Journal of Thoracic Oncology

Diagnostic moléculaire des cancers bronchiques non à petites cellules observés pendant la grossesse.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2016

Cancer de la femme

La survenue d’un cancer broncho-pulmonaire au cours de la grossesse est heureusement un événement rare (cliquer ici) et il y a environ 50 cas publiés qui dans la majorité des cas sont des cas de cancers étendus dont la survie n’excède pas un an.  La plupart de ces cas datent d’avant la pratique large du diagnostic moléculaire et le grand intérêt de cette étude rétrospective monocentrique est d’identifier des cas récents, observés entre 2009 et 2015,  ayant bénéficié d’un diagnostic moléculaire.

Diagnostic moléculaire

Sur 2422 femmes atteintes d’un cancer bronchique non à petites cellules, 160 avaient entre 18 et 45 ans et chez 8 d’entre elles (5%)  le diagnostic a été fait pendant la grossesse ou dans les 12 semaines qui suivaient l’accouchement. Toutes présentaient un adénocarcinome métastatique. Six étaient non-fumeuses et 2 anciennes fumeuses à 4 et 14 PA. Leur âge médian était de 35 ans.

Comme on le voit sur le tableau ci dessous, 6 de ces 8 malades présentaient une translocation ALK-EML4 et 2 une mutation de l’EGFR.

 

Total des femmes

Femmes de 18 à 45 ans

Femmes dont le diagnostic a été fait pendant ou juste après la grossesse

N

2422

160

8

ALK

156

48

6

EGFR

547

48

2

KRAS

311

19

0

ROS1

29

11

0

 On constate aussi sur ce tableau que chez les femmes de 18 à 45 ans, le taux d’anomalies moléculaires accessibles à un traitement ciblé par inhibiteur de la tyrosine kinase de l’EGFR ou anti-ALK est extrêmement élevé (66%).  Environ un tiers des altérations ALK-EML4 et ROS1 observées dans la population totale le sont chez des femmes de 18 à 45 ans. En revanche les mutations de l’EGFR observées dans cette population ne concernent que mois de 10% de l’ensemble des mutations EGFR observées.

Compte tenu du petit nombre de femmes dont le cancer a été découvert durant la grossesse l’association entre le diagnostic de translocation ALK-EML4 et la grossesse n’est qu’à la limite de la significativité (p=0,053).

Evolution de la grossesse

Pour 2 patientes chez lesquelles le diagnostic a été fait précocement au cours de la grossesse, celle-ci a été interrompue. Chez 2 des 6 patientes qui ont continué leur grossesse des complications sont survenues entrainant une césarienne à 25 semaines et 29 semaines. Les 5 enfants nés à terme ou après la césarienne à 29 semaines sont vivants.

Traitement

Aucune de ces malades n’a reçu de traitement ciblé durant la grossesse et une a reçu une chimiothérapie par carboplatine et paclitaxel durant les deuxième et troisième trimestres. Toutes ont reçu au moins une thérapeutique ciblée après l’accouchement le plus souvent en première ligne, les patientes qui présentaient une translocation ALK-EML4 ont reçu du crizotinib et les 2 une mutation activatrice de l’EGFR du gefitinib ou de l’erlotinib. En deuxième ligne 3 ont reçu du ceritinib, et 2 de l’alectinib. La malade qui avait reçu du gefitinib a reçu de l’erlotinib puis plusieurs autres inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR, celle qui avait reçu de l’erlotinib a reçu de l’osimertinib à la progression. 

Sept de ces patientes sont vivantes dont 2 à plus de 5 ans. Une est décédée 2 ans après le diagnostic.

 

Cette étude apporte des données nouvelles particulièrement intéressantes. Toutes les patientes pour lesquelles un diagnostic de cancer bronchique non à petites cellules métastatique a été porté pendant ou juste après une grossesse présentaient une anomalie génétique les rendant accessible à un traitement ciblé. Certains pourront s’étonner qu’aucune patiente n’ait reçu de traitement ciblé durant la grossesse alors que quelques cas publiés font état d’une bonne tolérance de ces traitements pendant la grossesse, comme par exemple un cas publié par l’équipe de Sylvie Friard à Foch avec du gefitinib (cliquer ici).  L’explication vient sans doute du fait que les délais entre le diagnostic et le premier traitement n’excède pas 2 mois,  ce qui signifie que le diagnostic de cancer a été fait plutôt à la fin de la grossesse, ce qui rendait légitime d'attendre l'accouchement pour commencer ce traitement.

 

 

  

Reference

Clinicopathologic Features of NSCLC Diagnosed During Pregnancy or the Peripartum Period in the Era of Molecular Genotyping.

Dagogo-Jack I, Gainor JF, Porter RL, Schultz KR, Solomon BJ, Stevens S, Azzoli CG, Sequist LV, Lennes IT, Shaw AT.

J Thorac Oncol 2016; 11  :1522-8

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer