JAMA Oncology

Quelle radiothérapie choisir pour les métastases cérébrales des cancers bronchiques à petites cellules ? FIRE-SCLC une étude de cohorte.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2020

Radiothérapie / Radiofréquence, Métastases cérébro-ménagées

La radiochirurgie est avec la chirurgie l’un des deux standards de traitement des métastases cérébrales. L’association à celle-ci d’une radiothérapie panencéphalique ne prolonge pas significativement la survie et augmente les troubles cognitifs (cliquer ici pour un accès gratuit)   https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2536637?utm_campaign=articlePDF&utm_medium=articlePDFlink&utm_source=articlePDF&utm_content=jamaoncol.2020.1271. Ce standard est maintenant très reconnu et utilisé pour le traitement des métastases cérébrales des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules mais n’a que peu été étudié chez les patients atteints de cancer bronchique à petites cellules.  

L’étude FIRE-SCLC (First-line Radiosurgery for Small-Cell Lung Cancer) dont les résultats sont publiés ici est une étude rétrospective internationale de cohorte qui a été menée dans 28 centres de 6 pays. Elle porte sur l’analyse de patients atteints de cancer bronchique à petites cellules histologiquement prouvé dont les métastases cérébrales sont traitées par radiochirurgie sans irradiation prophylactique cérébrale ni radiothérapie  panencéphalique. 

L'objectif principal  de cette étude est de décrire l’évolution de ces malades c'est à dire la  survie globale calculée à partir de la radiochirurgie et le temps jusqu’à la première progression cérébrale (TTCP) en prenant en compte l’année du traitement, l’âge, le sexe, l’origine géographique, le PS, le caractéristiques synchrone ou métachrone et en stratifiant l’analyse selon le nombre de métastases cérébrales (1, 2-4, 5-10 et ≥11). Le taux de métastases méningées, la « mortalité neurologique » et les thérapetiques utilisées après progression (salvage therapy) devaient être également étudiées. 

L’objectif secondaire était de comparer ces données aux données individuelles de patients atteints de métastases cérébrales de cancer bronchique à petites cellules qui ont été traitées par radiothérapie panencéphalique dans le cadre de grands essais cliniques publiés. Outre la survie globale et la TTCP, il était prévu d’étudier la survie sans progression cérébrale définie par le délai allant jusqu’à soit la progression cérébrale, soit le décès. 

Résultats de la cohorte traitée par radiochirurgie 

Les données de 710 patients atteints de métastases cérébrales de cancer bronchique à petites cellules et traités par radiochirurgie sans irradiation prophylactique cérébrale ni radiothérapie panencéphalique et traités de 1994 à 2018 ont ainsi été collectées. L’âge médian de ces malades était de 68 ans, les trois quarts étaient des hommes, le PS selon Karnofsky était en majorité ≥80.  Ils avaient un nombre variable de métastases cérébrales  (1 = 33%, 2-4 = 35%, 5-10 = 19% et ≥11 = 13%). Le tiers d’entre eux avaient des métastases cérébrales au moment du diagnostic 10 % présentait également des métastases méningées. 

La durée médiane de survie de l’ensemble des malades était de 8,5 mois, très influencée par le nombre de métastases cérébrales comme le montre le tableau ci-dessous : 

Nombre de métastases cérébrales

Survie médiane (mois)

1

11

2-4

8,7

5-10

8

≥11

5,5

Ces différence étaient significatives à l’exception des catégories 2-4 et 5-10.

Les facteurs qui étaient significativement associés à une meilleure survie en analyse multivariée étaient le PS, le nombre de métastases, le caractère synchrone de celles-ci, l’âge jeune, le sexe féminin, et un traitement plus récent. Aucune différence n’était associée à l’origine géographique du malade. 

