Journal of Clinical Oncology

Peut-on administrer du Pembrolizumab dans les jours qui suivent une radiothérapie stéréotaxique ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
février 2018

Immunothérapie, Radiothérapie / Radiofréquence

Plusieurs arguments suggèrent une potentielle synergie de l’immunothérapie et de la radiothérapie : l’infiltration de cellules T causée par la radiothérapie expliquerait en partie cette synergie lorsque la radiothérapie précède l’immunothérapie. Cependant, il y a aussi beaucoup d’arguments pour penser que la toxicité pourrait être également augmentée du fait de l’addition de deux traitements qui ont des toxicités identiques (le poumon en est un exemple).

L'objectif principal de cette étude académique de phase I menée à Chicago était de définir la dose de radiothérapie recommandée sur les lésions recevant une radiothérapie stéréotaxique . Les objectifs secondaires étaient notamment de recenser les effets adverses de grade ≥3, les taux de réponse, la survie sans progression et la survie.

Pour être inclus les patients devaient avoir un PS ≤ 1, une tumeur solide ayant déjà été traitée par un traitement standard, au moins deux métastases et quatre au maximum de taille ≤ 65 ml (5 cm maximum de diamètre). La présence de métastases cérébrales et d’antécédents de pneumopathie non-infectieuse nécessitant des corticoïdes étaient des facteurs de non-inclusion.

Les patients antérieurement traités par immunothérapie ou radiothérapie (à doses faibles) pouvaient être inclus.   

Les doses de radiothérapie étaient fixées à :

  • 45 Gy en 3 fractions pour le poumon périphérique, le foie, l’abdomen et le pelvis.
  • 50 Gy en 3 fractions pour le poumon central, le médiastin et le cou.
  • 30 Gy en 3 fractions pour l’os et la moelle épinière.

Le pembrolizumab était administré à 200 mg iv toutes les 3 semaines et commencé dans les 7 jours qui suivaient la dernière dose de radiothérapie.

Résultats

Sur 79 patients inclus, 73 ont reçu la radiothérapie et au moins un cycle d’immunothérapie. Ils avaient en moyenne 62 ans, étaient dans 60% des cas des femmes.

Les principaux sites des cancers primitifs étaient des cancers de l’ovaire (n=9), des cancers bronchiques non à petites cellules (n=7), des cancers du sein (n=6), des cholangicarcinomes (n=6), des cancers de l’endomètre (n=6), des cancers du colon ou du rectum (n=5), des cancers de la tête du cou (n=4). Vingt autres types de cancers primitifs ont été inclus.

Presque tous les patients (69/73) avaient deux métastases traitées par radiothérapie stéréotaxique , 3 en avaient 3 et 1 en avait 4. Le tiers avaient leurs métastases confinées dans un organe et les deux autres tiers dans 2 organes ou plus. En tout, 151 métastases ont été traitées chez ces 73 patients dont la majorité étaient thoraciques.

Les toxicités sévères rapportées au traitement ont été décrites par cohortes de patients selon le siège des métastases traitées par radiothérapie stéréotaxique pour tous les 73 patients et séparément pour ceux dont la toxicité était évaluable à au moins 3 mois (n=62).

Six toxicités ainsi définies ont été décrites chez ces malades avec notamment :

  • 1/12 pour le poumon périphérique,
  • 2/11 pour le poumon central,
  • 1/11 pour le médiastin,
  • 0/10 pour le foie,
  • 1/11 pour la moelle épinière
  • 0/8 pour l’os et 1/10 pour l’abdomen et le pelvis.

La liste complète des toxicités liées au traitement de grade ≥ 2 est indiquée sur un tableau. Définies à partir de la nomenclature officielle (CTCAE), on verra qu’elles sont extrêmement variées et que le lien de certaines avec le traitement est un peu inattendu. Les pneumo-oncologues noteront que 3 seulement intéressent l’appareil respiratoire.

Neuf réponses dont une complète ont été observées (13,2%) et il est intéressant de noter que les pourcentages de réduction des diamètres des métastases étaient beaucoup plus importants lorsque celles-ci avaient été irradiées (-21,7%) que lorsqu’elles ne l’avaient pas été (1,7%). Cette différence était significative (p=0,0008).

La survie sans progression médiane était de 3,1 mois et la survie médiane de 9,6 mois.

Cette étude a plusieurs limites dont notamment la non sélection des patients sur leur statut PD-L1  et la très grande hétérogénéité des cas traités avec 27 sièges de cancers primitifs. On regrette aussi que les toxicités qui sont considérées comme liées  ne soient décrites que sur les catégories de la CTCAE et ne donnent pas lieu à une description plus proche de la clinique permettant au lecteur de mieux se faire une idée précise des toxicités observées. Il y a par exemple 46 « general disorders and administration sites » de grade 1 et 2 et 4 de grade ≥3 : il est difficile de bien comprendre ce que signifient ces 54 effets adverses.

Néanmoins, cette étude apporte des arguments pour penser  qu’il semble possible d’administrer du pembrolizumab dans la semaine qui suit une radiothérapie stéréotaxique administrée avec les doses et le fractionnement  définis plus haut  sur différents organes (à l’exception du cerveau non inclus dans cette étude) sans qu’un excès de toxicité ne soit observé. La prudence toutefois est d’attendre que d’autres études viennent conforter ces résultats.

 

Reference

Safety and Clinical Activity of Pembrolizumab and Multisite Stereotactic Body Radiotherapy in Patients With Advanced Solid Tumors.

Luke JJ, Lemons JM, Karrison TG, Pitroda SP, Melotek JM, Zha Y, Al-Hallaq HA, Arina A, Khodarev NN, Janisch L, Chang P, Patel JD, Fleming GF, Moroney J, Sharma MR, White JR, Ratain MJ, Gajewski TF, Weichselbaum RR, Chmura SJ.

J Clin Oncol 2018 Feb 13  [Epub ahead of print]

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