Lancet Respiratory Medicine

Peut-on se contenter de l’ADN circulant pour engager un traitement par TKI de l’EGFR ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
septembre 2018

Thérapeutique ciblée, EGFR, Biomarqueurs / Facteurs pronostiques et/ou prédictifs

Si on dispose de plusieurs études qui ont validé la recherche de mutations de l’EGFR sur l’ADN circulant, on ne dispose pas en revanche d’études validant cette méthode comme une technique de sélection pour la mise en œuvre d’un traitement par inhibiteur de la tyrosine kinase.  Le but de cette étude de phase II prospective et multicentrique chinoise est d’évaluer l’efficacité du gefitinib chez des patients présentant une mutation de l’EGFR dont le diagnostic a été fait sur l’ADN plasmatique. L'objectif principal est le taux de réponse qui devait se situer autour de 72%, soit entre 65 et 79% pour que l’étude soit positive. Les principaux objectifs secondaires sont la survie sans progression, la survie globale et la toxicité. Il était également prévu de comparer les résultats des prélèvements tissulaires et plasmatiques. 

En un peu plus d’un an, 426 patients ont été screenés  dont 391 avaient à la fois des échantillons tissulaires et plasmatiques. Cent quatre vingt huit qui avaient des mutations de l’EGFR dans leur ADN plasmatique ont été traités par gefitinib. Parmi ces derniers, 180 avec les mutations à la fois dans le tissu est dans l’ADN circulant et huit n’avaient des mutations que dans l’ADN circulant. Cent quatre vingt trois ont été inclus dans l’analyse d’efficacité. Tous les patients présentant une mutation de l’EGFR ont été examinés par NGS et ddPCR. 

La recherche de mutation dans le plasma comparée à la recherche tissulaire a une sensibilité de 70%, une spécificité de 93,9% une VPP à 95,8% et une VPN à 61,2% La concordance est de 78,0% . 

Avec un temps de suivi médian de 14,5 mois, sur les 183 patients évalués pour la réponse, 132 ont eu au moins une réponse partielle. Ceci correspond exactement au taux de réponse attendu de 72%. La survie sans progression médiane était de 9,5 mois. 

Par ailleurs 167 patients ont pu avoir une recherche de mutations dans l’ADN plasmatique à 8 semaines de traitement  et les résultats étaient liés à la survie sans progression :

  • Chez les 147 patients chez qui cette recherche était devenue négative, la survie sans progression médiane était à 11 mois.
  • Chez les 20 (12%) dont la recherche restait positive, la survie sans progression médiane était à 2,1 mois. 

Cette différence était significative (p<0,0001). 

Une mutation T790M a été détectée chez environ un tiers des patients observés pendant la durée de l’étude avec un délai d’apparition médian de 7,6 mois,  précédant de 2 mois  la progression.

Tous les 179  patients présentant des mutations de l’EGFR avaient des mutations activatrices. L’examen initial de ces prélèvements initiaux par NGS et PCR a permis d’identifier aussi des mutations de gènes suppresseurs de tumeurs et des « driver mutations ». Trois groupes de patients ont ainsi été constitués : 

  • 58 patients qui avaient uniquement des mutations EGFR : leur survie sans progression médiane était de 13,2 mois.
  • 97 patients présentaient en même temps des mutations de gènes suppresseurs de tumeurs (TP53, RB1, ou PTEN) : leur survie sans progression médiane était de 9,3 mois.
  • Et 24 qui présentaient en même temps des « driver mutations » (MET, ERBB2, KRAS, BRAF, RET, ou ROS1) : leur survie sans progression médiane était de 4,7 mois.

Les données de toxicité étaient celles auxquelles on s’attendait sous gefitinib. 

Ces résultats permettent de confirmer sur une série prospective que la mise en évidence d’une mutation sur l’ADN circulant permet d’engager un traitement par inhibiteur de la tyrosine kinase avec des résultats identiques à ceux des séries dans lesquelles le traitement a été engagé sur les résultats de biopsies. Il n’était pas inintéressant de le vérifier.  On retrouve là des résultats qui vont dans le même sens que ceux obtenus pour la recherche de mutation T790M dans l’ADN plasmatique. Tout le monde est maintenant d’accord pour engager un traitement sur ce seul résultat et n’effectuer une biopsie que chez les malades dont la biopsie liquide est négative. La même attitude pour la recherche de mutations usuelles va-t-elle se développer dans l’avenir ?  Les informations concernant  la valeur pronostique des prélèvements à 8 semaines et de la découverte d’autres mutations  sont aussi particulièrement intéressantes. 

 

 

 

 

 

Reference

Detection of EGFR mutations in plasma circulating tumour DNA as a selection criterion for first-line gefitinib treatment in patients with advanced lung adenocarcinoma (BENEFIT): a phase 2, single-arm, multicentre clinical trial.

Wang Z, Cheng Y, An T, Gao H, Wang K, Zhou Q, Hu Y, Song Y, Ding C, Peng F, Liang L, Hu Y, Huang C, Zhou C, Shi Y, Zhang L, Ye X, Zhang M, Chuai S, Zhu G, Hu J, Wu YL, Wang J.

Lancet Respir Med  2018  [Epub ahead of print]

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