New England Journal of Medicine

Les résultats de l’étude KEYNOTE-024 : un tournant dans l’histoire de l’oncologie thoracique.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2016

Immunothérapie, Traitement des stades IV

Aujourd’hui, dimanche 9 octobre paraissent en ligne dans le New England Journal of Medicine, en même temps qu’ils sont communiqués à l’ESMO,  les résultats très attendus de l’étude KEYNOTE-024.

Méthodes

C’est une étude de phase III  multicentrique, à promotion industrielle qui porte sur la première ligne et qui a été conduite chez des patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules sans mutation activatrice de l’EGFR  ni translocation ALK-EML4, ayant un PS à 0 ou 1 et un score PDL1 d’au moins 50% (lecture centralisée) et sans métastases cérébrales non pré-traitées.

Ils étaient randomisés  sur un mode 1/1 entre :

  • soit pembrolizumab à 200 mg toutes les 3 semaines pendant 35 cycles,
  • soit l’une des 5 chimiothérapies suivantes, laissées au choix des investigateurs, et comportant 4 à 6 cycles soit de cisplatine et pemetrexed, soit de carboplatine et pemetrexed, soit de cisplatine et gemcitabine, soit de carboplatine et gemcitabine soit enfin de carboplatine et paclitaxel. Les deux premières chimiothérapies n’étaient possibles que pour les cancers non épidermoïdes et ces patients pouvaient continuer le pemetrexed en maintenance.

Les critères de stratification étaient le PS, l’histologie et la région d’inclusion (Asie ou non).

L’objectif principal était la survie sans progression. Les objectifs secondaires étaient la survie globale, le taux de réponse et la toxicité.  

Résultats

Au total, 1934 patients ont été screenés dans 142 sites de 16 pays et sur 1635 échantillons qui ont pu être évalués pour PDL1, 500 avaient un score ≥50%. Parmi ceux-ci 305 patients éligibles ont été inclus par 102 sites entre septembre 2014 et octobre 2015 : 151 ont été randomisés dans le bras chimiothérapie (carboplatine et pemetrexed était la chimiothérapie la plus fréquemment prescrite et 46 patients ont reçu une maintenance par pemetrexed) et 154 dans le bras pembrolizumab.

Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient réparties de façon identique, à l’exception du tabagisme (il y avait davantage de non-fumeurs dans le groupe chimiothérapie) et des métastases cérébrales (il y en avait davantage dans le groupe pembrolizumab).

En mai 2016, la durée médiane de suivi était de 11,2 mois et 48,1% des patients du groupe pembrolizumab continuaient à recevoir leur traitement  alors que seulement 10% des patients du groupe chimiothérapie continuaient ce traitement. Dans le groupe chimiothérapie 66 % des patients ont eu un crossover vers le pembrolizumab lors de leur progression.

Les résultats ont été très clairement en faveur du pembrolizumab comme le montre le tableau ci dessous :

 

Pembrolizumab

95% CI

Chimiothérapie

95% CI

p

PFS médiane (mois)

10,3

6,7-NA

6

4,2-6,2

 

PFS  (HR)

0,50

0,37-0,68

 

 

<0,001

PFS à 6 mois (%)

62,1

53,8-69,4

50,3

41,9-58 ,2

 

Survie globale médiane

NA

 

NA

 

 

Survie à 6 mois (%)

80,2

72,9-85,7

72,4

64,5-78,9

 

Risque de décès   (HR)

0,60

0,41-0,89

 

 

0,005

Réponses (%)

44,8

36,8-53

27,8

20,8-35,7

 

Les effets adverses sont très détaillés dans l’article. Ceux de tous grades reliés au traitement étaient significativement moins fréquents dans le bras pembrolizumab que dans le bras chimiothérapie (73,4 vs 90%) de même que ceux de grades  3, 4 ou 5 (26,6 vs 53,3%).  A noter qu’il y avait 29,2 % d’effets immuns de tout grade et 9,7 % de grades 3 ou 4 : toxicités cutanées sévères (3,9%), pneumopathies (2,6%) et colites (1,3%).

Le dimanche 9 octobre 2016 marquera incontestablement un tournant dans l’évolution du traitement du cancer du poumon car pour la première fois la place de l’immunothérapie en première ligne vient d’être démontrée avec un niveau de preuve élevé dans une étude de phase III  dont la méthodologie n’est pas discutable.

Cette démonstration a porté sur une population particulière de patients atteints de cancers métastatiques : ceux dont les cellules tumorales expriment PDL1 à 50% ou plus, qui avaient un PS à 0 ou 1, pas de métastase cérébrale non prétraitée et qui n’avaient pas de mutation activatrice de l’EGFR  ni de translocation ALK-EML4.

Qui aurait pu prévoir il y a 5 ans ces résultats qui vous rapidement bouleverser le traitement d’environ un quart des patients atteints de cancer broncho-pulmonaire ? Les progrès s’accélèrent en oncologie thoracique, d’autant qu’après ces résultats d’autres sont à prévoir avec d’autres immunothérapies isolément ou en association, d’autres stratégies, pour d’autres malades avec d’autres seuils ou d’autres caractéristiques cliniques.

La recherche clinique internationale, dans laquelle l’IFCT  joue un rôle de plus en plus important, est en grande partie à l’origine de ces progrès. Elle  doit plus que jamais être la priorité de tous.    

Reference

Pembrolizumab versus Chemotherapy for PD-L1–Positive Non–Small-Cell Lung Cancer ;

Reck M., Rodríguez-Abreu D., Robinson A.G., et al

New Eng J Med (in press)

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