Clinical Lung Cancer

Métastases cérébrales et immunothérapie par pembrolizumab : une étude rétrospective

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
février 2021

Immunothérapie, Métastases cérébro-ménagées

Le pembrolizumab est devenu un standard de prise en charge des cancers bronchiques non à petites cellules, avec ou sans chimiothérapie, selon le niveau d’expression de PDL1. Les métastases cérébrales sont souvent présentes (jusqu’à 30 voire 40% selon les séries) parmi les stades IV de cancer non à petites cellules. Le rôle du pembrolizumab dans ces situations semble donc important à définir, d’autant que les seuls éléments disponibles sur le sujet sont issus d’analyses en sous-groupes non planifiées des essais princeps ayant inclus des patients très sélectionnés. L’article rapporté ici est une analyse rétrospective mono-centrique concernant les patients de la vraie vie, pris en charge dans un hôpital de Pennsylvanie (USA) entre 2013 et 2018 et traités par pembrolizumab quelle que soit la ligne, avec ou sans chimiothérapie. Au total ce sont 587 patients identifiés, dont 570 analysables qui sont rapportés. Parmi eux, 384 (67.4%) ont reçu le pembrolizumab en première ligne et 334 (58.6%) patients l’ont reçu en monothérapie quelle que soit la ligne. On retrouve 126 (22%) patients ayant des métastases cérébrales (MC) à l’instauration du pembrolizumab. Ces patients avec métastases cérébrales, comparés à ceux n’ayant pas de MC, étaient significativement plus jeunes (âge médian, 66 vs. 68 ans; P < 0.01) avec plus souvent un adénocarcinome (84.9% vs. 71.6%; P 0.010), avec plus souvent une mutation d’EGFR (12.5% vs. 3.8%; P < 0.001), plus souvent un recours aux corticostéroïdes (21.4% vs. 0.9%; P < 0.001). En revanche on ne note pas de différence pour ce qui concerne l’ethnie, le tabagisme, le sexe, le PS, la ligne de traitement, le traitement lui-même ou l’expression de PDL1.  

Parmi les 126 patients avec MC, 96 (76.2%) avaient été prétraités au niveau cérébral. Ceux qui n’ont pas été traités (n=30) étaient volontiers plus âgés (âge médian, 68 vs. 64 ans; P= 0.031), plus souvent en ECOG PS 2 ou plus (33.3% vs. 12.5%; P= 0.026), et étaient plus souvent traités par pembrolizumab en première ligne (83.3% vs. 58.3%; P =0.013). 

En termes d’efficacité, après un suivi médian de 15.4 mois (0.1-78.4 mois), les taux de réponses systémiques étaient de 29.3% au total et ne différaient pas chez les patients avec MC (27.8% vs. 29.7% sans MC; P=0.671). Les PFS et OS n’étaient pas différentes non plus entre patients avec ou sans MC à respectivement 9.2 et 7.7 mois (P=0.609) et 18.0 et 18.7 mois (P=0.966). En analyse multivariée, la présence de métastases cérébrales n’est pas associée à une moins bonne PFS (HR 1.000; P= 1.000) ni OS (HR, 1.019; P =0.896).

A noter néanmoins qu’en analyse exploratoire, les patients ayant des MC non prétraitées, avaient des PFS et des OS numériquement très inférieures aux patients prétraités (médianes de PFS de 5.0 versus 11.1 mois; P=0.051 et médianes d’OS de 11.2 versus 23.6 mois; P=0 .104) même si les différences n’atteignent pas un niveau de significativité. La corticothérapie supérieure à 10 mg/j au moment de l’instauration du pembrolizumab dans cette série n’est pas associée à une moins bonne survie. 

L’absence d’impact sur la survie des métastases cérébrales dans cette analyse rétrospective contraste un peu avec les données plus anciennes de la littérature avant l’arrivée de l’immunothérapie. Les auteurs évoquent comme explication potentielle, les progrès récents dans l’imagerie qui amènent à plus de découverte de métastases cérébrales de plus petite taille et de meilleur pronostic (effet Will Rogers). Même si dans les essais princeps, les métastases cérébrales sont peu représentées, les analyses poolées des essais Keynote (avec le pembrolizumab), et les données du programme d’accès précoce du Nivolumab en Italie, confirment que les inhibiteurs de point de contrôle immunitaires ont une action sur les localisations du SNC avec un profil de toxicité acceptable mais dans ces séries les métastases cérébrales devaient être asymptomatiques sans corticostéroïdes >10mg. La corticothérapie nécessaire dans un grand nombre de cas en vraie vie constitue une contre-indication très relative à l’instauration des IO. On notera également que dans la présente série, 17 patients ont reçu une radiothérapie alors que le pembrolizumab avait déjà débuté. Cela n’a posé aucun problème de tolérance. 

Il s’agit d’une étude mono-centrique avec des patients très hétérogènes (métastases prétraitées ou non, pembrolizumab en première ligne ou au delà, en mono thérapie ou en association à la chimiothérapie….) mais elle apporte des données plutôt rassurantes sur l’utilisation des IO chez ces patients en vraie vie. 

Reference

Outcomes in Patients With Non-small-cell Lung Cancer With Brain Metastases Treated With Pembrolizumab-based Therapy.

Sun L, Davis CW, Hwang WT, Jeffries S, Sulyok LF, Marmarelis ME, Singh AP, Berman AT, Feigenberg SJ, Levin W, Ciunci CA, Bauml JM, Cohen RB, Langer CJ, Aggarwal C.

Clin Lung Cancer 2021;  22 : 58-66

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