Annals of Oncology

Réduire la fréquence des neuropathies au paclitaxel : encore une méthode

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2016

Traitement des stades IV, Qualité de vie / Soins palliatifs, Effets secondaires des médicaments

Les neutropénies parfois sévères et les neuropathies, souvent invalidantes et affectant la qualité de vie, représentent les complications majeures de la chimiothérapie associant carboplatine et paclitaxel, l’une des chimiothérapies de références des cancers bronchiques non à petites cellules.  

Par ailleurs les études de pharmacodynamique du paclitaxel montrent qu’il existe d’importantes variations individuelles en dépit de l’ajustement à la surface corporelle.

Sur ces arguments, cette étude de phase III a été conduite par la Central European Society for Anticancer Drug Research (CESAR) pour voir si l’ajustement des doses de paclitaxel combiné au cisplatine ou au carboplatine permettait de réduire la toxicité de ce traitement. 

Méthodes

Pour être éligibles les patients devaient avoir 18 à 75 ans, un cancer bronchique non à petites cellules de stade IIIB ou IV non accessible à un traitement curatif, un PS ≥2 et les critères biologiques habituels dans ce type d‘études. Ils étaient randomisés pour recevoir 6 cycles de carboplatine AUC6 ou cisplatine 80 mg/m2

  • soit associés à une dose standard de paclitaxel à 200 mg/m2
  • soit à une dose guidée par la mesure de la concentration du paclitaxel dosé entre 18 et 30 heures après le début de la perfusion. Les doses étaient alors définies à partir du deuxième cycle par ce dosage et à partir de  l’intensité  de la granulopénie éventuelle observée lors du cycle précédent.

L’objectif principal était la réduction des neutropénies de grade 4. Les objectifs secondaires la réduction des neuropathies, la réponse, la survie sans progression  et la survie globale. Il fallait 380 patients pour détecter une amélioration des neutropénie de grade 4 de 15 à 4 %.

Résultats

De 2011 à 2014, 386 patients ont été inclus. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient réparties de façon identique. À noter en particulier qu’il il y avait autant de patients dans les deux groupes qui recevaient du cisplatine (moins de 20%).

Les doses de paclitaxel étaient significativement plus basses dans le bras expérimental (139 vs 186 mg/m2, p<0,0001) et, chez les patients qui ont reçu au moins 2 cycles, une réduction de doses a été effectuée dans 61% des cas dans le bras standard contre 24% dans le bras expérimental.

Le taux de neutropénies de grade 4 ne différait pas significativement mais celui  de neuropathies de grade ≥2 différaient en revanche significativement, que les patients aient reçu du cisplatine ou du carboplatine  (tableau ci dessous).

 

Bras standard

Bras expérimental

p

Tolérance

Neutropénies de grade 4/cycle (%)

19

16

0,1

Neuropathies de grade ≥2/cycle (%)

38

23

< 0,001

Neuropathies de grade ≥3/cycle (%)

9

2

< 0,001

Efficacité

Taux de réponse (%

31

27

0,4

PFS médiane (mois)

5,5

4,9

0,2

Survie globale médiane (mois)

10,1

9,5

0,6

On voit aussi sur ce tableau que l’efficacité n’était pas significativement différente, malgré la réduction de doses observée dans le bras expérimental.

Bien que cette étude soit négative sur son objectif principal qui était la réduction des neutropénies graves, elle nous est parue particulièrement intéressante par la démonstration qu’elle apporte que l’ajustement des doses du paclitaxel est susceptible de  réduire significativement les  neuropathies qui affectent  profondément la qualité de vie des patients  sans modifier l’efficacité de ce traitement.  Voici donc une nouvelle méthode pour réduire la toxicité neurologique qui prend place à côté de l’utilisation du nab-paclitaxel (cliquer ici) et surtout de l’administration hebdomadaire de ce traitement qui reste sans doute la méthode dont l’efficacité est prouvée depuis 2008 qui est  la plus simple et la moins couteuse (accès gratuit)

 

Reference

Open-label, randomized study of individualized, pharmacokinetically (PK)-guided dosing of paclitaxel combined with carboplatin or cisplatin in patients with advanced non-small-cell lung cancer (NSCLC).

Joerger M, von Pawel J, Kraff S, Fischer JR, Eberhardt W, Gauler TC, Mueller L, Reinmuth N, Reck M, Kimmich M, Mayer F, Kopp HG, Behringer DM, Ko YD, Hilger RA, Roessler M, Kloft C, Henrich A, Moritz B, Miller MC, Salamone SJ, Jaehde U.

Ann Oncol 2016; 27 : 1895-902

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