Annals of Oncology

Comment choisir parmi les opioïdes forts à notre disposition

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2016

Qualité de vie / Soins palliatifs

Les opioïdes forts, c’est à dire la morphine et ses dérivés sont le plus souvent considérés comme ayant un effet antalgique comparable et donc comme interchangeables. Mais est-ce bien exact ?  Pour répondre à cette question les investigateurs de cette étude multicentrique italienne[1] ont randomisés des patients qui avaient une tumeur localement avancée ou métastatique et une douleur cotée au moins à 4 sur une échelle de douleur allant de 0 à 10, en 4 bras comportant une prise continue de :

  • morphine orale à libération contrôlée  (bras contrôle),
  • oxycodone orale à libération contrôlée,
  • fentanyl transdermique,
  • ou buprenorphine transdermique

Cette prise était continue sur 28 jours. Les doses de départ étaient celles que recommande l’Association Européenne de soins Palliatifs. Le clinicien avait toute liberté de les modifier au cours des 6 consultations prévues pendant ces 28 jours.

L’objectif principal était jugé sur la différence d’intensité de la douleur appréciée le jour de la consultation et l’appréciation initiale.  Ceux dont la douleur moyenne ne s’améliorait pas ou s’aggravait étaient qualifiés de non répondeurs, ceux dont la douleur s’améliorait de moins de 30%   étaient qualifiés de répondeurs partiels et ceux dont la douleur s’améliorait de plus de 30%  de répondeurs. L’objectif principal était la proportion de non répondeurs basée sur l’intensité moyenne de la douleur.  Les objectifs secondaires prenaient en compte d’autres facteurs tels que la proportion de non répondeurs basée sur la douleur la pire ou l’augmentation des doses, ou le changement de traitement etc. Il était nécessaire de randomiser 1008 patients pour déceler, dans une comparaison des 3 bras expérimentaux au bras standard, une réduction significative des non réponses.

En trois ans, 520 patients ont été randomisés par 44 centres italiens. L’essai a été ensuite interrompu du fait de la lenteur d’inclusion.

Les caractéristiques des patients des 4 groupes étaient réparties de façon à peu près identique. Il y avait entre 25 et 30 % de cancers du poumon. 

Les résultats pour chacune des 6 visites sont fournis sur un tableau très détaillé : il n’y avait aucune différence significative. Lorsqu’on compare l’ensemble des non répondeurs (NR), des répondeurs partiels (RP) et des répondeurs (R), il n’y avait non plus aucune différence significative (tableau ci dessous) entre chacun des 3 bras expérimentaux et le bras standard (tableau ci-dessous) :

 

Morphine

Oxycodone

p

Bupremorphine

p

Fentanyl

p

NR (%)

11,5

14,4

0,4

11

0,9

8,9

0,4

RP (%)

13,1

12

11

15,3

R (%)

75,4

73,6

78

75,8

 

 Il n’y avait pas non plus de différence concernant l’augmentation des doses, l’arrêt ou le changement de traitement et les effets secondaires ne différaient pas non plus significativement, même si quelques différences pouvaient être observées.   

Le taux de répondeurs de ces quatre opioïdes forts reste voisin de 75%,  ce qui veut dire qu’une fois sur quatre les douleurs sont peu ou pas contrôlées. Il n’y a pas, dans cette étude,  de différence notable d’efficacité ou de toxicité entre les traitements les plus récents et la morphine orale à libération contrôlée.

 

[1] CERP STUDY OF PAIN GROUP. Cette étude a été en partie financée par l’ entreprise pharmaceutique Grunenthal-Italia

 

 

Reference

Are strong opioids equally effective and safe in the treatment of chronic cancer pain? A multicenter randomized phase IV 'real life' trial on the variability of response to opioids.

Corli O, Floriani I, Roberto A, Montanari M, Galli F, Greco MT, Caraceni A, Kaasa S, Dragani TA, Azzarello G, Luzzani M, Cavanna L, Bandieri E, Gamucci T, Lipari G, Di Gregorio R, Valenti D, Reale C, Pavesi L, Iorno V, Crispino C, Pacchioni M, Apolone G; CERP STUDY OF PAIN GROUP (List of collaborators); CERP STUDY OF PAIN GROUP.

Ann Oncol 2016; 27 : 1107-15

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