Journal of Thoracic Oncology

La présence de co-mutations STK11 et KEAP1 influe-t-elle les résultats du traitement par immunothérapie ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mars 2022

Immunothérapie, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs, KRAS

Le rôle des anomalies moléculaires oncogéniques dans la réponse aux inhibiteurs de point de contrôle immunitaire se précise au fil du temps. Certaines de par leur caractère peu immunogène (EGFR, ALK, ROS1) sont depuis longtemps considérées comme de mauvais candidats pour des monothérapies par inhibiteur de checkpoint (et ainsi exclus des essais cliniques), tandis que d’autres (comme BRAF ou KRAS) ne semblent pas impacter sur l’efficacité de l’immunothérapie, que le gène soit muté ou sauvage. 

Certaines co-mutations gardent toutefois un rôle mal connu comme STK11 ou KEAP1. C’est l’objet de cette publication qui reprend les données de plusieurs séries de patients ayant ou non une mutation de KRAS, et porteurs de (co) mutations STK11 et KEAP1, traités par inhibiteurs de points de contrôles immunitaires. 

Au total, ce sont 1261 patients qui ont été analysés (dans une première cohorte d’abord (n=620) issus du Dann Farber Cancer center et du Massachusetts General Hospital, puis dans une cohorte de validation (n=641) à partir de séries du Memorial Sloan Kettering et du MD Anderson Cancer center. On retrouve ainsi des co-mutations KRAS/STK11, KRAS/KEAP1, et STK11/KEAP1 dans respectivement 10.9% (138/1261), 8.4% (101/1202), et 9.4% (113/1202) des patients. Il ressort que les patients mutés STK11 et KEAP1 ont une expression significativement inférieure de PDL1 dans les deux cohortes, alors que les patients KRAS mutés ont une expression supérieure de PDL1. Lorsque l’on regarde l’impact des co-mutations en fonction du statut KRAS, on retrouve que STK11 a un taux de PDL1 significativement inférieur quel que soit le statut de KRAS, alors que KEAP1 n’a d’impact que chez les patients KRAS mutés et pas chez les KRAS sauvages. 

 

Lorsque l’on s’intéresse au devenir des patients (PFS et OS). Le rôle délétère de STK11 se retrouve pour l’ensemble des patients des deux cohortes mais semble largement drivé par les patients KRAS mutés. Dans cette sous population, la co-mutation avec STK11 est associée à une moins bonne réponse au traitement, une moins bonne médiane de PFS (p=0.01) et une moins bonne OS (p=0.002). Ceci n’est pas retrouvé chez les patients KRAS sauvages. On notera également que l’impact de STK11 chez les KRAS mutés, est indépendant du niveau d’expression de PDL1 (<1%, 1-49% ou >50%). 

Concernant KEAP1, là encore c’est chez les KRAS mutés que l’impact est significativement délétère avec une moins bonne PFS (p<0.0001) et une moins bonne OS (p<0.0001). On note cette fois que ce sont les patients ayant un niveau d’expression de PDL1<50% qui sont le plus impactés. 

On notera toutefois que pour évaluer l’éventuel rôle pronostique de ces comutations, les auteurs ont regardé le devenir sous chimiothérapie à base de platine chez une population de 248 patients. On retrouve la même chose, à savoir un rôle délétère de STK11 et KEAP1 en matière de PFS et d’OS uniquement chez les patients KRAS mutés. 

Les auteurs ont également veillé à exclure les patients EGFR mutés ou ALK réarrangés, ainsi que les non-fumeurs, qui auraient pu modifier négativement les résultats parmi les patients KRAS sauvages. Ces exclusions ne changent pas les résultats. 

Il s’agit d’une étude très intéressante qui confirme que STK11 et KEAP1 sont des mutations fréquentes qui peuvent définir des sous types différents de patients mutés KRAS et qui conduisent à un moins bon devenir sous immunothérapie. Parmi les explications de ces résultats inférieurs, on peut noter la diminution de l’expression du CMH de classe 1 chez les patients mutés KRAS et STK11. D’autres hypothèses évoquent le rôle de l’interféron et de différentes cytokines. Même si les explications physiopathologiques restent débattues, ces données pourraient permettre de mieux préciser le design des futurs essais cliniques pour les meilleurs choix de traitements. 

Reference

Diminished Efficacy of Programmed Death-(Ligand)1 Inhibition in STK11- and KEAP1-Mutant Lung Adenocarcinoma Is Affected by KRAS Mutation Status.

Ricciuti B, Arbour KC, Lin JJ, Vajdi A, Vokes N, Hong L, Zhang J, Tolstorukov MY, Li YY, Spurr LF, Cherniack AD, Recondo G, Lamberti G, Wang X, Venkatraman D, Alessi JV, Vaz VR, Rizvi H, Egger J, Plodkowski AJ, Khosrowjerdi S, Digumarthy S, Park H, Vaz N, Nishino M, Sholl LM, Barbie D, Altan M, Heymach JV, Skoulidis F, Gainor JF, Hellmann MD, Awad MM.J

J Thorac Oncol 2022; 17 : 399-410

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
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