Annals of Oncology

Quelle dose de chimiothérapie faut-il administrer aux patients obèses ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
décembre 2013

Traitement des stades IV

Les habitudes des oncologues concernant la façon d’administrer la chimiothérapie aux patients obèses varient beaucoup. Certains calculent  les doses en fonction de la surface corporelle réelle. D’autres, craignant un excès de toxicité,  réduisent les doses, soit en les calculant à partir de la surface corporelle idéale qu’ils calculent à partir du poids idéal, d’autres calculent les doses à partir de la surface corporelle réelle puis les réduisent de façon arbitraire, d’autres  enfin limitent la surface corporelle à 2 m². Il est certain qu’on peut demander si cette façon de faire est légitime, dans la mesure où le maintien d’un rapport dose/intensité correct est important et dans la mesure où il est possible que les plus mauvais résultats observés quelquefois chez les sujets obèses soient  liés à un sous-dosage thérapeutique.

Pour tenter de répondre à cette question, les auteurs ont effectué une recherche bibliographique à partir des mots suivants : poids corporel, cancer, chimiothérapie et dosage. Pour être éligibles, les études sélectionnées devaient comporter des adultes d’au moins 18 ans, atteints par n’importe quel type de cancer. Ils devaient recevoir une chimiothérapie dans les doses étaient calculées à partir de la surface corporelle réelle, avec un maximum de variabilité de 15 % autour de celle-ci.

Les données devaient être analysées selon deux groupes : les patients obèses (BMI ≥ 30, ou 27 dans certaines séries) et les patients de poids normal ou bas (BMI <25).

Parmi 5490 études analysées, 12 avaient les critères d’inclusion.  Ces  12 études comportaient 9314 patients des deux groupes atteints de 13 différents types de cancers recevant 21 types de chimiothérapie. A noter toutefois que plus de 50% des patients avaient un cancer colorectal et près de 30% un cancer du sein et que de ce fait beaucoup de patients ont reçu du 5-FU ou de la capécitabine.

La toxicité n’était pas significativement différente chez les patients obèses voir même inférieure dans certaines études. De même la survie ne différait pas significativement.

Les conclusions de cet article doivent-elles nous conduire à toujours prescrire, comme le suggèrent les auteurs, des chimiothérapies dont les doses sont calculées à partir de la surface corporelle réelle ? Nous n’en sommes pas certains pour les raisons suivantes :

-       ces études sont presque toutes des études de cohortes pour la plupart rétrospectives et n’ont donc pas le poids des essais randomisés,

-       certaines chimiothérapies utilisées sont peu toxiques,

-       certaines études sont très anciennes, la plus anciennes datent de 1977

-       très peu parmi ces études ont inclus des cancers broncho-pulmonaires,

-       les chimiothérapies sont à grande prédominance le 5-FU et la capécitabine,

-       des variations des doses de 15% étaient autorisées, de sorte qu’une réduction jusqu’à ce chiffre était considérée comme « normale »,

-       enfin, et c’est là le point essentiel, rien ne nous prouve que les malades avaient en moyenne des BMI très élevés : à titre d’exemple nous avons trouvé mention des surfaces corporelles dans une étude,  CALGB 8541,  où les sujets étaient définis comme obèses si leurs BMIs dépassaient 27,3 : dans cette étude la surface corporelle moyenne des obèses est de 1,95, et celui des très obèses de 2,06 ! Ce n’est pas vraiment les surfaces des patients dont nous discutons.

Il est donc certain que nous avons toujours besoin dans ce domaine de recommandations précises.

Reference

Toxic effect of chemotherapy dosing using actual body weight in obese versus normal-weight patients: a systematic review and meta-analysis.

Hourdequin KC, Schpero WL, McKenna DR, Piazik BL, Larson RJ.

Ann Oncol 2013; 24 : 2952-62.

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer