Journal of Clinical Oncology

Traitement Néoadjuvant par Erlotinib ou Chimiothérapie pour les patients atteints de CBNPC IIIA-N2 mutés EGFR : une étude de phase II.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2019

Traitement péri-opératoire, EGFR, Chirurgie

Si le bénéfice de survie des cancers bronchiques non à petites cellules opérables qui est attribué à la chimiothérapie néoadjuvante est bien démontré par une importante méta-analyse sur données individuelles (cliquer ici), le bénéfice des thérapeutiques ciblées pour les traitements néoadjuvants  n’a pratiquement pas été exploré alors que ces traitements ont été beaucoup plus étudiés en adjuvant. C’est notamment le cas de l’essai de phase III chinois ADJUVANT/CTONG1104 (cliquer ici) qui a été mené chez des patients opérés d’un cancer bronchique non à petites cellules de stade pII ou pIIIA, totalement réséqués et qui présentaient une mutation activatrice de l'EGFR.  Ils étaient randomisés entre soit gefitinib pendant 2 ans, soit 4 cycles de chimiothérapie. Dans cet essai la survie sans maladie des patients était significativement supérieure sous gefitinib (28,7 vs 19,3 mois, HR = 0,70 (0,49-0,99), p=0,044) et dans une analyse de sous-groupes, ce bénéfice n’était significatif que pour les pN2.

Ce nouvel essai mené par le Chinese Thoracic Oncology Group, l’essai CTONG 1103 est un essai randomisé de phase II multicentrique qui compare, chez des patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules de stade IIIA-N2 et mutés EGFR (19 ou 21), l’erlotinib en néoadjuvant à une chimiothérapie préopératoire par cisplatine et gemcitabine. Ainsi les patients étaient randomisés sur un mode 1/1 entre :

  • Soit 42 jours d’erlotinib à 150 mg/j suivi de ce même traitement en adjuvant pendant 1 an,
  • Soit 2 cycles de chimiothérapie par cisplatine (75 mg/m2 à J1) et gemcitabine (1250 mg/m2 à J1 et J8) avant l’intervention et après celle-ci si la résection était complète. 

L'objectif principal était le taux de réponse. Les objectifs secondaires étaient les taux de « downstaging » des ganglions (N2 devenant  N1 ou N0), le taux de résections complètes (R0), le taux de réponse complète (pRC), la survie sans progression et la survie globale. 

Les patients devaient avoir un PS à 0 ou 1, ne pas avoir d’antécédent néoplasique dans les 5 dernières années et n’avoir reçu ni radiothérapie ni traitement systémique pour leur cancer. 

Il a fallu 6 ans pour que soient recrutés et randomisés  par 17 centres chinois 72 patients. Il y avait une majorité de femmes (74 %) et de non-fumeurs (83 %). La plupart avaient un adénocarcinome. Cinquante-trois % d’entre eux avaient une mutation de l’exon 19 et 47 de l’exon 21. Il semble que toutes les atteintes ganglionnaires n’étaient pas prouvées initialement puisque la médiastinoscopie n’a été réalisée que dans 32 et 26% des cas et l’EBUS dans 32 et 46% des cas. Les autres cas étaient donc diagnostiqués semble-t-il seulement par TEP-FDG. 

Résultats 

L'objectif principal n’a pas été atteint puisque le taux de réponse sous erlotinib était de 54,1% vs 34,3% sous chimiothérapie. Cette différence n’était pas significative. 

Sur 37 malades du bras erlotinib, 

  • Tous ont  reçu l’erlotinib,
  • 31 ont été opérés,
  • Et 6 ne l’ont pas été (1 progression, 1 EFR  incompatible et 4 refus).

Et sur 35 malades du bras chimiothérapie, 

  • 34 ont reçu ce traitement et 1 l’a refusé :
  • 24 seulement ont été opérés 
  • Et 10 n’ont pas été opérés (4 progressions, 5 refus et 1 devenu à haut risque pour la chirurgie). 

Le taux de résection complète (R0) était de 73% et le taux de « downstaging » des ganglions était de 10,8% dans le bras erlotinib et de 63% et 2,9% dans le bras chimiothérapie. Aucune réponse complète (pCR) n’a été observée. 3 réponses pathologiques majeures (moins de 10% de cellules tumorales) ont été observées dans le bras erlotinib. 

La survie sans progression médiane était significativement plus longue sous erlotinib (21,5 vs 11,4 mois, HR = 0,39; 95% CI : 0,23 - 0,67; p<001). La survie médiane ne différait pas entre les 2 groupes (45,8 vs 39,2 mois). 

Aucune toxicité de grade 5 et aucun décès post-opératoire n’ont été observés et les événements secondaires rapportés au traitement ont été comme attendu différents dans les deux groupes avec moins de toxicité de grade 3 et 4 dans le groupe erlotinib (0 vs 29,4%).  

Cette étude montre que le taux de réponse obtenu par un traitement néoadjuvant par erlotinib dans des cancers bronchiques non à petites cellules de stade IIIA-N2 mutés EGFR  sont supérieurs à ceux obtenus par une chimiothérapie mais cette différence n’est pas significative. La survie sans progression est significativement augmentée.  Elle montre aussi qu’un seul malade du bras erlotinib n’a pas été opéré du fait d’une progression tumorale ce qui est un point important. Ces résultats ont été obtenus sur de petits effectifs et sur des malades vraisemblablement sélectionnés puisque 17 centres n’ont inclus que 72 patients en 6 ans ce qui représente moins de 1 patient par an. Ce message plutôt positif doit donc être retenu avec prudence. 

 

  

 

 

 

 

Reference

Erlotinib Versus Gemcitabine Plus Cisplatin as Neoadjuvant Treatment of Stage IIIA-N2 EGFR-Mutant Non-Small-Cell Lung Cancer (EMERGING-CTONG 1103): A Randomized Phase II Study.

Zhong WZ, Chen KN, Chen C, Gu CD, Wang J, Yang XN, Mao WM, Wang Q, Qiao GB, Cheng Y, Xu L, Wang CL, Chen MW, Kang X, Yan W, Yan HH, Liao RQ, Yang JJ, Zhang XC, Zhou Q, Wu YL.

J Clin Oncol2019; 37 : 2235-2245

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