Lancet oncology

Un traitement local de consolidation a-t-il sa place dans le traitement des cancers métastatiques ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
décembre 2016

Traitement des stades IV, Chirurgie

L’étude de phase II randomisée publiée récemment dans Lancet Oncology par Daniel R Gomez (MD Anderson) a déjà été présentée à l’ASCO en 2016.

Elle évalue la place d’un traitement local de consolidation après un traitement d’induction chez des patients présentant un CBNPC de stade IV oligométastatique.

Aujourd’hui, les patients dont la tumeur présente une métastase unique surrénalienne, pulmonaire ou cérébrale, en l’absence d’extension médiastinale, bénéficient déjà d’un traitement local sur les deux sites (tumeur primitive et site métastatique). Avec le développement de la radiothérapie stéréotaxique, cette attitude s’est étendue aux patients présentant 3 voire 5 métastases cérébrales pour certaines équipes.

Les traitements locaux représentent aussi une alternative admise par différentes sociétés savantes chez les patients présentant un CBNPC avec mutations addictives, en progression sur un seul site métastatique.

Ici le contexte est différent. Il ne s’agit pas d’un site métastatique unique ni de progression localisée chez des tumeurs mutées EGFR ou réarrangées ALK. Il s’agit d’un traitement local chez des patients en réponse ou stable après traitement d’induction et présentant au maximum trois métastases. On note 1/ Le nombre de métastases est évalué par les auteurs après traitement d’induction et non au diagnostic ; 2/ En cas d’atteinte ganglionnaire thoracique (que ce soit N1 ou N2 ou N3), le site ganglionnaire « compte pour un seul site métastatique ».

Le rationnel est limité. Les auteurs partent de l’hypothèse qu’après une chimiothérapie d’induction, les sites de progression sont le plus souvent les sites tumoraux initiaux. En conséquence, optimiser le traitement local pourrait améliorer la PFS voire l’OS.

Quoiqu’il en soit le sujet est très intéressant et propre à déclencher les passions.

Néanmoins, la lecture attentive de l’article révèle quelques limites méthodologiques et la portée des résultats en est donc limitée.

Les auteurs ont choisi une randomisation 1 : 1 selon la méthode de Pocock et Simon soit une procédure de minimisation dont le bien fondé est remis en question. En effet, le caractère aléatoire de la répartition des traitements est compromis (pas de stratification, la recherche d’équilibre se fait a priori).

Initialement, la randomisation avait lieu après le traitement d’induction (au moins 4 cycles de chimiothérapie ou 3 mois de TKI) mais après amendement, la randomisation pouvait être faite plus précocement.

L’objectif principal est la survie sans progression mais les scanners n’ont pas été revus de façon centralisée.

L’hypothèse statistique requérait l’inclusion de 94 patients. Finalement 49 l’ont été du fait d’un arrêt avant l’analyse intérimaire programmée à 44 évènements car la différence en terme d’efficacité rendait hautement probable la positivité de l’essai.

Ces patients ont été inclus sur 3 ans alors que les critères d’inclusion étaient théoriquement très larges et que trois gros centres participaient. Je pense qu’il s’agit donc de patients plus sélectionnés que le laissent prédire les critères énoncés.

D’autre part, la population de l’étude est très hétérogène :

- tumeurs avec mutations addictives (bien réparties dans les deux bras concernant les mutations d’EGFR mais 2 tumeurs avec réarrangement de ALK uniquement dans le bras « traitement local de consolidation ») et sans mutations addictives

- tumeurs en réponse ou stables après traitement d’induction

- PS 0 à 2

- métastases synchrones et métachrones

J’ajoute que le bilan initial et après traitement d’induction ne comprenait pas systématiquement une TEP et une imagerie cérébrale.

Enfin, dans le bras traitement de maintenance, plusieurs patients ne recevaient pas de traitement de maintenance et dans le bras traitement local de consolidation, certains recevaient une maintenance et d’autres non. La « contamination » entre les bras ne s’arrête pas là. Des patients du bras maintenance ont eu un traitement local avant randomisation, notamment cérébral, si cela était indiqué et en cas de progression dans le bras maintenance un traitement local était possible.

Quels sont les résultats ?

Les médianes de PFS sont significativement différentes : 11,9 mois (bras traitement local) vs 3,9 mois (bras traitement de maintenance). On note que la PFS du bras traitement de maintenance ici est identique à celle  du bras traitement de maintenance par pemetrexed dans l’étude Paramount (étude commentée sur le site en mars 2012).

La PFS à 1 an est plus que doublée dans le bras traitement local (48% vs 20%).

La toxicité est acceptable (pas de grade 4 ni 5).

Les données sur la qualité de vie se sont avérées inexploitables du fait d’une mauvaise compliance.

Cette étude ne permet évidemment pas de changer nos pratiques. Nous devons attendre une phase III, plus solide méthodologiquement.

 

 

Reference

Local consolidative therapy versus maintenance therapy or observation for patients with oligometastatic non-small-cell lung cancer without progression after first-line systemic therapy: a multicentre, randomised, controlled, phase 2 study.

Gomez DR, Blumenschein GR Jr, Lee JJ, Hernandez M, Ye R, Camidge DR, Doebele RC, Skoulidis F, Gaspar LE, Gibbons DL, Karam JA, Kavanagh BD, Tang C, Komaki R, Louie AV, Palma DA, Tsao AS, Sepesi B, William WN, Zhang J, Shi Q, Wang XS, Swisher SG, Heymach JV.

Lancet Oncol 2016; 17 : 1672-1682

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