Lung Cancer

Résultats à long terme d’une cohorte de patients japonais dont la tumeur présente une mutation de l’EGFR

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mars 2018

Thérapeutique ciblée, Traitement des stades IV, EGFR

S’il est bien démontré que les inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR représentent le traitement essentiel des cancers bronchiques non à petites cellules qui ont une mutation activatrice de l'EGFR, la place de la chimiothérapie est moins claire. Cette étude rétrospective japonaise à financement industriel qui a été menée dans 17 centres japonais a pour but d’apporter des éléments de discussion à partir de données de tous les patients présentant un cancer avec mutation de l’EGFR qui ont été traités de 2008 à 2012 en en dehors d’essais thérapeutiques.

Ainsi 1656 patients ont été inclus : leur âge médian était de 67 ans, il y avait 65% de femmes, 60% de non-fumeur, 95% d’adénocarcinome Les ¾ avaient un cancer de stade IIIB ou IV et le dernier quart étaient traités pour une récidive post-opératoire. La grande majorité avaient un PS à 0 ou 1 et 90% une délétion 19 ou une mutation L858R. Enfin près de 30% avaient une ou plusieurs métastases cérébrales.

Près des 3/4 des patients ont reçu une deuxième ligne de traitement, près de la moitié une troisième ligne et 30% une quatrième. Presque tous (97,1%) ont reçu au moins une ligne d’inhibiteurs de la tyrosine kinase de l’EGFR, pour la plupart du gefitinib.

Avec un suivi médian de 29,5 mois la durée médiane de survie était de 29,7 mois et les taux de survie à 3 et 5 ans étaient de 41,2% et 21,5%. Pour les stades IV, la durée médiane de survie était de 25,2 mois et les taux de survie à 3 et 5 ans étaient de 32% et 13,8%. En analyse multivariée l’âge <75 ans, l’absence de tabagisme, la présence d’un adénocarcinome, un stade moins avancé, un bon PS et la présence de mutations usuelles étaient pronostiques.

Ensuite quatre séquences thérapeutiques de première ligne et de deuxième ligne ont été étudiées chez 1055 patients : dans 2 séquences les patients ont reçu un inhibiteur de la tyrosine kinase en première ligne puis un autre inhibiteur de la tyrosine kinase (n=223) ou une chimiothérapie (n=336) en deuxième ligne. Dans les 2 autres ils ont reçu une chimiothérapie en première ligne puis un inhibiteur de la tyrosine kinase (n=437) ou une autre chimiothérapie n=59) en deuxième ligne.  Dans ce dernier groupe 70% des patients ont reçu un inhibiteur de la tyrosine kinase en troisième ligne.

La durée médiane de survie était identique dans les quatre séquences. Le taux de survie à 5 ans était plus élevé chez les patients qui ont reçu la chimiothérapie en première ligne mais les caractéristiques des patients n’étaient pas identiques comme le montre un tableau fourni en annexe  (cliquer ici) : il y avait notamment chez les patients traités par chimiothérapie plus de stade IIIB (12,4 vs 3,3%) et moins de stades IV (68,9 vs 74,4%).

Dans une analyse qui n’était pas prévue au départ et qui portait uniquement sur les patients qui avaient un suivi de plus de 5 ans, le fait d’avoir reçu en premier une chimiothérapie était significativement associé avec une meilleure survie à 5 ans (ainsi que le stade, le PS et le sexe féminin).

L’apport de cette étude nous semble assez limité pour plusieurs raisons : 1) c’est une étude rétrospective et la comparaison de ces groupes est très discutable puisqu’on ne connait pas les raisons qui ont conduit ces patients à recevoir en première ligne un inhibiteur de la tyrosine kinase ou de la chimiothérapie. 2) On ne connait pas les caractéristiques de chaque groupe de façon précise. Certes on dispose de quelques données sur le tableau en annexe cité plus haut mais on peut très bien imaginer que d’autres facteurs pronostiques comme le nombre de métastases ou la présence de métastases cérébrales puissent expliquer ces résultats. 3) Le fait que l’analyse de la survie à 5 ans soit restreinte aux patients suivis jusqu’à 5 ans pose aussi un problème méthodologique. 4) Enfin ces résultats sont basés sur des patients qui n’ont pas reçu d’inhibiteurs de la tyrosine kinase de troisième génération lorsqu’apparait une mutation de résistance et on sait combien ce traitement maintenant disponible est susceptible de modifier profondément l’évolution de ces cancers.

 

Reference

Real world treatment and outcomes in EGFR mutation-positive non-small cell lung cancer: Long-term follow-up of a large patient cohort.

Okamoto I, Morita S, Tashiro N, Imamura F, Inoue A, Seto T, Yamamoto N, Ohe Y, Nakagawa K, Fukuoka M.

Lung Cancer 2018; 117 : 14-19.

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer