Lancet oncology

Ceritinib après crizotinib et chimiothérapie : ASCEND 5, une importante étude de phase III

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2017

Thérapeutique ciblée

Nous avons commenté ici diverses études menées avec le ceritinib chez les patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules avec translocation ALK-EML4 notamment  une étude de phase I (cliquer ici)  montrant une survie sans progression  de 10,4 mois chez des patients qui n’avaient pas reçu de crizotinib puis d’autres études confirmant l’activité importante et prolongée de cet anti-ALK  (cliquer ici)  peut-être même supérieure à celle du crizotinib (cliquer ici). Plus récemment,

l’étude de phase III  ASCEND 4, comparant en première ligne ceritinib et chimiothérapie,  démontrait un bénéfice important et significatif de survie sans progression  par céritinib chez l’ensemble des malades (cliquer ici). Une différence de survie en faveur du bras expérimental n’était pas significative dans cet essai du fait d’un crossover par un anti-ALK réalisé chez les ¾ des patients.

Voici maintenant publiés les résultats de l’étude de phase III randomisée  ASCEND-5 .

Méthodes

Il s’agit d’une étude à promotion industrielle qui a été menée dans 99 centres de 20 pays chez des patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules localement avancés ou métastatiques présentant un réarrangement ALK. Ces patients devaient être progressifs après 2 lignes de chimiothérapie et avoir reçu au minimum 21 jours de crizotinib.

Ils étaient randomisés entre :

  • Soit 750 mg par jour de ceritinib  par voie orale,
  • Soit une chimiothérapie par pemetrexed (500 mg/m2) ou docetaxel (75 mg/m2).

Une stratification sur le PS (0 vs 1-2) et la présence ou l’absence de métastases cérébrales était réalisée.

L'objectif principal était la survie sans progression à lecture indépendante. Les objectifs secondaires étaient notamment la survie globale, la réponse et la toxicité.   

Résultats

De 2013 à 2015, 231 patients ont été randomisés.  Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties. Le suivi médian dans chaque groupe a été supérieur à 16 mois.

Les résultats ont été les suivants :

 

Ceritinib (95% CI)

Chimiothérapie (95% CI)

p

PFS[1] (mois)

5,4 (4,1-6,9)

1,6 (1,4-2,8)

<0,0001

Taux de réponses (%)

39,1 (30,2-48,7)

6,9 (3-13,1)

 

Durée de réponse (mois)

6,9 (5,4-8,9)

8,3 (3,5-NE)

 

Taux de contrôle (%)

76,5 (67,7-83,9)

36,2v (27,5-45,6)

 

Durée de survie (mois)

18,1 (13,4-23,9)

20,1 (11,9-25,1)

0,50

L’étude est positive avec un HR de survie sans progression à 0,49 (0,36-0,67) très significatif (<0,0001) et un taux de réponse sous ceritinib très supérieur. Ce bénéfice s’observe pour toutes les catégories de patients définis par l’âge, le sexe, la présence ou non de métastases cérébrales, le PS et, fait important, la réponse antérieure au crizotinib. Le ceritinib reste supérieur à la chimiothérapie même chez les malades qui n’ont pas répondu au crizotinib.  

Des événements secondaires possiblement en lien avec le traitement ont été rapportés chez 110 (96%) patients du groupe ceritinib (diarrhées, nausées, vomissements) et 89 (79%) du groupe chimiothérapie. Parmi ceux-ci certains étaient de grade 3 tels les diarrhées (4%), les nausées et vomissements  (8%), l’élévation des transaminases ALT (19%) ou AST (13%) etc. Très peu de toxicités de grade 4, essentiellement biologiques,  ont été observées.

Ces événements ont conduit chez 80% des patients à ajuster ou interrompre le traitement.  Deux patients ont eu un décès lié à un événement adverse qui n’ont pas été rapportés au traitement par l’investigateur.

Cette étude démontre donc que le ceritinib est une meilleure option que la chimiothérapie par docetaxel ou pemetrexed chez les patients présentant un cancer bronchique non à petites cellules avec translocation ALK-EML4 et qui ont progressé après chimiothérapie et crizotinib. Prés de 40% des patients, y compris certains qui n’ont pas répondu au crizotinib, répondent à ce traitement. Ces résultats sont obtenus au prix d’une toxicité non négligeable conduisant dans un nombre de cas élevé à modifier le traitement. La place du ceritinib apparait donc chez les malades qui ont échoué après crizotinib, comme va se confirmer celle du brigantinib (cliquer ici).  

Il est néanmoins probable que  les résultats positifs de l’étude de phase III ALEX comparant alectinib et crizotinib en première ligne (cliquer ici) communiqués à l’ASCO et peut-être également ceux en attente de l’essai ALTA-1L comparant première ligne le brigatinib au crizotinib (cliquer ici) viennent, dans un proche avenir,  bouleverser la stratégie thérapeutique à utiliser chez ces patients.  

 

 

 

 

 

 

[1] Les chiffres indiqués sont ceux de la lecture centralisée. 

Reference

Ceritinib versus chemotherapy in patients with ALK-rearranged non-small-cell lung cancer previously given chemotherapy and crizotinib (ASCEND-5): a randomised, controlled, open-label, phase 3 trial.

Shaw AT, Kim TM, Crinò L, Gridelli C, Kiura K, Liu G, Novello S, Bearz A, Gautschi O, Mok T, Nishio M, Scagliotti G, Spigel DR, Deudon S, Zheng C, Pantano S, Urban P, Massacesi C, Viraswami-Appanna K, Felip E.

Lancet Oncol. 2017 Jun 8.. [Epub ahead of print]

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