Lancet

Céritinib ou Chimiothérapie en première ligne ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
février 2017

Thérapeutique ciblée, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs

Il y a plus de 2 ans que nous commentions sur ce site les résultats de l ‘étude randomisée de phase III PROFILE 14, qui comparait en première ligne, chez ces patients qui présentaient un cancer bronchique non à petites cellules non épidermoïde de stade avancé ou métastatique avec une translocation ALK-EML4, un traitement par crizotinib à une chimiothérapie de référence par cisplatine ou carboplatine  et pemetrexed (cliquer ici). La survie sans progression  médiane était de 10,9 mois dans le bras expérimental vs 7 mois dans le bras standard et le HR de progression ou décès sous crizotinib était à 0,45 (95% CI, 0,35 à 0,60; P<0,001). La survie globale n’était pas en revanche significativement améliorée car 70% des patients du bras chimiothérapie avaient bénéficié d’un crossover par crizotinib. Avant cette étude, l’AMM du crizotinib n’avait été obtenu qu’à partir  de la deuxième ligne et après cette étude l’autorisation pour la première ligne a été très vite obtenue.

Nous avons commenté aussi sur ce site des résultats particulièrement intéressants obtenus avec un autre anti-ALK, le céritinib qui dès la phase I (cliquer ici) permettait d’obtenir une survie sans progression  de 10,4 mois chez des patients qui n’avaient pas reçu de crizotinib. Plus tard d’autres études confirmaient que cet anti-ALK avaitune activité importante et prolongée  (cliquer ici) peut-être supérieure à celle du crizotinib (cliquer ici) .

Voici maintenant les résultats de l’étude de phase III  ASCEND 4 qui comparait en première ligne, chez ces patients qui présentaient un cancer bronchique non à petites cellules non épidermoïde de stade avancé ou métastatique, et dont la tumeur présentait une translocation ALK-EML4, un traitement par 750 mg/jour de céritinib à une chimiothérapie de référence par cisplatine ou carboplatine  et pemetrexed avec un schéma identique à celui de l’étude PROFILE 14, et une poursuite du traitement par pemetrexed en maintenance.

Cette étude randomisée de phase III  à promotion industrielle, a été conduite dans 134 centres répartis  dans le monde entier. L’objectif principal était la survie sans progression  et l’objectif secondaire principal la survie globale. Le crossover par céritinib était autorisé chez les patients qui progressaient sous chimiothérapie.

De août 2013 à mai 2015, 376 patients ont été randomisés et les caractéristiques des patients des deux groupes étaient réparties de façon identique.

Le tiers des patients de chaque groupe avaient des métastase cérébrales. Les ¾ des patients du bras chimiothérapie ont reçu une maintenance par pemetrexed et près des ¾ de ceux qui ont interrompu leur chimiothérapie ont reçu un anti-ALK.

Les résultats sont indiqués sur le tableau ci dessous :

 

Résultats (mois)

Céritinib

Chimiothérapie

HR (95% CI)

p

Ensemble des malades

PFS par un comité indépendant

16,6

8,1

0,55 (0,42–0,73)

<0,00001

PFS par les investigateurs

16,8

7,2

0,49 (0,37-0,64)

<0,00001

Métastases cérébrales initiales

PFS par un comité indépendant

10,7

6,7

0,70 (0,44-1,12)

 

Pas de métastases cérébrales initiales

26,3

8,8

0,48 (0,33-0,69)

 

Ensemble des malades

Survie globale

NA

26,2

0,73 (0,50-1,08)

0,056

  Ces résultats montrent que l’étude a atteint son objectif en démontrant un bénéfice important et significatif de survie sans progression  par céritinib chez l’ensemble des malades. La différence de survie en faveur de ce même bras expérimental n’était pas significative du fait qu’un crossover par un anti-ALK a été réalisé chez les ¾ des patients.

Les réponses sous céritinib étaient particulièrement prolongées avec une durée médiane proche de 2 ans.

Chez les patients qui avaient des métastases cérébrales mesurables lors du bilan initial et qui ont eu au moins un examen de surveillance, 16/22 (73%) réponses ont été observées dans le groupe céritinib vs 6/22 dans le groupe chimiothérapie. La durée médiane de ces réponses était de 16,6 mois.

La plupart des effets adverses observés dans les deux traitements étaient de grade un et deux. Ceux qui avait une plus haute incidence dans le groupe expérimental étaient la diarrhée (85% dont 5% de grade 3-4), les nausées (69% dont 3% de grade 3-4), les vomissements (66% dont 5% de grade 3-4) et les élévations d’ALAT (60% dont 31% de grade 3-4),  et d’ASAT (53% dont 17% de grade 3-4). Ces anomalies ont conduit à des ajustements ou des interruptions de doses dans 80 % des cas.

Des pneumopathies interstitielles ont été rapportées chez quatre patients  du groupe expérimental et chez deux du groupe standard. Aucun décès n’a été imputé aux traitements de l’étude.

Avec une bonne adhésion aux questionnaires de qualité de vie rempli chez au moins 80% des malades, le céritinib prolongeait significativement le temps jusqu’à détérioration et améliorait significativement les symptômes.

Cette étude va faire du céritinib une nouvelle option thérapeutique des patients qui ont une translocation ALK-EML4.

On savait déjà que l’administration d’anti-ALK de nouvelle génération, céritinib et alectinib, prolonge la survie des malades qui ont une translocation ALK-EML4 (cliquer ici) ce qui doit conduire dès maintenant à prescrire ces traitements lors de la progression sous crizotinib dès qu’ils sont accessibles.

On ne sait pas actuellement s’il faut prescrire ces traitements (et les autres en cours de développement, brigatinib et lorlatinib) après progression sous crizotinib ou d’emblée ? Cette étude montre que le céritinib en première ligne fait mieux que la chimiothérapie mais ne démontre pas qu’il fait mieux que la séquence crizotinib puis céritinib.

Deux études de phase III  répondront à cette question avec deux autres anti-ALK de nouvelle génération comparés au crizotinib :

  • l’essai  randomisé de phase III ALEX qui compare alectinib et crizotinib (cliquer ici).  
  • Et l’essai  randomisé de phase III ALTA-1L comparant en première ligne brigatinib et crizotinib (cliquer ici).

   

 

  

Reference

First-line céritinib versus platinum-based chemotherapy in advanced ALK-rearranged non-small-cell lung cancer (ASCEND-4): a randomised, open-label, phase 3 study.

Soria JC, Tan DS, Chiari R, Wu YL, Paz-Ares L, Wolf J, Geater SL, Orlov S, Cortinovis D, Yu CJ, Hochmair M, Cortot AB, Tsai CM, Moro-Sibilot D, Campelo RG, McCulloch T, Sen P, Dugan M, Pantano S, Branle F, Massacesi C, de Castro G Jr.

Lancet 2017 Jan 23. [Epub ahead of print]

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