Journal of Clinical Oncology

Faut-il préférer la lobectomie par thoracotomie classique ou par chirurgie mini-invasive ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2018

Chirurgie

Certains pensent encore que les résultats de la lobectomie par chirurgie mini-invasive seraient moins bons que ceux de la lobectomie effectuée lors d’une thoracotomie classique. Ils avancent que cette technique ne permettrait notamment pas un staging ganglionnaire complet et qu’ainsi un certain nombre de patients ne bénéficieraient pas de la chimiothérapie adjuvante qu’ils auraient reçu si davantage de ganglions avaient été examinés. Ceci constituerait donc selon eux une perte de chances pour nos patients. 

Les auteurs de cet article ont fait l’hypothèse que la lobectomie par  chirurgie mini-invasive  n’était pas inférieure à la lobectomie réalisée par thoracotomie classiqueet  ont voulu en apporter la preuve à partir de l’analyse rétrospective d’une base de données prospective créée en 2002 par la Society of Thoracic Surgeons et liée au fichier Medicare. Ils ont recherché dans cette base de données les patients non antérieurement traités et âgés d’au moins 65 ans  qui ont eu une lobectomie pour cancer du poumon de stade I avec deux cohortes distinctes,  selon que le stade était clinique ou pathologique. 

Cohorte de stades I cliniques

Les données de 10597 patients ont constitué la base de données clinique. Parmi ceux-ci, 4448 ont été opérés par thoracotomie et 6149 par chirurgie mini-invasive. La plupart des caractéristiques des patients des deux groupes n’étaient pas bien réparties. 

Un modèle de Cox ajusté sur les principales variables pronostiques  a été crée pour deux périodes de l’étude, 2002 à 2008 et 2009 à 2013. 

Le risque de mortalité de la chirurgie mini-invasivepar rapport à la chirurgie classique :

  • N’était pas différent pour la période allant de 2002 à 2008 (HR :  0,97; 95% CI, 0,87-1,09; p = 0,62). 
  • Pour la période plus récente la lobectomie par chirurgie mini-invasivepermettait d’obtenir une survie plus longue que la lobectomie par thoracotomie  (HR : 0,84; 95% CI, 0,75-0,93; p < 0.001).

Un appariement par la méthode des scores de propension a été réalisé pour la période allant de 2009 à 2013 et a abouti à la création de 2901 paires de malades opérés l’un parchirurgie mini-invasiveet l’autre par thoracotomie et dont les caractéristiques étaient bien réparties : le taux de survie à 4 ans après chirurgie mini-invasive  était de  68,6% et celui après thoracotomie classique était de  64,8%. Cette différence était significative (p = 0,003). 

Cohorte de stades I pathologiques

Selon la même méthodologie la survie des 4136 patients opérés par thoracotomie  a été comparée à celle des 5651opérés par chirurgie mini-invasive : avec un modèle de Cox ajusté sur les principales variables pronostiques  pour tous les malades et appariement par la méthode des scores de propension pour la période allant de 2009 à 2013 la survie des malades opérés par chirurgie mini-invasive  n’était pas inférieure à celle des malades opérés par thoracotomie. 

Le délai séparant la date de la chirurgie de celle du début de la chimiothérapie était significativement plus court pour les malades opérés par  chirurgie mini-invasive (50 vs 55 jours, p<0,001.

La conclusion des auteurs est que la survie des patients opérés par lobectomie, réalisée par des chirurgiens thoraciques pour un cancer de stade I, n’est pas inférieure lorsque celle-ci a été effectuée par chirurgie mini-invasive plutôt que par chirurgie classique. On ne peut qu’être convaincu par cette démonstration avec toutefois deux réserves : 1) cette étude est rétrospective et 2) le suivi des patients est inférieur à 3 ans, ce qui est bien peu pour des cancers de stade I. 

Si on fait abstraction de ces deux réserves, et si on se souvient que la lobectomie réalisée par chirurgie mini-invasive a moins de complications que lorsqu’elle est faite en chirurgie classique et  que la chirurgie mini-invasive a largement contribué à raccourcir les durées de séjour, on ne peut que préférer cette technique à condition que  les chirurgiens avec lesquels nous travaillons en aient une bonne maitrise.  

 

 

 

 

 

 

 

 

Reference

Minimally Invasive Lung Cancer Surgery Performed by Thoracic Surgeons as Effective as Thoracotomy.

Boffa DJ, Kosinski AS, Furnary AP, Kim S, Onaitis MW, Tong BC, Cowper PA, Hoag JR, Jacobs JP, Wright CD, Putnam JB Jr, Fernandez FG.

J Clin Oncol2018; 36 : 2378-2385

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer