Lancet oncology

Cetuximab et chimiothérapie : une nouvelle étude de phase III

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
décembre 2017

Thérapeutique ciblée, Traitement des stades IV

On se souvient que l’addition de cetuximab, un anticorps monoclonal ciblant l’EGFR,  à une chimiothérapie par cisplatine et vinorelbine chez des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules exprimant l’EGFR en immunohistochimie avait entrainé un bénéfice de survie significatif mais modeste. Celle-ci passait de 10,1 à 11.3 mois (HR =  0,871 [95% CI 0,762-0,996]; p=0,044). Dans cet essai, le bénéfice était plus important dans les cancers épidermoïdes avec un HR à 0,80. Ces résultats n’avaient pas été suffisants pour faire de cette association un standard de traitement des cancers bronchiques non à petites cellules, ni même des cancers épidermoïdes. Secondairement ont été menées deux études de phase II du SWOG, notamment l’étude S0536 destinée à évaluer l’addition à un doublet de chimiothérapie par carboplatine et paclitaxel d’un « doublet biologique » associant bevacizumab et cetuximab que nous avions commentée sur ce site il y a 4 ans (cliquer ici). Dans cette étude, les taux de réponse et de contrôle de la maladie étaient supérieurs chez les patients EGFR+ en Fish.

Les résultats de cette étude avaient conduit le SWOG a proposer une étude de phase III, l’étude S0819, comparant la survie de patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IV traités par carboplatine, paclitaxel, et bevacizumab (si possible) avec ou sans cetuximab.

Cette étude randomisée de phase III a été menée dans 277 sites aux USA et à Mexico.

Elle s’adressait à des patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules métastatiques. Au total 657 patients ont été inclus dans le bras cetuximab et 656 dans le bras standard. Une évaluation du statut EGFR a été possible chez 41% des patients (par technique FISH). Les patients recevaient du bevacizumab (environ 260 patients dans chaque bras) s’ils ne présentaient pas de contre-indications (histologie épidermoïde prédominante, hémoptysies, etc..). Les deux objectifs principaux de l’étude étaient la PFS (évaluée par l’investigateur) chez les patients EGFR+ et l’OS sur l’ensemble de la population.

L’étude n’a atteint aucun de ces deux objectifs, la PFS des EGFR+ est de 5.4 mois en médiane avec le cetuximab contre 4.8 mois sans cetuximab (p=0.40). L’OS est de 10.9 en médiane pour l’ensemble des patients du bras cetuximab versus 9.2 mois pour les patients du bras contrôle (p=0.22). En analyse en sous groupe, on note chez les patients ayant un carcinome épidermoïde EGFR+ une tendance à une meilleure survie sans progression  sous cetuximab (HR 0,68, CI 95% O,46-1,01, p=0,055) et une survie globale  significativement meilleure (HR 0,58, CI 95% O,39-0,86, p=0,0071).

En terme de toxicité, on notera surtout 32 décès liés au traitement dans le bras cetuximab (6%) contre 13 dans le bras contrôle (2%). Les patients sous bevacizumab, quel que soit leur statut EGFR, ne présentaient pas de meilleure PFS, OS ou taux de réponse.

En dépit de la négativité de cette étude, les auteurs retiennent surtout le bénéfice potentiel chez les patients EGFR+ ayant un épidermoïde, reprenant pour valider l’importance de ce récepteur (même sauvage, mais souvent hyper exprimé) les résultats de l’erlotinib en deuxième ligne ou plus dans ce type histologique (sans statut EGFR connu). Par ailleurs un autre anticorps anti EGFR, le necitumumab a montré son intérêt en ajout à une chimiothérapie par CDDP/Gemcitabine chez les patients ayant un carcinome épidermoïde (étude SQUIRE). Il semble donc réel que l’EGFR ait un rôle dans les cancers épidermoïdes. Néanmoins, l’utilisation de la FISH comme biomarqueur dans cette étude ne semble pas concluante.

Même si les auteurs concluent en souhaitant de plus amples études spécifiquement dédiées au sous groupe identifié comme éventuel meilleur candidat, on ne peut s’empêcher de s’interroger, aux vues des médianes affichées, sur l’intérêt que présentent ces anticorps monoclonaux anti EGFR administrés en triplet comparées aux inhibiteurs de point de contrôle de l’immunité….

 

 

 

 

Reference

Cetuximab plus carboplatin and paclitaxel with or without bevacizumab versus carboplatin and paclitaxel with or without bevacizumab in advanced NSCLC (SWOG S0819): a randomised, phase3 study.

Herbst RS, Redman MW, Kim ES, Semrad TJ, Bazhenova L, Masters G, Oettel K, Guaglianone P, Reynolds C, Karnad A, Arnold SM, Varella-Garcia M, Moon J, Mack PC, Blanke CD, Hirsch FR, Kelly K, Gandara DR.

Lancet Oncol. 2017 [Epub ahead of print]

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