Journal of Thoracic Oncology

Les biopsies préopératoires des tumeurs carcinoïdes sont elles concordantes avec le diagnostic final ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
avril 2021

Tumeurs neuro-endocrines, Anatomo-pathologie

Selon les recommandations de l’OMS en 2015,  les tumeurs carcinoïdes qui sont classées, à côté des tumeurs neuroendocrines à grandes cellules et des cancers bronchiques à petites cellules,  au sein des cancers neuroendocrines, sont elles même divisées en tumeurs carcinoïdes typiques de bas grade et en tumeurs carcinoïdes atypiques de grade intermédiaire. C’est le compte des mitoses (0-1 pour les typiques et 2-10 pour les atypiques) qui fait la différence ainsi que la présence de nécrose qui est également en faveur des tumeurs carcinoïdes atypiques. 

On pourrait penser que la distinction entre tumeurs carcinoïdes typiques ou atypiques n’est pas très importante puisque le  traitement de ces tumeurs est essentiellement chirurgical : en fait cette distinction est importante car il est admis qu’on peut pratiquer des résections économiques (résections sublobaires ou tumorectomies) dans les tumeurs carcinoïdes typiques, alors que, parce que les tumeurs carcinoïdes atypiques ont une récidive locale et métastatique plus fréquente, le traitement de référence de ces tumeurs est la lobectomie.

Or cette décision est en général prise sur les résultats des biopsies préopératoires … Et si l’utilisation de l’indice Ki67 aide à différencier les tumeurs carcinoïdes des carcinomes neuroendocrines à grandes cellules, cet indice est peu discriminant pour la différence des tumeurs carcinoïdes typiques et atypiques de sorte que le diagnostic de certitude est le plus souvent porté sur la pièce opératoire sans que la valeur diagnostique des petites biopsies préopératoires soit bien connue.  

L’objet de cette étude rétrospective hollandaise est de comparer ces biopsies préopératoires  repérées à partir des prélèvements enregistrés de 2003 à 2012 dans  deux registres nationaux,  le Dutch Pathology Registry (PALGA) et le Netherlands Cancer Registry (IKNL). Durant cette période, 1003 diagnostics de tumeurs carcinoïdes ont été portés dont 706 de stades I à III. La moitié de ces diagnostics n’ayant été portés que sur des prélèvements opératoires, c’est finalement sur 330 paires de biopsies pré et post-opératoires qu’a porté ce travail. 

Le temps médian entre les deux diagnostics était de 41 jours. 

Les résultats peuvent être résumés ainsi :

  • Lorsque le diagnostic préopératoire était celui de tumeurs carcinoïdes typiques (n=121):
    • 64% étaient bien des tumeurs carcinoïdes typiques. 
    • 24% étaient des tumeurs carcinoïdes atypiques.
    • Et 12% étaient des cancers de type non précisé (NOS). 
  • Lorsque le diagnostic préopératoire était celui de tumeurs carcinoïdes atypiques (n=15):
    • 60% étaient bien des tumeurs carcinoïdes atypiques.
    • Mais 40% étaient des tumeurs carcinoïdes typiques.
  • Lorsque le diagnostic préopératoire évoquait le diagnostic de cancer neuroendocrine de type non précisé (n=158).
    • 42% étaient des tumeurs carcinoïdes typiques.
    • 23% des tumeurs carcinoïdes atypiques. 
    • Et 35% restaient des cancers neuroendocrines de type non précisé.
  • Lorsque le diagnostic préopératoire évoquait le diagnostic de carcinomes neuroendocrines à grandes cellules (n=6) 2 avaient une tumeur carcinoïde typique et 4 une tumeur carcinoïde atypique
  • Enfin chez les patients qui avaient un autre diagnostic (n=30), 60% avaient à égalité une tumeur carcinoïde typique ou atypique et 40% un cancer neuroendocrine de type non précisé. 

Avec un suivi médian de 88 mois, 25 (8%) patients ont récidivé, dont 4 localement, 20 à distance et 1  localement et à distance.  Ceci correspond à

  • 3 % des patients qui avait un carcinoïde typique, 
  • 19 % de ce qui avait un carcinoïde atypique, 
  • et 4 % de ce qu’il y avait à un carcinoïde de type non précisé.

Les patients dont les biopsies  préopératoires avaient porté  le diagnostic de tumeur carcinoïde typique ou de cancer neuroendocrine de type non précisé qui un post-opératoire ont été classés dans le groupe des  tumeurs carcinoïdes atypiques avaient un plus fort taux de récidive que les autres.   

Dans la mesure où 92 % des patients ont eu une lobectomie, une bilobectomie ou une pneumonectomie, et où donc très peu de patients ont eu une résection économique, il n’est pas possible de savoir si ces erreurs diagnostiques initiales ont ou non impacté la survie, ce qui aurait pu être le cas si ces erreurs avaient induit un nombre excessif de résections économiques. Cela explique d’ailleurs que la survie à long terme de ces patients ne soit pas très différente selon que le diagnostic exact a été porté en pré ou post opératoire. Néanmoins cette étude attire l’attention sur le grand taux d’erreurs des biopsies préopératoires, ce qui doit nous rendre très réservés sur la prévision d’un geste économique envisagé sur les seuls résultats des biopsies préopératoires.

Reference

 Preoperative Biopsy Diagnosis in Pulmonary Carcinoids, a Shot in the Dark.

Moonen L, Derks JL, Hermans BCM, Bunnik IM, Hillen LM, van Suylen RJ, den Bakker MA, von der Thüsen JH, Damhuis RA, van den Broek EC, Buikhuisen WA, Dingemans AC, Speel EJM.

J Thorac Oncol 2021; 16 : 610-618

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