Lancet

Immunothérapie adjuvante des CBNPC : premiers résultats de l’étude de phase III IMpower 010

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2021

Immunothérapie, Traitement péri-opératoire

Cet article paru très récemment dans le Lancet nous apporte les premiers résultats fournis par une analyse intermédiaire de l’étude IMPower 010, une étude randomisée internationale de phase III à promotion industrielle qui explore un anti PD-L1  l’atezolizumab en maintenance chez les malades opérés et traités par chimiothérapie adjuvante d’un cancer bronchique non à petites cellules. 

Cette importante étude a été menée dans 227 sites de 22 pays. Pour être éligibles, les patients devaient avoir un PS ≤1, avoir été opérés d’un cancer bronchique non à petites cellules complétement réséqué de stade IB (tumeurs ≥ 4cm) à IIIA dans la 7é classification TNM. Ils devaient être capables de recevoir une chimiothérapie à base de platine et pouvaient avoir une mutation activatrice de l'EGFR ou une translocation ALK-EML4. Ils devaient avoir une résection complète comportant un curage ganglionnaire minimum (7 et 4 à droite, 7, 5 et 6 à gauche) ou un simple échantillonnage (sampling). Dans un premier temps les patients étaient enrôlés et devaient recevoir 1 à 4 cycles de chimiothérapie adjuvante. Celle-ci pouvait associer au cisplatine de la vinorelbine, du docetaxel, de la gemcitabine ou du pemetrexed.

Seuls ceux qui avaient terminé leur chimiothérapie adjuvante pouvaient être randomisés, à condition qu’ils n’aient pas de signes de récidive, en 2 bras : 

  • Soit 16 cycles d’atezolizumab à 1200mg (J1=J22) pendant 1 an,
  • Soit meilleur soin de confort. 
  • Ils étaient stratifiés par sexe (femme vs homme), histologie (épidermoïde vs non épidermoïde), stades (IB vs II vs IIIA), et expression de PD-L1 en immunohistochimie SP142 (TC 2/3 et tout IC vs TC 0/1 et IC2/3 vs TC 01 et 1C 0/1). 

L'objectif principal était la survie sans maladie évaluée par les investigateurs :

  • dans une population restreinte de patients c'est à dire chez les malades de stades II et IIIA dont la tumeur exprime PD-L1  (au moins 1% en immunohistochimie SP263). 
  • Chez tous les malades de stades II et IIIA.
  • Et dans toute la population (analyse en intention de traiter), de stades IB à IIIA. 

Les objectifs secondaires étaient :

  • la survie globale en analyse en intention de traiter, 
  • la survie sans maladie des patients de stades II-IIIA exprimant PD-L1  à au moins 50%  (SP263)
  • les taux de survie à 3 et 5 ans 
    • des malades de stades II et IIIA dont la tumeur exprime PD-L1à au moins 1%,
    • De tous les malades de stades II et IIIA,
    • Et dans toute la population en intention de traiter

Cette étude devait inclure 1005 malades. La survie sans maladie puis la survie globale étaient testées de façon hiérarchique :

  • dans la population restreinte aux malades de stades II et IIIA dont la tumeur exprime PD-L1, l’essai avait une puissance de 90% de déceler une réduction de risque de décès de 0,65 (52 vs 34 mois),
  • Chez tous les malades de stades II et IIIA, l’essai avait une puissance de 91% de déceler une réduction de risque de décès de 0,73 (46,6 vs 34 mois),.
  • Et dans toute la population (analyse en intention de traiter), de stades IB à IIIA l’essai avait une puissance de 76% de déceler une réduction de risque de décès de 0,78 (48,7 vs 38 mois). 

Résultats 

De 2015 à 2018, 1280 patients ont été enrôlés. Parmi ceux-ci, 1269 ont reçu une chimiothérapie adjuvante avec un nombre médian de 4 cycles. Parmi ceux-ci, 199 ont interrompu l’étude (retrait de consentement, effets adverses de la chimiothérapie, récidives …) et l’éligibilité à la randomisation a été revue : 66 étaient inéligibles pour la randomisation et 1005 ont été randomisés : 507 dans le bras atezolizumab et 498 dans le bras meilleurs soins de confort. Douze et trois n’ont pas reçu le traitement et 495 dans chaque bras l’ont reçu et on été inclus dans la population analysée pour la toxicité (safety analysis). 

