Dans la population générale, l’activité physique diminue le risque de survenue de plusieurs cancers. Son intérêt a aussi été démontré en prévention secondaire et tertiaire.
La loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 introduit la notion de prescription d’activité physique « adaptée à la pathologie, aux capacités physiques et au risque médical dans le cadre du parcours de soins des patients atteints d’une affection longue durée, et notamment de cancer ».
L’INCa préconise en mars 2017 dans un état des lieux et des connaissances intitulé : « Bénéfice de l’activité physique pendant et après cancer » l’intégration de l’activité physique dès le début du parcours de soins. Les objectifs attendus sont :
- la prévention ou la correction d’un déconditionnement physique ;
- le maintien et/ou la normalisation de la composition corporelle (masse grasse / masse musculaire) ;
- la réduction de la fatigue liée aux cancers et aux effets secondaires des traitements (diminution des complications péri opératoires, diminution du risque de neuropathie) ;
- la réduction des facteurs de risques cardio-vasculaires ;
- l’amélioration globale de la qualité de vie ;
- et la réduction de la mortalité (jusqu’à 40% de réduction de la mortalité globale) et du risque de récidive.
Ces objectifs reposent sur les données de la littérature, essentiellement dans les cancers du sein, du colon et de la prostate et le plus souvent au stade localisé.
Les effets bénéfiques décrits ont été observés, d’une façon générale, pour une pratique d’activité physique mixte (développement des capacités cardio-respiratoires et renforcement musculaire), comportant des exercices d’intensité modérée à élevée avec une quantité hebdomadaire proche de celle recommandée en France pour la population générale (30 min par jour d’activité physique au moins 5 jours par semaine).
Il y a peu d’études consacrées à l’impact de l’activité physique dans le cancer du poumon. L’étude randomisée de Chen et al (cliquer ici pour un accès gratuit) démontre chez 116 patients un bénéfice sur une échelle d’anxiété et dépression à 12 semaines pour un programme basé sur la marche à pied (40 min x 3 / semaine). Cette étude regroupe des stades localisés et avancés. L’étude randomisée de Henke et al (cliquer ici) objective chez 46 patients atteints de stades avancés en cours de chimiothérapie un bénéfice des exercices d’endurance et de force musculaire sur le score de l’indice de Barthel qui reflète l’autonomie du patient.
Dans cet article publié dans Annals of Oncology, Dhillon et al évaluent la pratique d’une activité physique encadrée chez des patients présentant un cancer du poumon (cancer bronchique à petites cellules et cancer bronchique non à petites cellules ), localement avancé ou métastatique dans une étude randomisée multicentrique (5 centres australiens). Pour être inclus les patients devaient avoir un PS ≤ 2, une espérance de vie d’au moins 6 mois, comprendre suffisamment l’anglais pour remplir les questionnaires, être jugé apte à la pratique de l’activité physique selon les réponses au questionnaire PAR-Q et par le médecin référent. L’éligibilité était évaluée chez 325 patients. Trente-quatre sont jugés incapables de faire un exercice physique et 99 patients refusent de participer. Finalement, 112 sont randomisés en 5 ans. Tous les patients reçoivent des documents sur la nutrition et sur l’exercice physique adapté au cancer. Dans le bras expérimental, les patients reçoivent en plus un programme adapté, individuel, comprenant 8 sessions par semaine. Les sessions durent environ 1H (45 min d’activité physique et 15 min de soutien et conseil). A la randomisation puis à 2, 4 et 6 mois, les patients évaluent leur activité physique, remplissent les questionnaires de qualité de vie et fatigue. L’activité physique est aussi évaluée de façon objective par un accéléromètre.
L’objectif principal de l’étude est d’identifier une différence de 6 points dans le score de fatigue (FACT-F) à 2 mois entre les deux groupes.
L’âge médian est de 64 ans, 55% des patients sont des hommes, 95% ont un CBNPC métastatique et 96% ont un PS 0 ou 1. La randomisation a eu lieu 8 mois, en médiane, après le diagnostic. Les groupes sont similaires en particulier en terme de fatigue à la randomisation. L’adhérence au programme est bonne avec 69% des patients qui font la totalité du programme. La progression tumorale est la principale cause d’arrêt prématuré. Cette étude est négative car à 2 mois il n’y a pas de différence entre les 2 groupes sur le score de fatigue. Les objectifs secondaires sont négatifs aussi.
Les auteurs discutent d’une part une possible contamination entre les 2 groupes et d’autre part une activité physique trop peu intensive dans le groupe expérimental. En effet, des études antérieures ont montré que l’efficacité de l’activité physique était corrélée à l’intensité de l’activité aérobie. Les auteurs recommandent la réalisation d’un nouvel essai randomisé avec une activité physique plus intensive et débutée dès le diagnostic.
Cette étude ne démontre pas l’absence de bénéfice de l’activité physique chez les patients ayant un cancer bronchique non à petites cellules métastatique mais l’absence de bénéfice de ce programme individualisé d’activité physique. En effet, dans le bras contrôle, les patients étaient encouragés à avoir une activité physique mais ils ne recevaient pas de conseil personnalisé.
Nous devons donc continuer à suivre les recommandations de l’INCA et encourager nos patients à avoir une activité physique dont les modalités restent à définir.
Reference
Impact of Physical Activity on Fatigue and Quality of Life in People with Advanced Lung Cancer: a Randomised Controlled Trial.
Dhillon HM, Bell ML, van der Ploeg HP, Turner JD, Kabourakis M, Spencer L, Lewis C, Hui R, Blinman P, Clarke SJ, Boyer MJ, Vardy JL.
Ann Oncol 2017; 28 : 1889–1897