Lancet

Aspirine et cancer : un niveau de preuve supérieur.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mars 2012

Épidémiologie, Prévention

Le rôle de l’aspirine dans la prévention des cancers à long terme paraît assez solidement établi. L’auteur de cet article l’a déjà démontré à plusieurs reprises dans le lancet pour le cancer du colon en 2010 à partir de 4 essais randomisés (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20970847) et pour plusieurs autres cancer en 2011 (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21144578).

Néanmoins,  leur effet préventif à court terme, et particulièrement chez les femmes n’était pas bien démontré, ce qui a conduit à la réalisation de l’étude actuelle.

Cette nouvelle étude, toujours menée par l’équipe de Peter Rothwell, est basée sur les données individuelles de 51 études randomisées comparant la prise quotidienne d’aspirine à pas d’aspirine pour son rôle anticoagulant. Les essais dans les quels l’aspirine était administrée moins de 3 mois où ceux où elle l’était donnée dans un but de prévention du cancer n’ont pas été inclus dans cette étude, ce qui représente plus de 77 000 patients. 

Les principaux résultats sont les suivants :

1- Mortalité par cancer

  • La prise d’aspirine réduit le taux de décès non vasculaires des 51 études : 1021 vs 1173 décès; OR 0.88, 95% CI 0.78–0.96, p=0.003. Ainsi 152 décès ont été évités chez 40 269 participants qui prenaient de l’aspirine.
  • Le nombre de décès par cancers n’est connu que dans 34 essais, ce qui représente tout de même plus de 69 000 patients. L’administration d’aspirine réduit le nombre de décès par cancer (OR 0.85,- 95% CI 0.76–0.96, p=0.008).  (24vs39) On retrouve un très fort impact sur la mortalité par cancer colorectal, mais aussi par lymphome. Il existe une aussi une forte réduction des cancers gynécologiques, mais celle-ci n’atteint pas la significativité. Le cancer du poumon ne semble pas concerné.
  • C’est surtout tardivement que la réduction du taux de décès était démontrée, mais cette démonstration avait déjà été faite. Une notion nouvelle et que cette réduction survient aussi précocement, dans les 3 premières années, pour les essais qui comportaient des doses élevées d’aspirine (OR 0.69, 95% CI 0.51–0.92, p=0.01).

2- Incidence des cancers.

Dans 5 essais (32 996 patients) l’incidence des cancers non fatals est disponible : l’aspirine réduit l’incidence de cancers après une certaine durée qui commence après 3 ans de prise d’aspirine.  Cette réduction d’incidence après 3 ans (324 vs 421; OR 0.76, 95% CI 0.66–0.88, p=0.0003) était indépendante de l’âge, du sexe, et du tabagisme.

3 Balance bénéfice-risque.

Dans cette discussion de l’effêts bénéfique-risque, les auteurs insistent sur le fait que les effets de l’aspirine varient dans le temps. Le risque de saignement majeur augmente au début du traitement puis diminue ensuite de sorte que la diminution du risque de cancer est la seule significative après 3 ans.

C’est là qu’est toute la discussion, les risques hémorragiques de l’aspirine, notamment au début du traitement étant loin d’être négligeables, est-on prêt à assumer ceux-ci pour un bénéfice hypothétique plus tardif ? 

Reference

Short-term effects of daily aspirin on cancer incidence, mortality, and non-vascular death: analysis of the time course of risks and benefits in 51 randomised controlled trials.

Rothwell PM, Price JF, Fowkes FG, Zanchetti A, Roncaglioni MC, Tognoni G, Lee R, Belch JF, Wilson M, Mehta Z, Meade TW.

Lancet. 2012 Mar 20. [Epub ahead of print]

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer