Journal of Clinical Oncology

Erlotinib ou Gefitinib en deuxième ligne ou plus ? Un nouvel essai japonais de phase III

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2016

Thérapeutique ciblée, Traitement des stades IV

Il y a plus de 10 ans qu’une étude randomisée de phase III, l’étude ISEL (Iressa Survival Evaluation in Lung Cancer),  comparant gefitinib à 250 mg à placebo chez des patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules ne réussissait pas à démontrer un gain de survie en deuxième ligne chez des patients dont à l’époque le statut mutationnel n’était pas connu : la médiane de survie était à 5,6 mois dans le bras expérimental versus 5,1 dans le bras contrôle (cliquer ici). A l’inverse, l’étude BR21 menée avec de l’erlotinib à 150 mg contre placebo dans une population dont les caractéristiques étaient proches était positive : la médiane de survie était à 6,7 mois dans le bras expérimental versus 4,7 dans le bras contrôle. Cette étude publiée la même année (cliquer ici) conduisit à l’enregistrement de l’erlotinib dans cette indication. L’objectif de cette étude japonaise académique et multicentrique  est de comparer ces deux médicaments qui sont, à la différence de l’Europe, tous les deux enregistrés dans cette indication.

 Pour être éligible à cette étude,  les patients devaient avoir un adénocarcinome de stade IV, un PS de 0 à 2 et avoir reçu au moins une ligne de chimiothérapie.

Ils étaient randomisés entre gefitinib à 250 mg/j  et erlotinib à 150 mg/jour.

L’objectif principal de cette étude de non infériorité était la survie sans progression  établie par les investigateurs. La non infériorité devait être conclue si la limite supérieure de l’intervalle de confiance de la survie sans progression  était inférieure à 1,30.

La survie globale était l’un des objectifs secondaires.

Au total 561 patients provenant de 63 hôpitaux japonais ont été randomisés. Deux patients ont été exclus du fait qu’il n’avait pas reçu de chimiothérapie première. A l’exception du PS (plus de patients à PS=0 dans le bras erlotinib), les caractéristiques des patients des deux groupes étaient réparties de façon identique. On notera que cette population contenait un nombre très élevé de patients présentant une mutation activatrice de l’EGFR : 65,1% présentaient une mutations L858R ou une délétion de l’exon 19 et 17,5% seulement des patients étant sauvages (le reste concernait des patients pour lesquels le statut EGFR n’avait pas pu être déterminé ou qui avaient des mutations rares ou des doubles mutation.

Les patients qui ont reçu un traitement après l’erlotinib étaient de  76.4% pour ceux qui avaient reçu de l’erlotinib et  78.5% pour ceux qui avaient reçu du gefitinib.

Résultats

Les principaux résultats sont indiqués sur le tableau ci dessous : 

 

Gefitinib

Erlotinib

p

PFS  médiane (mois)

6,5

7,5

 

PFS  (HR)

1,12 (0,94-1,34)

0,25

Survie médiane (mois)

22,8

24,5

 

Survie (HR)

1,03 (0,83-1,29)

0,76

Réponse (%)

45,9

44,1

 

PFS  médiane des mutés (mois)

8,3

10

 

PFS des mutés  (HR)

1,09 (0,87-1,35)

0,42

Rash de grade 3 et 4 (%)

2,2

18,1

 

Elévation ALAT/ASAT de grade 3 et 4 (%)

6,1/13

2,2/3,3

 

La limite supérieure de l’intervalle de confiance de la survie sans progression étant supérieure à 1,30, cet essai de non infériorité n’a pas atteint son objectif. Après révision de la PFS par un comité indépendant, les conclusions sont restées les mêmes.  Dans une analyse prévue aucune interaction entre les résultats et l’âge n’a été mise en évidence.

Ces conclusions s’appliquent à la population japonaise et ne sont pas transposables à l’Europe notamment parce que la population de patients atteints d’adénocarcinome a ici un statut mutationnel extrêmement différent de celui que nous rencontrons en Europe. C’est probablement ceci qui explique que les survies sans progression  de ces deux médicaments soient très supérieures à celles qui ont été observées dans une population plus variée dans les deux études historiques de phase III citées plus haut.

Ces résultats en tout cas ne viendront pas bouleverser les règles européennes : dans cette indication de deuxième ligne dont le statut mutationnel est négatif ou inconnu, seul l’erlotinib a l’AMM. 

Reference

Randomized Phase III Study Comparing Gefitinib With Erlotinib in Patients With Previously Treated Advanced Lung Adenocarcinoma: WJOG 5108L.

Urata Y, Katakami N, Morita S, Kaji R, Yoshioka H, Seto T, Satouchi M, Iwamoto Y, Kanehara M, Fujimoto D, Ikeda N, Murakami H, Daga H, Oguri T, Goto I, Imamura F, Sugawara S, Saka H, Nogami N, Negoro S, Nakagawa K, Nakanishi Y.

J Clin Oncol 2016; 34 : 3248-57.

115 lectures

Coup de ♥ du mois

Risque de cancer du poumon chez les mineurs exposés à de faible taux de radon

novembre 2015

Si les données concernant les expositions à de fortes concentrations de radon sont bien connues,...

Lire la suite
Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer