Journal of Clinical Oncology

Associer chez les mutés EGFR du pemetrexed au gefitinib : une importante étude de phase II randomisée.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2016

Thérapeutique ciblée, Traitement des stades IV, EGFR

Plusieurs essais cliniques qui ont été réalisés il y a près d’une dizaine d’années comparaient le gefitinib ou l’erlotinib à l’association de ce même inhibiteur de la tyrosine kinase à une chimiothérapie  et ces essais ont été négatifs. Néanmoins ces essais ne comportaient pas que des patients qui présentaient une mutation activatrice de l’EGFR et les chimiothérapies comportaient un sel de platine. Par ailleurs, plusieurs études ont suggéré l’existence d’une synergie entre pemetrexed et inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR. Il est donc logique de comparer chez des mutés le gefitinib seul à ce même traitement associé à du pemetrexed.

C’est le but que se sont donné les auteurs de cette étude de phase II randomisée, industrielle et multicentrique qui a été conduite en Chine, au Japon, en Corée du Sud et à Taiwan.

Les patients qui devaient avoir un cancer bronchique non à petites cellules non épidermoïdes de stade IV avec une mutation activatrice de l’EGFR étaient randomisés sur un mode 2/1 pour recevoir :

  • soit du gefitinib exclusivement à 250 mg/j
  • soit ce même traitement  associé à du pemetrexed à 500 mg/m2 tous les 21 jours.

L’objectif principal était la survie sans progression, le nombre de sujets nécessaires étant calculé sur la probabilité d’objectiver avec l’association une augmentation d’au moins 26% de la survie sans progression.    

Au total, 195 patients ont été randomisés, 129 dans le bras expérimental et 66 dans le bras gefitinib seul. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient réparties de façon identique. Plus de la moitié des patients étaient de sexe féminin, l’âge moyen était de 62 ans, 67% étaient non-fumeurs, le PS était à 0 dans 31% des cas et 1 dans 69%,  et 55% avaient une délétion de l’exon 19.

Les résultats en terme d’efficacité sont résumés sur le tableau ci-dessous :

 

Pemetrexed et gefitinib

Pemetrexed

p

PFS  médiane (mois)

15,8

10,9

0,028

PFS  (HR)

0,68 (0,48-0,96)

0,029

Réponse (%)

80

74

 

Contrôle de la maladie (%)

93

94

 

Durée médiane de réponse (mois)

15,4

11,3

 

Durée médiane de réponse (HR)

0,74 0,5-1,08)

0,12

La survie sans progression  était significativement augmentée  et ceci aussi bien qu’il s’agisse d’une délétion de l ‘exon 19 ou d’une mutations L858R de l’exon 21. Lorsqu’on regarde les courbes de PFS, on costate qu’elles sont superposées pendant les 7-8 premiers mois puis qu’elles s ‘écartent franchement ensuite.

Les données de survie étaient immatures au moment de l’écriture de l’article.

La plupart des effets secondaires étaient de grade 1 ou 2 : diarrhée, augmentation des transaminases et acné dans le bras expérimental, diarrhée, acné et peau sèche dans le bras standard. Il y avait significativement plus d’effets secondaires de grade 3-5 dans le bras expérimental  (à signaler particulièrement 5% de granulopénies dans le bras expérimental et 1 cas de pneumopathie interstitielle diffuse dans les 2 bras).  Cinq décès sont survenus au cours du traitement dont 2, dans le bras expérimental ont été considérés comme liés au traitement.

Cette étude de phase II randomisée apporte un signal fort en faveur de l’activité supérieure d’une association de pemetrexed et de gefitinib chez les patients mutés.  La toxicité de ce traitement reste tolérable.

Ces intéressants résultats sont-ils susceptibles de modifier nos pratiques en proposant aux patients mutés une autre stratégie ? Modifier nos pratiques sur les données de ce seul essai nous semblerait prématuré. En effet, il s’agit d’une étude de phase II, ce qui est d’ailleurs regrettable car une étude de phase III aurait sans doute pu être réalisée avec un nombre de malades supplémentaires qui n’aurait pas été considérable.  De plus, on ne dispose pas de renseignements sur la façon dont la mesure de la survie sans progression  a été contrôlée. Il ne semble pas notamment  y avoir eu de relecture par un comité indépendant auquel les données de randomisation auraient été masquées. Restons donc, pour l’instant,  attentifs aux résultats complémentaires ce cette étude sur les mécanismes de résistance et les données de survie et à ceux d’autres études à venir.

 

 

 

Reference

Randomized Phase II Trial of Gefitinib With and Without Pemetrexed as First-Line Therapy in Patients With Advanced Nonsquamous Non-Small-Cell Lung Cancer With Activating Epidermal Growth Factor Receptor Mutations.

Cheng Y, Murakami H, Yang PC, He J, Nakagawa K, Kang JH, Kim JH, Wang X, Enatsu S, Puri T, Orlando M, Yang JC.

J Clin Oncol 2016; 34 : 3258-66

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer