KEYNOTE-042 est une étude de phase III qui compare en première ligne chez des patients dont au moins 1% des cellules expriment PD-L1 le pembrolizumab en monothérapie à une chimiothérapie.
Méthodes
Pour être éligibles à cette étude internationale et multicentrique, à promotion industrielle, les patients devaient avoir un cancer bronchique non à petites cellules de stade avancé ou métastatique, sans mutation activatrice de l'EGFR ou translocation ALK-EML4 et un PS à 0 ou 1. Ils ne devaient pas avoir de métastases cérébrales non traitées ou évolutives, de pneumopathies non infectieuses traités par corticothérapie, de maladies auto-immunes traitées par immunosuppresseurs ou d’antécédents d’hépatite B ou C.
Ils étaient randomisés pour recevoir :
- Soit du pembrolizumab à 200 mg/m2, jusqu’à un maximum de 35 cycles.
- Soit une chimiothérapie comportant au choix de l’investigateur du carboplatine AUC 5 ou 6 et soit du paclitaxel à 200 mg/m2, soit du pemetrexed à 500 mg/m2. Quatre à 6 cycles de ce traitement étaient administrés sauf en cas de progression ou toxicité et une chimiothérapie de maintenance par pemetrexed était optionnelle mais encouragée pour les patients qui avaient un cancer non épidermoïde. Le crossover de la chimiothérapie vers le pembrolizumab n’était pas autorisé.
Les objectifs ont été modifiés trois fois au cours de l’essai :
- Au début en 2014, l’objectif principal était la survie chez les patients exprimant PD-L1 à au moins 50%. Les objectifs secondaires étaient la survie chez les patients exprimant PD-L1 à au moins 1% et la survie sans progression chez les patients exprimant PD-L1 à au moins 50% et au moins 1%. Un objectif exploratoire était la survie et la survie sans progression chez les patients exprimant PD-L1 à plus de 1% et moins de 50%.
- En 2015 deux objectifs principaux ont été retenus : la survie globale chez les patients exprimant PD-L1 à au moins 50% et au moins 1%.
- En 2017 trois objectifs principaux ont été retenus : la survie globale chez les patients exprimant PD-L1 à au moins 50%, à au moins 20% et au moins 1%.
Résultats
Parmi 3428 patients screenés, 637 ont été randomisés dans le bras pembrolizumab et 637 dans le bras chimiothérapie. La répartition dans les 3 groupes définis par le statut PD-L1 était très proche : environ les 2/3 exprimaient PD-L1 et 1/3 l’exprimaient à plus de 50%.
Les chiffres de survie sont résumés dans le tableau ci-dessous :
| Durées médianes de survie (mois) | HR (95% CI) | p |
| Pembrolizumab | Chimiothérapie | | |
PD-L1≥ 50% | 20 | 12,2 | 0,69 (0,56–0,85) | 0,003 |
PD-L1≥ 20% | 17,7 | 13 | 0,77 (0,64–0,92) | 0,002 |
PD-L1≥ 1% | 16,7 | 12,1 | 0,81 (0,71–0,93) | 0,0018 |
PD-L1 >1 et < 50% | 13,4 | 12,1 | 0,92 (0,77–1,11) | - |
Ainsi, que le statut PD-L1 soit supérieur à 50, 20, ou 1%, l’immunothérapie permettait d’obtenir des chiffres de survie significativement supérieurs.
On voit aussi sur ce tableau qu’en ce qui concerne l’objectif exploratoire de l’analyse de la survie chez les patients qui exprimaient PD-L1 à plus de 1% et moins de 50%, il n’y avait pas de différence significative de survie entre les malades traités par immunothérapie et ceux qui étaient traités par chimiothérapie.
Les survie sans progression médianes des patients qui exprimaient PD-L1 à au moins 50%, à au moins 20% et au moins 1% étaient respectivement à 7,1 vs 6,4 mois, 6,2 vs 6,6 mois et 5,4 vs 6,5 mois.
Les taux de réponse des patients qui exprimaient PD-L1 à au moins 50%, à au moins 20% et au moins 1% étaient respectivement à 39 vs 32%, 33 vs 29% et 27 vs 27%.
Des événements secondaires rapportés au traitement de grade ≥3 sont survenus chez 18% des patients du bras pembrolizumab et 41% de ceux du bras chimiothérapie et ceux de grade 5 sont survenus chez 2% des patients des 2 groupes.
Les conclusions des auteurs de cette étude sont que le pembrolizumab prolonge significativement la survie de tous les patients qui expriment PD-L1 au prix d’une toxicité inférieure à celle de la chimiothérapie.
Deux commentaires peuvent être faits :
- Les durées médianes de survie des patients exprimant PD-L1 à au moins 50% sont très nettement inférieures à celles qui ont été observées dans l’étude KEYNOTE-024 : dans l’étude KEYNOTE-042 la durée médiane de survie était dans le bras immunothérapie à 20 mois, alors qu’elle est à 30 mois dans l’étude KEYNOTE-024 . De même elle est à 12,2 mois dans le bras chimiothérapie vs 14,2 mois dans l’étude KEYNOTE-024 (cliquer ici). L’explication de cette différence pour les patients du groupe chimiothérapie est probablement liée au fait que les patients de l’étude KEYNOTE-042 avaient moins accès en deuxième ligne à l’immunothérapie et cela pour 2 raisons : 1) le crossover pour le pembrolizumab était permis dans KEYNOTE-024 et interdit dans KEYNOTE-042 ; et 2) KEYNOTE-042 a été réalisée dans des régions moins favorisées où les patients avaient moins accès à l’immunothérapie en deuxième ligne. Ainsi 20% des malades du bras chimiothérapie de KEYNOTE-042 ont reçu ultérieurement une immunothérapie contre 64% de ceux de l’étude KEYNOTE-024. L’explication de la forte différence de survie des patients du bras immunothérapie est moins claire … Il est possible que le fait qu’il y ait nettement plus de patients atteints de cancer épidermoïde dans l ‘étude KEYNOTE-042 (36-38 % dans le bras pembrolizumab et 38-39% dans le bras chimiothérapie) que dans l’étude KEYNOTE-024 (19 et 18%) explique, au moins en partie, ces résultats.
- Ces résultats ne permettent pas, nous semble-t-il, de faire de l’immunothérapie un standard de traitement de tous les patients exprimant PD-L1. Certes la survie des patients exprimant PD-L1 à au moins 1% est significativement supérieure sous immunothérapie mais cela doit être nuancé par le fait que, chez les patients qui exprimaient PD-L1 à plus de 1% et moins de 50%, il n’y avait pas de différence significative de survie entre les malades traités par immunothérapie et ceux qui étaient traités par chimiothérapie.
Reference
Pembrolizumab versus chemotherapy for previously untreated, PD-L1-expressing, locallyadvanced or metastatic non-small-cell lung cancer (KEYNOTE-042): a randomised, open-label, controlled, phase 3 trial.
Mok TSK, Wu YL, Kudaba I, Kowalski DM, Cho BC, Turna HZ, Castro G Jr, Srimuninnimit V, Laktionov KK, Bondarenko I, Kubota K, Lubiniecki GM, Zhang J, Kush D, Lopes G; KEYNOTE-042 Investigators.
Lancet 2019; 393 : 1819-1830