Annals of Oncology

Des arguments forts en faveur de la réduction des métastases par les béta-bloquants

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mai 2013

Traitement des stades III, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs

Plusieurs études rétrospectives ont suggéré que les béta-bloquants pouvaient avoir une activité anti tumorale chez des patients atteints de cancer du sein ou de mélanome. En revanche les données disponibles sur l’action de ces médicaments dans le cancer broncho-pulmonaire restent peu concluentes.

De ce fait, des données rétrospectives ont été recherchées sur une database du MD Anderson incluant des patients traités par radiothérapie « définitive » associée ou non à une chimiothérapie pour un cancer bronchique non à petites cellules entre 1998 et 2010. Les patients étaient considérés comme prenant des béta-bloquants s’ils en recevaient pendant le temps de la radiothérapie ou de la chimioradiothérapie.

A partir de 842 dossiers, 120 ont été exclus pour différentes raisons (essais cliniques, antécédents néoplasiques, dose inférieure à 60Gy etc). Sur les 722 dossiers exploitables, 155 recevaient des béta-bloquants et 567 n’en recevaient pas.

La presque totalité des patients (677/722) présentaient un cancer bronchique non à petites cellules de stade III. Les patients prenant des béta-bloquants avaient significativement plus de facteurs de mauvais pronostic ou de comorbidités : ils étaient plus âgés, avaient plus fréquemment un PS élevé, plus fréquemment une HTA, moins souvent une chimioradiothérapie. En revanche ils recevaient plus fréquemment de hautes doses de radiothérapie, prenaient plus fréquemment de l’aspirine, et avaient des cancers de stades moins élevés.

L’indication des béta-bloquants était en majorité une HTA (68%) et moins souvent une coronaropathie.

Analyse univariée

Le temps sans métastases (DMFS), le temps sans maladie (DFS) et la survie globale étaient significativement augmentés sous béta-bloquants (tableau ci dessous) En revanche le temps jusqu’à récidive locale ne différait pas significativement.

Par ailleurs le jeune âge et le fait d’avoir un stade avancé réduisaiten la DMFS et la DFS tandis que le fait d’avoir un mauvais PS et un stade avancé était lié à une réduction significative de la survie globale. La chimioradiothérapie concomitante était aussi liée à une augmentation de la survie globale.

Analyse multivariée

Un  ajustement a été effectué  à l’âge, au PS, au stade, à l’histologie, à la dose de radiothérapie, au GTV[1], au fait de recevoir une chimioradiothérapie, à l’HTA, à la BPCO et à la prise d’aspirine. Dans ces conditions, le temps sans métastases (DMFS), le temps sans maladie (DFS) et la survie globale étaient significativement augmentés sous béta-bloquants (tableau ci dessous) En revanche le temps jusqu’à récidive locale ne différait pas significativement.

Parmi les autres facteurs cliniques, le stade avancé, le PS, un GTV élevé et l’absence de chimioradiothérapie restaient liés à un mauvais pronostic.

Analyse univariée

Variable

 

Pas de béta-bloquants

Béta-bloquants

DMFS

HR

1

0,60

 

95%CI

 

0,45-0,81

 

p

 

<0,01

DFS

HR

1

0,66

 

95%CI

 

0,52-0,85

 

p

 

<0,01

Survie globale

HR

1

0,76

 

95%CI

 

0,61-0,94

 

p

 

<0,01

Analyse multivariée

DMFS

HR

1

0,67

 

95%CI

 

0.500.91

 

p

 

0,01

DFS

HR

1

0,74

 

95%CI

 

0.580.95

 

p

 

0,02

Survie globale

HR

1

0,78

 

95%CI

 

0,63-0,97

 

p

 

0,02

Bien qu’il ne s’agisse pas d’une étude randomisée, cette étude rétrospective a un niveau de preuve tout de même élevé en faveur du rôle des béta-bloquants sur la réduction des métastases, compte tenu du nombre de malades inclus et de sa méthodologie irréprochable. Bien sur, comme toutes les études rétrospectives, il existe des données manquantes, telle que l’ancienneté ou la durée de la prise de béta-bloquants. C’est tout de même une excellente base de travail pour concevoir une étude randomisée. Il est néanmoins peu probable que cette question soit considérée comme assez intéressante pour justifier un essai randomisé.  



[1] Gross Tumor Volume, c’est le volume tumoral macroscopique visible à l’imagerie. 

Reference

Improved survival outcomes with the incidental use of beta-blockers among patients with non-small-cell lung cancer treated with definitive radiation therapy.

Wang HM, Liao ZX, Komaki R, Welsh JW, O'Reilly MS, Chang JY, Zhuang Y, Levy LB, Lu C, Gomez DR.

Ann Oncol 2013; 24 : 1312-9. 

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer