Lancet oncology

Chimothérapie en alternance avec un traitement d’erlotinib : FASTACT-2, une étude de phase 3.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2013

Thérapeutique ciblée, Traitement des stades IV

En publiant avec retard l’analyse de cet article paru il y a plus de deux mois, nous faisons une exception à la règle que nous nous sommes fixée de ne mettre en ligne que des articles du mois en cours. Si nous faisons cette exception, c’est parce que cet article, qui avait échappé à notre lecture systématique de juillet des sommaires de 22 revues, nous paraît particulièrement important.

Il était jusqu’à présent démontré que la combinaison d’une chimiothérapie et d’un traitement par inhibiteurs de la tyrosine kinase  de l’EGFR n’améliorait pas la survie. Pourtant, le groupe de Tony Mok, auteur de cette étude, avait montré dans une étude de phase 2 randomisée, menée chez des patients non sélectionnés atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IV,  que l’administration séquentielle d’erlotinib suivie de gemcitabine et cisplatine entrainait une augmentation significative de la PFS (http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19738125).

 Le but de cette étude de phase 3 menée dans plusieurs pays asiatiques est la confirmation des données de phase 2 en prenant encore comme objectif principal la PFS.

Les patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IIIB ou IV et de PS 0 ou 1 étaient randomisés sur un mode 1/1 pour recevoir :

  • une chimiothérapie par  6 cycles de carboplatine AUC 5 ou cisplatine à 75 mg/m2 et  1250 mg/m2 de gemcitabine à J1 et 8 de cycles administrés sur un mode J1=J29 (et non J1=J22).
  • Et soit de l’erlotinib à 150 mg/par jour, soit un placebo de J15 à J28. Ceux qui n’étaient pas en progression à 6 cycles continuaient ensuite ce traitement.

En un an et demi, 451 patients ont été randomisés.

Les caractéristiques des patients des deux groupes ne différaient pas significativement : il y avait autour de 40% de femmes, autour e 50% de non fumeurs et plus de 75% d’adénocarcinomes. Environ la moitié des patients avaient un statut mutationnel inconnu, 22 et 21% présentaient une mutation activatrice de l’EGFR et 31 et 30% étaient EGFR sauvages.

Les résultats étaient les suivants :

 

Erlotinib

Placebo

p

N

226

225

-

PFS médiane Inv. (mois)

7,6

6

<0,0001

PFS médiane Panel (mois)

10

7,4

<0,0001

Survie médiane (mois)

18,3

15,2

0,04

Réponses objectives (n)

97

41

<0,0001

Durée médiane de réponse

11,2

5,6

-

Lors de la progression le traitement de deuxième ligne était très différent dans les 2 groupes : en effet 79% des patients du groupe placebo recevaient un inhibiteur de la tyrosine kinase  de l’EGFR contre bien sur seulement 4% dans le groupe erlotinib.

Les résultats en fonction du statut mutationnel ont été les suivants :

 

Erlotinib

Placebo

p

Mutés (mutation activatrice)

PFS médiane (mois)

16,8

6,9

<0,0001

Survie médiane (mois)

31,4

20,6

0,009

Non mutés

PFS médiane (mois)

6,7

5,9

0,8

Survie médiane (mois)

14,9

12,2

0,16

Statut mutationnel inconnu

PFS médiane (mois)

7,1

6

0,009

Survie médiane (mois)

18,1

16,2

0,64

Les toxicités rapportées étaient celle qui étaient attendues : davantage de rash et de diarrhée dans le groupe erlotinib et une taux de toxicités hématologiques identique dans les deux bras. Il y a eu 34 et 31% de SAE.

Cette étude apporte des renseignements très importants qu’on peut résumer ainsi :

Il n’y a  pas d’avantage à associer d’emblée une chimiothérapie à un traitement par inhibiteur de la tyrosine kinase  de l’EGFR chez les patients dont il est démontré qu’ils n’ont pas de mutation activatrice de l’EGFR : ni la PFS, ni la survie ne différent.

Y a-t-il un avantage à associer d’emblée une chimiothérapie à un traitement par inhibiteur de la tyrosine kinase  de l’EGFR chez les patients qui ont une mutation activatrice de l’EGFR ? Cette étude ne peut répondre à la question car il aurait fallu pour y répondre comparer le bras expérimental à un bras d’erlotinib seul. Néanmoins la PFS médiane à 16,8 mois observée est nettement supérieure aux PFS des essais cliniques dans les quels, chez des patients qui présentent une mutation EGFR,  un inhibiteur de la tyrosine kinase  de l’EGFR est administré seul.

L’intérêt mis en avant par les auteurs est surtout chez les patients dont le statut mutationnel est inconnu qui représentent dans beaucoup de pays une importante proportion de malades. Chez eux, et dans un pays où l’incidence des mutations est élevée, cette étude montre qu’il  y a un bénéfice à  associer de l’erlotinib à la chimiothérapie. Mais retrouverait-on ce même bénéfice dans un pays où l’incidence des mutations est plus faible ? C'est probable mais ce n’est pas certain. 

Reference

Intercalated combination of chemotherapy and erlotinib for patients with advanced stage non-small-cell lung cancer (FASTACT-2): a randomised, double-blind trial.

Wu YL, Lee JS, Thongprasert S, Yu CJ, Zhang L, Ladrera G, Srimuninnimit V, Sriuranpong V, Sandoval-Tan J, Zhu Y, Liao M, Zhou C, Pan H, Lee V, Chen YM, Sun Y, Margono B, Fuerte F, Chang GC, Seetalarom K, Wang J, Cheng A, Syahruddin E, Qian X, Ho J, Kurnianda J, Liu HE, Jin K, Truman M, Bara I, Mok T.

Lancet Oncol. 2013; 14 : 777-86. 

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