA, Deprez S, De Ruiter MB, Boogerd W, Sikorska K, Van Tinteren H, Schagen SB.

J Thorac Oncol 2021; 16 : 840-849

Auteur

Bernard Milleron

Rédacteur en chef d'EM-Onco.