Lancet Respiratory Medicine

BELIEF : Erlotinib et Bevacizumab chez les patients EGFR mutés en première ligne, une étude européenne

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2017

Thérapeutique ciblée, EGFR

Si la présence d’une mutation T790M avant tout traitement est possible, les études que nous avons commenté sur ce site nous ont souvent incité à penser qu’il s’agit d’un phénomène rare : par exemple 2% des patients qui avaient une mutation EGFR dans une étude new-yorkaise publiée en 2014 (cliquer ici)  mais certaines études faisaient état d’un taux bien plus élevé par exemple à 25% dans une étude coréenne (cliquer ici). Quoiqu’il en soit, la présence avant traitement de telles mutations de résistance chez les malades qui ont une mutation activatrice de l'EGFR assombrit incontestablement le pronostic.

Les auteurs de ce travail considèrent que la fréquence de ces mutations de résistance avant tout traitement dépend de la méthode de détection et qu’elle pourrait survenir dans un nombre beaucoup plus élevé de cas (de 35 à 60% des patients qui ont une mutation EGFR). 

Ils s’appuient sur des études précliniques qui suggèrent que l’activité des inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR qui est réduite chez les patients qui ont d’emblée une mutation activatrice de l'EGFR et une mutation de résistance s’améliorerait si du bevacizumab est d’emblée associé à l’inhibiteur de la tyrosine kinase.

Pour explorer ce concept, ces investigateurs du Spanish Lung cancer Group et de l’ETOP (European Thoracic Oncology Platform)  ont  conçu cette étude internationale européenne multicentrique (29 centres) comportant deux études de phase II dont l’ objectif principal était la survie sans progression. La première était réservée aux 37 patients qui n’avaient pas de mutation T790M après une détection centralisée par une méthode très sensible à Barcelone, et la deuxième aux 72 autres.

Les patients recevaient tous de l’erlotinib à 150 mg/jour et du bevacizumab à 15 mg/kg à J1-J22.

L’objectif principal était la survie sans progression. Les objectifs secondaires étaient la survie globale, le taux de réponse et la toxicité. Le nombre de patients nécessaire a été estimé par rapport à des données issues de séries historiques.

Au total 109 patients éligibles ont été inclus. Parmi ceux-ci il y avait un contingent de patients présentant une mutation T790M très élevé.  Les résultats ont été les suivants :

 

T790M positifs

T790M négatifs

Ensembles des patients

N

37

72

109

RP/RC (%)

3/24 (8/65)

3/54 (4/75)

6/78 (6/72)

Stabilité (%)

8 (22)

9 (13)

17 (16)

PFS médiane (mois)

16

10,5

13,2

PFS médiane à 12 mois (%)

68

48

55

Médiane de survie (mois)

 

 

28,2

Survie médiane à 12 mois (%)

 

 

84

Cette étude européenne semble donc montrer donc que l’association d’erlotinib et de bevacizumab est susceptible d’obtenir des chiffres de réponse, de survie sans progression et de survie élevés supérieurs aux chiffres obtenus avec l’erlotinib seul, et ce surtout chez les patients qui ont avant tout traitement une mutation T790M. Toutefois deux réserves s’imposent :

  • On pourrait considérer que ces données sont suffisantes pour pouvoir affirmer dans une population caucasienne que l’association d’erlotinib et de bevacizumab est supérieure au seul erlotinib. C’est vraisemblable mais remarquons quand même que cette comparaison avec des données historiques n’a pas le niveau de preuve obtenu dans l’essai randomisée multicentrique de phase II japonaise comparant chez les mutés erlotinib et bevacizumab à erlotinib seul (cliquer ici). L’étude italienne de phase III BEVERLY va sans doute répondre bientôt à cette question (cliquer ici).
  • Cette étude ne peut pas non plus affirmer que les patients qui avaient avant tout traitement une mutation T790M - et qui sont extrêmement nombreux dans cette étude – bénéficient davantage de l’association que ceux qui n’ont pas cette mutation puisque la comparaison de ces deux cohortes n’était pas prévue lors de la conception de cet essai.

 

Reference

Erlotinib and bevacizumab in patients with advanced non-small-cell lung cancer and activatingEGFR mutations (BELIEF): an international, multicentre, single-arm, phase 2 trial.

Rosell R, Dafni U, Felip E, Curioni-Fontecedro A, Gautschi O, Peters S, Massutí B, Palmero R, Aix SP, Carcereny E, Früh M, Pless M, Popat S, Kotsakis A, Cuffe S, Bidoli P, Favaretto A, Froesch P, Reguart N, Puente J, Coate L, Barlesi F, Rauch D, Thomas M, Camps C, Gómez-Codina J, Majem M, Porta R, Shah R, Hanrahan E, Kammler R, Ruepp B, Rabaglio M, Kassapian M, Karachaliou N, Tam R, Shames DS, Molina-Vila MA, Stahel RA; BELIEF collaborative group..

Lancet Respir Med 2017 ; 5 : 435-444

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