Journal of Clinical Oncology

Faut-il proposer une chimioradiothérapie aux patients âgés atteints de CBPC localisés ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
janvier 2016

Radiothérapie / Radiofréquence, Cancers à petites cellules, Cancers du sujet âgé

La chimioradiothérapie est un standard de traitement des patients qui ont un cancer bronchique à petites cellules localisé et un bon PS selon la première Conférence de Consensus de l’ESMO (accéder gratuitement au texte complet). Celle ci s’appuie sur des analyses de sous groupes de sujets âgés inclus dans des études prospectives, pour dire que l’âge ne semble pas modifier le pronostic des patients éligibles à une chimioradiothérapie qui ont un bon PS.

Cependant la méta-analyse de JP Pignon, réalisée il y a plus de 20 ans, suggérait que le bénéfice de la chimioradiothérapie était limité aux patients de moins de 65 ans (accéder gratuitement au texte complet

Comme aucune étude randomisée spécifique aux sujets âgés n’est disponible, il nous semble que l’étude que nous commentons ici apporte des données importantes. Elles proviennent de la célèbre National Cancer Data Base entre 2003 and 2011.

A partir de près de 75 000 patients âgés présentant un cancer bronchique à petites cellules, ont été inclus 8 637 patients atteints de cancers bronchiques à petites cellules localisés pour lesquels on disposait de données complètes, qui n’avaient pas été opérés et chez lesquels la radiothérapie n’était pas contre indiquée. Ces patients avaient reçu une chimiothérapie exclusive dans 43,7% des cas et une chimioradiothérapie dans 53,6% des cas.

Les caractéristiques des patients des deux groupes n’étaient pas réparties de façon strictement identique : les patients qui ont reçu une chimiothérapie exclusive étaient un peu plus âgés (76 vs 75 ans), plus fréquemment de sexe féminin (55 vs 52%), avaient un stade III plus fréquemment (78 vs 73%), avaient plus de comorbidités (48 vs 38%) et avaient des conditions socio-économiques différentes.  Les traitements, notamment la chimiothérapie n’était pas non plus strictement les mêmes.

En analyse univariée et en analyse multivariée, le fait d’avoir reçu une chimioradiothérapie, l’âge <80 ans, le sexe féminin, le score de Charlson, un stade I clinique et le fait d’avoir reçu une polychimiothérapie (par opposition à une monochimiothérapie)  étaient des facteurs pronostiques favorables. En analyse multivariée,  le fait d’avoir reçu une chimioradiothérapie réduisait notamment de façon importante le risque de décès (0,52; 95% CI, 0,49-0,54; p<0,001). La survie des patients de l’ensemble de la cohorte était de 15,6 mois s’ils avaient reçu une chimioradiothérapie et de 9,3 mois, s’ils n’en avaient pas reçu. Ce bénéfice significatif persistait chez les patients âgés de plus de 80 ans (13,6 vs 8,1 mois).

Parmi ces patients, 3428 ont pu être appariés sur les scores de propension prenant en compte tous les facteurs significativement associés à  la survie globale en analyse multivariée : 3428 traités par chimiothérapie exclusive et 3428 traités par chimioradiothérapie. Le bénéfice de survie pour les patients du groupe chimioradiothérapie était confirmé (HR :  0,52; 95% CI, 0,50-0.55; P<0,001). La survie à 3 ans était chez les malades traités par chimioradiothérapie à 20,6% vs 6,6%.

La chimioradiothérapie concomitante entrainait un bénéfice de survie significatif par rapport à la chimioradiothérapie séquentielle (17 vs 15,4 mois, p=0,01). A noter toutefois que les courbes de survie se croisaient à un an, le traitement  séquentiel était initialement le meilleur.

Cette étude est rétrospective et de ce fait n’a pas la valeur d’une étude randomisée. On remarquera néanmoins qu’elle porte sur un grand nombre de malades et que l’analyse multivariée et l’appariement sur les scores de propension permet de réduire les biais éventuels qui pourraient faire douter de ces résultats. De ce fait, on peut retenir que, même si on ne dispose pas d’étude randomisée, la chimioradiothérapie doit être discutée chez tous les patients âgés atteints de cancer bronchique à petites cellules localisé et proposée chaque fois qu’elle n’est pas contre-indiquée.

 

Reference

Role of Chemoradiotherapy in Elderly Patients With Limited-Stage Small-Cell Lung Cancer.

Corso CD, Rutter CE, Park HS, Lester-Coll NH, Kim AW, Wilson LD, Husain ZA, Lilenbaum RC, Yu JB, Decker RH.

J Clin Oncol 2015; 33 : 4240-6.

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer