New England Journal of Medicine

L’hétérogénéité tumorale de plus en plus complexe

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
avril 2012

Thérapeutique ciblée, Anatomo-pathologie

 

L’hétérogénéité parmi un type histologique de tumeur est connue depuis longtemps et prise en compte récemment dans les options thérapeutiques, un exemple en est l’utilisation chez les patients porteurs d’un adénocarcinome pulmonaire des inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR   en fonction de l’existence de mutations cibles ou au contraire excluant cette option thérapeutique  du fait par exemple d’une mutation de Ki-Ras

Une hétérogénéité entre tumeur primitive et métastases, commence à peine à être prise en compte bien que connue également depuis longtemps. La complexité est en effet difficile à intégrer mentalement : des schémas simples souvent binaires ont été et sont encore privilégiés comme mécanismes opératoires (gauche/droite, carcinome à petite cellule/carcinome non à petites cellules…) mais le développement actuel  d’ outils puissants, en particulier informatiques,  permet d’aborder cette complexité intratumorale avec efficacité. Cet article en est un exemple majeur et bien que concernant le cancer du rein, ouvre le champ de ce qui sera très prochainement le mode d’approche de la biologie des carcinomes pulmonaires ! 

L’étude a porté sur des prélèvements de 4 patients porteurs d’un cancer à cellules claires du rein en utilisant trois types d’outils: le séquençage complet des exomes, l’analyse des aberrations chromosomiques et l’évaluation de la ploïdie. Les conclusions ont été globalement les mêmes pour ces 4 patients. L’un d’eux est particulièrement informatif : ont été étudiés les biopsies initiales de la tumeur rénale et d’une métastase pariétale ainsi que 9 régions de la tumeur primitive après néphrectomie, une métastase de la graisse périrénale et deux prélèvements de la métastase pariétale après chirurgie. En considérant les 128 mutations répertoriées, seules 49 (38%) avaient une distribution ubiquitaire (dont celle portant sur VHL caractéristique des cancers à cellules claires du rein), 59 (46%) mutations retrouvées dans plusieurs prélèvements mais pas tous et 29 (23%) mutations présentes dans un seul site témoignant d’une évolution clonale localisée. En utilisant les méthodes d’analyse des spécialistes de l’évolution des espèces il a été possible de dresser l’arbre phylogénétique et de montrer une émergence de la  complexité tumorale non pas linéaire mais  par étapes branchées (branched evolution) : dans une des tumeurs étudiée à partir de la branche initiale,  2 branches se sont individualisées puis  4 branches filles sur l’une et  8 branches filles sur l’autre, les métastases dérivant d’une des 2 branches.

L’analyse du prélèvement biopsique initial n’a pu retrouver que 70 (55%) des mutations décrites pour l’ensemble de la tumeur. Des résultats de même type ont été obtenus après analyse des signatures transcriptomiques de bon et mauvais pronostic sur plusieurs sites tumoraux ce qui démontre qu’une biopsie unique ne peut pas être représentative des  anomalies génomiques d’une tumeur.  Ce court résumé ne reflète qu’une fraction des riches données obtenues par ce travail.

En  conclusion  une tumeur constitue donc une véritable mosaïque, ce qui est un défi majeur pour la mise au point de biomarqueurs et l’indication des traitements ciblés « à la carte » ( traitements personnalisés). Ainsi selon les auteurs, l’hétérogénéité génomique intratumorale associée à l’hétérogénéité fonctionnelle des protéines exprimées est un facteur  de promotion pour l’adaptation de la tumeur et sa résistance aux traitements par  des mécanismes darwiniens de sélection.

Reference

Intratumor heterogeneity and branched evolution revealed by multiregion sequencing.

Gerlinger M, Rowan AJ, Horswell S, Larkin J, Endesfelder D, Gronroos E, Martinez P, Matthews N, Stewart A, Tarpey P, Varela I, Phillimore B, Begum S, McDonald NQ, Butler A, Jones D, Raine K, Latimer C, Santos CR, Nohadani M, Eklund AC, Spencer-Dene B, Clark G, Pickering L, Stamp G, Gore M, Szallasi Z, Downward J, Futreal PA, Swanton C.

N Engl J Med. 2012; 366 : 883-92.

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