L’analyse du TTCP a été possible chez 456 patients. Le TTCP médian était de 8,1 mois. Il était également influencé par le nombre de métastases cérébrales comme le montre le tableau ci-dessous c’était en analyse multivariée le seul facteur qui était lié au TCP) : 

Nombre de métastases cérébrales

TCP médian (mois)

1

11,7

2-4

6,8

5-10

6,1

≥11

4,7

Résultats comparés à la cohorte traitée par radiothérapie panencéphalique 

Pour l’ensemble des malades, la survie médiane était significativement supérieure après radiochirurgie (8,5 vs 5,2 mois, p<0 ,01).   

Cependant les caractéristiques cliniques du patient traité par radiothérapie panencéphalique étaient différentes pour la plupart d’entre elles ce qui justifiait un appariement par la méthode des scores de propension et 2 cohortes de 187 patients ont donc été constituées dont les caractéristiques étaient bien réparties. La survie était légèrement mais significativement  améliorée chez les malades traités par radiochirurgie (6,5 vs 5,2 mois). Le TTCP était amélioré chez les malades traités par radiothérapie panencéphalique et la survie sans progression cérébrale était identique. 

Les auteurs considèrent que ces données sont encourageantes et surtout chez les patients qui n’ont qu’une métastase cérébrale.  Il est difficile d’en être convaincu pour plusieurs raisons :

  • La méthodologie de cette étude de cohorte qui compare deux populations dont la provenance et donc les caractéristiques sont différentes est discutable, même si les auteurs ont réduit ces différences par la méthode des scores de propension.
  • On est étonné de constater qu’une radiochirurgie a été proposée à des malades ayant plus de 5, - et même plus de 10 - métastases cérébrales.
  • Si la différence de survie entre les malades traités ou non par radiochirurgie est importante pour l’ensemble des malades, elle est faible pour les patients appariés. 
  • On peut aussi s’interroger sur le fait que cette étude a écarté les patients traités par irradiation prophylactique cérébrale. Ce critère d’exclusion n’est pas gênant pour les 33 % de patients qui avaient une ou des métastase(s) cérébrale(s) au diagnostic mais devient beaucoup moins pertinent pour les patients chez lesquels ces métastases apparaissent secondairement car beaucoup d’entre eux reçoivent en routine une irradiation prophylactique cérébrale. 
  • On aurait souhaité avoir des données précises sur la taille des métastases cérébrales. 
  • On aurait souhaité aussi avoir des informations précises sur les chimiothérapies reçues chez ces patients car celles-ci ont aussi une action sur les métastases cérébrales. 

Retenons donc que, chez les patients qui ont une seule métastase cérébrale inaugurale,  il est possible qu’il faille mieux proposer une radiochirurgie surtout s’il existe  des facteurs pronostiques favorables … Mais ceci ne reste qu’une possibilité car cette étude ne le démontre pas. 

Reference

Evaluation of First-line Radiosurgery vs Whole-Brain Radiotherapy for Small Cell Lung Cancer Brain Metastases: The FIRE-SCLC Cohort Study.

Rusthoven CG, Yamamoto M, Bernhardt D, Smith DE, Gao D, Serizawa T, Yomo S, Aiyama H, Higuchi Y, Shuto T, Akabane A, Sato Y, Niranjan A, Faramand AM, Lunsford LD, McInerney J, Tuanquin LC, Zacharia BE, Chiang V, Singh C, Yu JB, Braunstein S, Mathieu D, Touchette CJ, Lee CC, Yang HC, Aizer AA, Cagney DN, Chan MD, Kondziolka D, Bernstein K, Silverman JS, Grills IS, Siddiqui ZA, Yuan JC, Sheehan JP, Cordeiro D, Nosaki K, Seto T, Deibert CP, Verma V, Day S, Halasz LM, Warnick RE, Trifiletti DM, Palmer JD, Attia A, Li B, Cifarelli CP, Brown PD, Vargo JA, Combs S, Kessel KA, Rieken S, Patel S, Guckenberger M, Andratschke N, Kavanagh BD, Robin TP.

JAMA Oncol. 2020 Jun 4:e201271. doi: 10.1001/jamaoncol.2020.1271. Online ahead of print

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