Journal of Clinical Oncology

L’irradiation prophylactique cérébrale des CBNPC de stade III diminue-t-elle le nombre de métastases cérébrales symptomatiques ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juillet 2018

Radiothérapie / Radiofréquence, Traitement des stades III, Métastases cérébro-ménagées

Parce que l’incidence des métastases cérébrales chez les patients qui ont un cancer bronchique non à petites cellules de stade III est élevée (l’incidence cumulative est d’environ 30% à 2 ans), depuis longtemps l’idée de proposer à ces malades une irradiation prophylactique cérébrale comme dans les cancers bronchiques à petites cellules chemine dans les esprits de beaucoup d’auteurs. Plusieurs études ont été menées qui ont montré que, si l’irradiation prophylactique cérébrale était capable de réduire la fréquence des métastases cérébrales, elle ne prolongeait pas significativement la survie globale. Est-elle au moins capable de réduire le nombre de métastases cérébrales symptomatiques dont on sait qu’elles ont de graves conséquences sur la qualité de vie ? 

C’est la question que pose cette étude de phase III randomisée hollandaise qui porte sur des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules de stade III dont le bilan initial comporte soit un scanner soit une IRM de l’encéphale. 

Après radiochimiothérapie et éventuellement chirurgie, ils étaient randomisés en deux bras : irradiation prophylactique cérébrale ou observation. L’irradiation prophylactique cérébrale devait débuter au plus tard 6 semaines après la dernière administration de chimiothérapie. Les patients recevaient 30 à 36 Gy en 12 à 18 fractions au choix des hôpitaux qui participaient à l’étude. Les facteurs de stratification utilisés pour la randomisation étaient l’histologie, le PS, la chirurgie et le centre.

L'objectif principal était le nombre de métastases cérébrales symptomatiques ;

Alors qu’il était prévu d’inclure en 2 ans 300 patients pour détecter une diminution des métastases cérébrales symptomatiques de 17% à 2 ans, 6 ans ont été finalement nécessaires pour randomiser seulement 175 patients car beaucoup de patients à la fin de la radiochimiothérapie estimaient que ce traitement était trop lourd et refusaient l’inclusion. 

Résultats

Six (7%) des 87 patients du bras irradiation prophylactique cérébrale ont développé des métastases cérébrales symptomatiques contre 24 (27%) des 88 patients du bras contrôle, dans les 2 ans qui suivaient le traitement. Cette différence était significative (p<0,001). De même l’irradiation prophylactique cérébrale retardait significativement le temps d’apparition de métastases cérébrales symptomatiques (HR =  0,23  [95% CI, 0,09-0,56].  Cette différence était également significative (p=0,0012). 

Par ailleurs des métastases cérébrales asymptomatiques ont été découvertes chez 4 patients, 1 dans le bras radiothérapie et  3 dans le bras contrôle. 

Pour aucun des facteurs de stratification (histologie, PS et chirurgie) l’effet de l’irradiation prophylactique cérébrale était différent. 

Les effets cognitifs et sur la mémoire étaient significativement plus fréquents dans le bras radiothérapie mais cette différence ne concernait que les effets de grades 1 et 2. 

Avec un suivi médian de 51 et 60 mois, la survie médiane des patients du bras expérimental était plus longue que celle des patients du bras contrôle (24,2 mois vs 21,9 mois) mais cette différence n’était pas significative. 

La qualité de vie, identique au départ, était à 3 mois significativement altérée chez les patients du bras radiothérapie. A 6, 12 et 18 mois, elle était similaire et de 24 à 48 mois, elle était un peu meilleure, mais de façon non significative, dans le bras standard. 

Cette étude a atteint son objectif principal puisqu’elle démontre que l’irradiation prophylactique cérébrale diminue significativement le taux de métastases cérébrales symptomatiques. Toutefois, trois points qui viennent nuancer ces résultats sont à retenir :

1)   Comme dans les autres études la survie n’est pas significativement augmentée comme elle l’est chez les patients atteints de cancer bronchique à petites cellules localisé qui reçoivent une irradiation prophylactique cérébrale. 

2)   Ce traitement n’a pas une toxicité de grade 3-5 importante. 

3)   Enfin, ce traitement détériore la qualité de vie à 3 mois mais ne l’améliore pas ensuite. 

Ces résultats sont-ils suffisants pour changer nos pratiques en proposant une irradiation prophylactique cérébrale aux malades qui ont terminé le traitement de leur cancer bronchique non à petites cellules de stade III. Probablement pas, d’autant que les standard de traitement inclue maintenant une immunothérapie par durvalumab dont on sait qu’elle double presque le temps médian jusqu’au décès ou à l’apparition de métastases (cliquer ici)   et qu’on ne dispose d’aucune donnée sur la chronologie qu’il faudrait proposer. 

 

 

Reference

Prophylactic Cranial Irradiation Versus Observation in Radically Treated Stage III Non-Small-Cell Lung Cancer: A Randomized Phase III NVALT-11/DLCRG-02 Study.

De Ruysscher D, Dingemans AC, Praag J, Belderbos J, Tissing-Tan C, Herder J, Haitjema T, Ubbels F, Lagerwaard F, El Sharouni SY, Stigt JA, Smit E, van Tinteren H, van der Noort V, Groen HJM.

J Clin Oncol2018. [Epub ahead of print]

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