New England Journal of Medicine

CheckMate 026 : une étude de phase III explorant le Nivolumab en première ligne

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2017

Immunothérapie, Traitement des stades IV

L’efficacité du Nivolumab en deuxième ligne étant démontrée dans les cancers épidermoïdes (cliquer ici) comme dans les cancers non épidermoïde (cliquer ici) et son efficacité en première ligne étant suggérée par une importante étude de cohorte (cliquer ici) , il était logique d’évaluer en phase III l’efficacité de ce traitement en première ligne.

Méthodes

C’est l’objet de cette étude prospective et randomisée de phase III qui compare, chez des patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IV et dont le PS est à 0 ou 1 et qui en relecture centralisée avaient une expression de PD-L1 d’au moins 1%[1].

  • Nivolumab à 3mg/kg toutes les 2 semaines,
  • A 6 cycles d’un doublet de chimiothérapie comportant du platine. La maintenance par Pemetrexed était possible pour les patients atteints de cancers non épidermoïdes.  

La randomisation était stratifiée selon que le statut PD-L1 était ≥ ou < à 5%.

L'objectif principal était la survie sans progression, mesurée en lecture centralisée, chez les patients qui avaient un niveau d’expression de PD-L1 ≥ 5%. Les objectifs secondaires étaient la survie sans progression de tous les patients, la survie globale des patients qui avaient une expression de PD-L1≥5%, la réponse et la toxicité.

Il fallait 415 patients pour démontre une diminution de risque de décès ou de progression d’au moins 0,71 en estimant à 7 mois la survie sans progression du bras contrôle.

Résultats

Sur 1325 patients enrôlés 541 (41%) ont été randomisés. Les 784 qui ne l’ont pas été présentaient une immunohistochimie PD-L1 négative ou non réalisée ou n’avaient pas tous les critères d’inclusion ou d’exclusion.

Les 2/3 avaient un PS à 1, 90% étaient fumeurs ou anciens fumeurs, 77% avaient une expression de PD-L1 ≥5% et 40% ≥ 50%. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties à l’exception du pourcentage de femmes et du pourcentage de PD-L1 ≥50% qui étaient inférieurs dans le bras expérimental tandis que le volume tumoral était supérieur.

Avec un suivi médian de 13,5 mois, les résultats concernant les 423 patients qui avaient une expression de PD-L1 ≥5% ont été les suivants :

 

Nivolumab

Chimiothérapie

p

PFS médiane (mois) (95%CI)

4,2 (3-5,6)

5,9 (5,4-6,9)

 

HR de progression ou décès (95%CI)

1,15 (0,91-1,45)

0,25

Survie globale médiane (mois) (95%CI)

14,4 (11,7-17,4)

13,2 (10,7-17,1)

 

HR de décès (95%CI)

1,02 (0,80-1,30)

 

Taux de réponse (%)

26

33

 

Durée médiane de réponse (mois)

12,1

5,7

 

Evénements secondaires rapportés au traitement (%)

71

92

 

Evénements secondaires rapportés au traitement de grade 3 ou 4  (%)

18

51

 

Décès rapportés au traitement

2

3

 

Cette étude est donc négative puisqu’il n’y avait, chez les patients dont l’expression de PD-L1 était ≥5%,  pas de différence significative de survie sans progression. On notera aussi l’absence de différence significative de survie globale et une moindre toxicité de l’immunothérapie.

Une analyse exploratoire a été conduite chez 312 patients pour lesquels la charge mutationnelle de la tumeur a pu être déterminée : il y avait une mauvaise répartition des patients à charge mutationnelle élevée : 30% dans le groupe nivolumab vs 39% dans le bras chimiothérapie. Ceci n’est pas inintéressant car les taux de réponse sous nivolumab étaient, chez les malades qui avaient une charge mutationnelle élevée, supérieurs à ceux obtenus sous chimiothérapie (47 vs 28%) et surtout la survie sans progression médiane était plus élevée (9,7 vs 5,8 mois).

Cette étude est donc globalement négative, mais elle montre, comme d’autres études l’ont déjà démontré (cliquer ici pour un accès gratuit) que les patients qui ont une charge mutationnelle élevée tirent bénéfice de l’immunothérapie, mais du fait qu’il s’agit d’une analyse exploratoire ceci ne peut être formellement affirmé. Rappelons que l’étude KEYNOTE 024 a posé la même question en comparant le pembrolizumab à la chimiothérapie en première ligne chez des patients dont l’expression de PD-L1  est d’au moins de 50% et que cette étude a démontré un bénéfice significatif de l’immunothérapie (cliquer ici).

Ces différences sont difficilement expliquables, mais on se souviendra que le test utilisé pour la détermination du statut PDL1 n'est pas le même dans les deux études, ce qui pourrait expliquer une sélection différente des malades. La poursuite d’une recherche clinique intense et donc plus que jamais nécessaire pour préciser avec quelle méthode il faut sélectionner les malades qui vont bénéficier de l’immunothérapie seule ou en association en première ligne et quelles vont être les modalités de ce traitement. Parions que dans les années qui viennent l’arbre décisionnel du traitement de première ligne des cancers bronchiques non à petites cellules ne va pas cesser d’évoluer.    

 


[1] Ils avaient également un certain nombre de critères d’exclusion concernant les métastases cérébrales, le statut mutationnel, la présence de maladies auto-immunes, la corticothérapie etc qui sont retrouvés dans la plupart des études d’immunothérapie. 

Reference

First-Line Nivolumab in Stage IV or Recurrent Non-Small-Cell Lung Cancer.

Carbone DP, Reck M, Paz-Ares L, Creelan B, Horn L, Steins M, Felip E, van den Heuvel MM, Ciuleanu TE, Badin F, Ready N, Hiltermann TJN, Nair S, Juergens R, Peters S, Minenza E, Wrangle JM, Rodriguez-Abreu D, Borghaei H, Blumenschein GR Jr, Villaruz LC, Havel L, Krejci J, Corral Jaime J, Chang H, Geese WJ, Bhagavatheeswaran P, Chen AC, Socinski MA; CheckMate 026 Investigators.

N Engl J Med 2017; 376 : 2415-2426

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Revue : British Journal of Cancer