Ensuite parmi ces 495 patients de chaque bras :

  • Seulement une partie des malades ont reçu le traitement prévu.
    • 172 ont interrompu le traitement pour toxicité (n=92), récidive ou retrait de consentement dans le bras expérimental
    • 122 ont interrompu le traitement de confort pour récidive (n=90), retrait de consentement ou même effets adverses … 
    • De sorte que seulement 323 et 373 malades ont reçu le traitement prévu.
  • 442 patients et 440 patients des deux bras avaient un cancer de stade II ou IIIA (efficacity II-IIIA population)
  • Et 248 et 228 patients avaient une expression de PD-L1  en SP253 et un stade II ou IIIA (efficacity PD-L1 ≥1% II-IIIA population). 

Les durées médianes de suivi de ces populations étaient supérieures à 30 mois. 

Le tableau ci-dessous résume les principaux résultats des objectifs principaux : 

 

 

Atezo

BSC

p

Stades II-IIIA exprimant PDLI

Médianes de DFS (95%CI)

NA (36,1-NA)

35,3 (29-NA)

 

HR (95% CI)

0,66 (0,50-0,88)

0,0039

Taux de DFS à 3 ans (%)

60

48,2

 

Stades II-IIIA

Médianes de DFS (95%CI)

42,3 (36-NA)

35,3 (30,4-46,4

 

HR (95% CI)

0,79 (0,64-0,96)

0,020

Taux de DFS 3 ans (%)

55,7

49,4

 

Toute la population (ITT)

Médianes de DFS (95%CI)

NA (36,1-NA)

37,2 (31,6-NA)

 

HR (95% CI)

0,81 (0,67-0,99)

0,04

Taux de DFS à 3 ans (%)

57,9

52,6

 

On voit sur ce tableau que les différences de survies sans maladie sont largement significatives pour les stades II-IIIA exprimant PDLI et pour l’ensemble des stades II et III. Pour la population en intention de traiter, elles le sont également mais sont à la limite. 

En ce qui concerne les objectifs secondaires, le HR pour les stades II-IIIA exprimant PDLI  à plus de 50% est à 0,43. Dans une analyse post-hoc il n’est pas significatif chez les patients qui expriment PD-L1  à 1-49% ou qui ne l’expriment pas.  Quant aux données de survie, elles sont immatures. 

La « safety population » représente 990 patients. On notera que la durée médiane de traitement par l’atezolizumab était de 10,4 mois. 

Des effets adverses de tous grades ont été notés chez 93% des patients du bras atezolizumab et 71% des patients du bras contrôle et des effets adverses de grades 3 et 4 chez 22 et 12% des patients des 2 bras. Des effets adverses sévères ont été déclarés chez 18 et 8% des patients. 

Des évènements secondaires rapportés au traitement de tous grades ont été observés sous atezolizumab chez 68% des patients et de grade 3 ou 4 chez 11%. Il s’agissait principalement d’hypothyroïdie (11%), de prurit (9%), et de rash (8%). 

Des décès ont été rapportés à l’atezolizumab chez 4 patients (1%). Il s’agissait de  myocardite, de pneumopathie interstitielle diffuse, d’une défaillance multi-organes et d’une leucémie myloïde aigue.  L’atezolizumab a été interrompu pour toxicité chez  90 patients (18), le plus souvent pour  pneumopathie, hypothyroïdie, et augmentation des enzymes hépatiques. 

Cette très importante étude de phase III d’immunothérapie a été très rapidement menée et la démonstration d’une augmentation significative de la survie sans maladie chez des patients opérés d’un cancer bronchique non à petites cellules de stade II-IIIA ayant reçu une chimiothérapie adjuvante est faite pour la première fois. Souvenons nous que cette démonstration est faite sur une population qui ne représente pas la totalité des malades de stades IB-IIIA opérés et ayant reçu une chimiothérapie adjuvante  : ils étaient 1269 et seulement 1005 ont été randomisés. De plus c’est surtout chez les 882 patients présentant un stade II-IIIA et chez les 476 d’entre eux exprimant PD-L1 que cette différence de survie sans maladie est importante. Souvenons nous aussi que c’est la survie sans maladie des investigateurs qui est prise en compte ici et non celle d’un comité indépendant et que cette étude n’a pas été menée en double aveugle.  

Il est maintenant souhaitable que la démonstration d’une augmentation de survie globale soit apportée et nous attendrons avec impatience ces futurs résultats. 

 

 

Reference

Adjuvant atezolizumab after adjuvant chemotherapy in resected stage IB–IIIA non-small-cell lung cancer (IMpower010): a randomised, multicentre, open-label, phase 3 trial 

Felip E,  Altorki N, Zhou C,  Csőszi T,  Vynnychenko I,   Goloborodko O et al

Lancet 2021, in press 

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