Clinical Lung Cancer

Quelle est l’activité du Durvalumab en consolidation chez les patients atteints de CBNPC de stade III KRAS mutés traités par radiochimiothérapie ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
novembre 2022

Immunothérapie, Traitement des stades III, KRAS

L’utilisation du durvalumab en consolidation après radio-chimiothérapie pour les stades localement avancés inopérables de CBNPC est devenu un standard. Elle permet d’améliorer significativement la survie sans récidive et la survie globale par rapport au placebo. Néanmoins, près de 25% des patients sous durvalumab présentent une rechute dans les 18 mois. L’identification de paramètres cliniques ou biologiques permettant d’identifier ces patients « à risque » de progression serait intéressante afin de proposer une éventuelle surveillance adaptée (selon également les modalités de rechutes, locales ou à distance). La publication rapportée ici s’intéresse au rôle potentiel des mutations de KRAS dans le devenir de ces patients. Ces mutations, avant l’heure du durvalumab, avaient été retrouvées comme facteur de mauvais pronostic pour les stades III inopérables traités par RT-CT. 

Il s’agit ici d’une étude rétrospective réalisée sur les patients traités entre 2015 et 2020 à l’hôpital universitaire Johns Hopkins à Baltimore (USA). La PFS était évaluée à compter de l’initiation du durvalumab, jusqu’au jour de la progression ou du décès quelle qu’en soit la cause. La survie globale était calculée depuis la date d’initiation du durvalumab jusqu’au décès quelle qu’en soit la cause. Les auteurs distinguaient par ailleurs les progressions thoraciques (tumeur primitive, ganglions ou plèvre) des progressions extra thoraciques (tout autre organe). Au total ce sont 134 patients avec un CBNPC localement avancé qui ont été traités dans l’institution par radiochimiothérapie concomitante, 76 ont ensuite reçu du durvalumab en consolidation, et 74 étaient évaluables. L’âge moyen était de 66.5 ans (59-75), 56.8% étaient des hommes, et 55.4% des patients avaient un adénocarcinome (84.6% de ceux-ci ont eu une analyse moléculaire permettant de retrouver une mutation de KRAS chez 18 patients, aucune mutation actionnable chez 14 patients et 7 patients avaient une mutation actionnable regroupant notamment BRAF, EGFR, ALK….). Le statut PDL1 était connu pour 45 des 74 patients (60.8%) avec 25.7% de PDL1>50%, 13.5% PDL1 1-50% et 21.6% PDL1<1%. 

Le temps médian entre la fin de la RTCT et l’instauration du durvalumab a été de 28.5 jours (20-40), avec un temps médian sous traitement de 6.6 mois (2.5-11.7) dont 29 patients qui ont complété l’année entière sous durvalumab (39.2%). Le suivi médian pour l’ensemble des patients était de 23 mois (15 .4-28). On retrouve une médiane de PFS de 16.1 mois et d’OS de 32.4 mois pour l’ensemble de la cohorte. 

Les médianes de PFS étaient de 11.9 mois et 25.2 mois pour les patients avec adénocarcinomes et carcinomes épidermoïdes respectivement, et les médianes d’OS étaient pour chacun de ces types histologique de 31.5 mois versus 50.8 mois sans que les différences ne soient significatives (pour la PFS :P= 0.16 et pour l’ OS P= 0.96).

La médiane de PFS des patients ayant une anomalie moléculaire actionnable était de 8 mois versus 12.5 pour ceux n’en ayant pas (différence non significative). Les médianes d’OS sont similaires (respectivement 31.5 mois versus 31.7 mois) probablement du fait de la possibilité d’utiliser des thérapies ciblées à la progression qui rattrapent la moins bonne PFS sous immunothérapie en consolidation.

Concernant les patients KRAS mutés (n = 18) qui font l’objet de cette publication, on retrouve une médiane de PFS de 12.6 mois versus 12.7 mois pour les patients sans anomalie actionnable (n = 14). Les médianes d’OS sont de 32.4 mois et 32.0 mois respectivement. Il n’existe pas de différence statistiquement significative (pour la PFS P= 0.77 et pour l’OS P= 0.67). Il n’y a pas de différence non plus dans le groupe des KRAS mutés entre les G12C et les « non G12C » mais numériquement on note de moins bonnes PFS et OS chez les G12C (respectivement 9.7 mois versus 12.6 mois pour la PFS et 20.0 mois versus 32.4  mois pour l’OS). 

Concernant les modalités de progression, 50% (n=37) des patients ont progressé sous durvalumab, 17 en thoracique exclusivement, 8 en extrathoracique exclusivement, et 12 selon les deux modalités. Concernant les 18 patients avec mutation de KRAS, 10 ont progressé (44%) dont 2 seulement l’ont fait en intrathoracique exclusivement. 

Il s’agit d’une étude intéressante dans la mesure où elle concerne une population (patients mutés KRAS) qui n’était pas décrite dans PACIFIC. Néanmoins, elle rapporte des résultats différents de ceux de la série du MD Anderson qui avaient été présentés à l’ASCO 2021 (J Clin Oncol. 2021;39(15, suppl):8528) et qui montraient un moins bon devenir des patients KRAS mutés sous durvalumab par rapport aux patients sans anomalie moléculaire (p<0.001). Il s’agit bien sûr d’études rétrospectives avec de petits effectifs rendant hasardeuses d’éventuelles conclusions. Il est possible que des co-mutations impactent le résultat de l’immunothérapie. Quoi qu’il en soit, comme on a coutume de conclure, de plus grandes études seraient nécessaires pour obtenir des résultats solides. 

 

 

 

Reference

Definitive Chemoradiation and Durvalumab Consolidation for Locally Advanced, Unresectable KRAS-mutated Non-Small Cell Lung Cancer 

Guo MZ, Murray JC, Ghanem P, Voong KR, Hales RK, Ettinger D, Lam VK, Hann CL, Forde PM, Brahmer JR, Levy BP, Feliciano JL, Marrone KA. 

Clin Lung Cancer 2022; 23 : 620-629

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