Journal of Thoracic Oncology

En première ligne, un traitement par inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR ne doit pas être prescrit sur les seuls facteurs cliniques (suite).

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
janvier 2016

Thérapeutique ciblée, EGFR

Nous avons commenté sur ce site il y a plus d’un an les premiers résultats de cette étude prospective de phase III à promotion industrielle (cliquer ici).  Cette étude avait été menée pour comparer dans une population de patients est-asiatiques, non fumeurs et présentant un cancer bronchique non à petites cellules non épidermoïde étendu deux traitements :

  • soit une bithérapie par pemetrexed et cisplatine (jusqu’à au maximum 6 cycles suivie de gefitinib en maintenance chez les patients en réponse ou stabilisation,
  • soit du gefitinib en monothérapie.

L’objectif principal était la survie sans progression. Elle était à 8,38 mois dans le bras pemetrexed-cisplatine, et à 9,53 mois dans le bras gefitinib. Cette différence n’était pas significative, mais chez les patients non mutés, la différence entre les 2 bras était significativement en faveur du traitement commençant par la chimiothérapie (9,9 vs 1,35 mois).  

Les données de survie n’étaient pas matures lors de la rédaction de cet article. Les voici maintenant disponibles avec une durée médiane de suivi de 43,5 mois. Le tableau ci-dessous résume les durées de survie. On verra que les données concernant le statut mutationnel restent très incomplètes puisqu’il n’est connu que chez 76 des 236 patients : 52 sont mutés et 24 sauvages.

 

 

Médiane de survie (mois)

 

 

 

n

PC/G

G

HR (95% CI)

p

Total

236

26,9

27,9

0,94 (0,68-1,31)

0,71

EGFR sauvages

24

28,4

8,9

0,62 (0,22-1,72)

0,35

EGFR mutés

52

32,4

45,7

1,57 (0,72-3,39)

0,25

De façon attendue, significativement plus de patients du bras gefitinib ont reçu en deuxième ligne une chimiothérapie (61,9% vs 34,7%) et notamment un doublet à base de platine (47,5% vs 12,7%). De même, significativement  plus de patients ont reçu un inhibiteur de la tyrosine kinase de l’EGFR  en deuxième ligne lorsqu’ils avaient reçu initialement une chimiothérapie 22,9 % vs 7,6%). À noter enfin que chez les patients du groupe gefitinib, la survie était plus longue lorsqu’ils ont reçu un doublet à base de platine comprenant du pemetrexed (34,9 versus 26,9 mois).

La conclusion des auteurs est que, dans cette population sélectionnée pour une probabilité élevée de répondre au gefitinib sur des critères cliniques, la survie globale ne différait pas significativement qu’ils reçoivent l’un ou l’autre des traitements. Ils précisent aussi que chez les patients EGFR sauvage la survie est augmentée lorsqu’ils ont reçu en premier une chimiothérapie de même qu’elle l’est chez les mutés lorsqu’ils ont reçu en premier du gefitinib.

Finalement cette étude n’apporte pas de données nouvelles  par rapport aux résultats de l ‘étude IPass publiés en 2009 (accèder gratuitement au texte complet en cliquant ici)  qui a montré pour la première fois que le choix du traitement de première ligne ne doit  pas être guidé par une simple présomption clinique  mais par le statut mutationnel qu’il est obligatoire de réaliser. Dans cette étude, la démonstration était faite sur la survie sans progression et non sur la survie qui n’était pas significativement différente.

Il est dommage que le statut mutationnel ne soit connu dans l’étude que nous commentons aujourd’hui que chez le tiers des malades. On peut en effet imaginer qu’avec plus de puissance cette différence de survie considérable chez les sauvages (28 vs 9 mois) qui n’est pas significative chez 24 malades le serait devenue chez 3 fois plus. Cette étude aurait été alors la première qui aurait démontré que donner un traitement sur la seule  présomption clinique peut diminuer la survie des malades.

A la lecture de ces nouveaux résultats, la détermination initiale du statut EGFR par la recherche de mutations reste plus que jamais nécessaire.

 

 

Reference

First-Line Pemetrexed plus Cisplatin followed by Gefitinib Maintenance Therapy versus Gefitinib Monotherapy in East Asian Never-Smoker Patients with Locally Advanced or Metastatic Nonsquamous Non-Small Cell Lung Cancer: Final Overall Survival Results from a Randomized Phase 3 Study.

Yang JC, Srimuninnimit V, Ahn MJ, Lin CC, Kim SW, Tsai CM, Mok T, Orlando M, Puri T, Wang X, Park K.

J Thorac Oncol. 2015 Dec 24. [Epub ahead of print]

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