Lung Cancer

Faut-il opérer les CBNPC de stade III-N2 ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
avril 2018

Traitement péri-opératoire, Traitement des stades III, Chirurgie

La prise en charge des patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IIIA reste controversée à la fois du fait de la très grande hétérogénéité de ces cancers (allant d’un seul ganglion découvert à la thoracotomie à l’atteinte volumineuse de plusieurs chaines ganglionnaires) et aussi de l’absence de grandes études prospectives de phase III dont les résultats permettraient de trancher.

Actuellement deux options thérapeutiques  sont recommandées : soit la radiochimiothérapie exclusive,  soit la chirurgie précédée d’une chimiothérapie ou d’une radiochimiothérapie néoadjuvantes (cliquer ici).

Le but de cette étude rétrospective espagnole était de comparer la survie des patients traités soit par chirurgie précédée d’une chimiothérapie ou d’une radiochimiothérapie soit la radiochimiothérapie exclusive. Cette étude a été réalisée par deux groupes coopérateurs, le Radiation Oncology Clinical Research Group (GICOR) et le GOECP-SEOR (Oncologic Group for the Study of Lung Cancer-Spanish Society of Radiation Oncology) à partir des données de 15 hôpitaux espagnols.

Les malades inclus devaient avoir été traités pour un cancer bronchique non à petites cellules T1-T3 N2 M0 (7éme classification) potentiellement résécable entre 2005 et 2014. En revanche, les patients en progression après le traitement d’induction, ceux traités par chirurgie ou radiothérapie exclusive ou radiothérapie séquentielle étaient exclus. La résécabilité de tous les cas traités par radiothérapie exclusive a été confirmée par deux chirurgiens thoraciques.

Finalement à partir de 294 patients atteints de cancers bronchiques non à petites cellules de stade IIIA-N2  identifiés, 247 ont été considérés comme potentiellement résécables et inclus dans l’analyse : 129 ont reçu une radiochimiothérapie et 118 un traitement néoadjuvant puis une chirurgie. Cette population de patients représentait bien la diversité de ces cancers :

  • Il y avait des T1 (22%), des T2 (42%) et des T3 (36%),
  • Un peu plus de la moitié (51,4%) n’avaient qu’une chaine ganglionnaire envahie et les autres plus d’une chaine,
  • Dans 9% des cas la taille des ganglions atteignait ou dépassait 3 cm (bulky N2).

Pour minimiser les possibles biais de sélection dus aux caractéristiques des patients ou de la tumeur, un ajustement par la méthode des scores de propension a été réalisée de sorte que les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties en ce qui concerne l’âge, le sexe, le PS, le tabagisme, le T, le nombre et la taille des ganglions, l’histologie et le fait que l’atteinte ganglionnaire était ou non histologiquement confirmée.

Comme on peut le voir sur le tableau ci-dessous la survie sans progression et la survie globale étaient significativement augmentées chez les patients opérés, qu’il s’agisse de l’ensemble de la cohorte ou de la cohorte ajustée :

 

Chirurgie

(mois)

Pas de chirurgie

(mois)

HR (95%CI)

p

PFS de l’ensemble des malades  

58

14

0,38 (0,26-0,54)

<0,001

PFS des malades appariés

46

15

0,46 (0,30-O,71)

<0,001

Survie de l’ensemble des malades  

61

28

0,42 (0,30-0,60

<0,001

Survie des malades appariés

56

29

O,51 (0,33-0,78)

0,002

Comme d’autres études l’ont déjà montré, ce bénéfice de survie est démontré dans le sous-groupe des patients qui ont eu une lobectomie mais pas dans celui des patients qui ont eu une pneumonectomie (chez lesquels il y avait un taux élevé de mortalité post-opératoire).

Cette étude va dans le même sens que plusieurs études de ce type : par exemple en 2016 une étude de registre hollandaise aboutissait à des conclusions similaires : chez ces malades, la chirurgie précédée d’un traitement d’induction prolongeait la survie par rapport à une seule radiochimiothérapie (cliquer ici). Mais le caractère rétrospectif de ces études fait qu’il faut démontrer cela dans un essai randomisé de phase III. On rappelle  que l’étude randomisée de Van Meerbeeck publiée il y a10 ans n’avait pas montré de bénéfice de la chirurgie (cliquer ici) pas plus que celle de Kathy Albain, également globalement négative (cliquer ici pour un accès gratuit). Mais on se souvient aussi que ces deux études comportaient des analyses de sous-groupes, certes discutables parce qu’effectuées a posteriori, qui objectivaient toutes deux,  - chez les malades qui avaient eu une lobectomie (et dans l’étude de Van Meerbeeck qui avaient aussi une résection complète et une clearance médiastinale) - un bénéfice de survie significatif.

Actuellement beaucoup d’équipes commencent le traitement des patients qui ont un cancer bronchique non à petites cellules de stade III-N2 par un traitement d’induction et discutent la chirurgie chez les patients qui ne progressent pas après celui-ci : en attendant les résultats d’hypothétiques études randomisées de phase III ces études de registre peuvent les renforcer dans ce choix.   

 

 

 

 

Reference

Neoadjuvant treatment followed by surgery versus definitive chemoradiation in stage IIIA-N2non-small-cell lung cancer: A multi-institutional study by the oncologic group for the study of lung cancer (Spanish Radiation Oncology Society).

Couñago F, Rodriguez de Dios N, Montemuiño S, Jové-Teixidó J, Martin M, Calvo-Crespo P, López-Mata M, Samper-Ots MP, López-Guerra JL, García-Cañibano T, Díaz-Díaz V, de Ingunza-Barón L, Murcia-Mejía M, Alcántara P, Corona J, Puertas MM, Chust M, Couselo ML, Del Cerro E, Moradiellos J, Amor S, Varela A, Thuissard IJ, Sanz-Rosa D, Taboada B.

Lung Cancer 2018; 118 : 119-127

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer