JAMA Oncology

Soins palliatifs précoces et survie des malades atteints de cancers broncho-pulmonaires avancés : une étude de registre

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2019

Qualité de vie / Soins palliatifs

S’il est unanimement admis que la prise en charge précoce des symptômes (soins palliatifs précoces) améliore l’humeur et la qualité de vie des malades atteints de cancer métastatique, l’impact de cette pris en charge précoce sur la survie reste débattue. 

On se souvient qu’en 2010, une étude de JS Temel et al (cliquer ici pour un accès gratuit) avait comparé dans un essai randomisé chez 151 patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules métastatique l’administration de soins palliatifs précoces associés à un traitement  standard aux seuls traitements standard. La durée médiane de survie des malades qui recevaient un traitement palliatif précoce était significativement supérieure à celle des malades du bras standard (11,6 vs 8,9 mois, p=0,02). Toutefois l'objectif principal de cette étude n’était pas la survie et ces résultats ne semblent pas avoir été confirmés par d’autres études.  Par ailleurs en 2016 une importante méta-analyse publiée dans le JAMA confirmait l’impact des soins palliatifs sur les symptômes et la qualité de vie mais ne confirmait pas que les soins palliatifs apportent un  bénéfice de survie aux  patients atteints de maladies mortelles (cliquer ici pour un accès gratuit)

Une nouvelle étude que publie le JAMA Oncology ce mois-ci pose à nouveau la question de l’impact sur la survie des soins palliatifs précoces. 

C’est une étude rétrospective de cohorte qui a été menée chez 23 154 patients traités dans le cadre du système de santé des anciens combattants américains et chez lesquels a été diagnostiqué un cancer broncho-pulmonaire avancé de 2007 à 2013. L'objectif principal était d’établir un lien entre la mortalité de toutes causes et une prise en charge palliative précoce. La prise en charge palliative était définie comme une consultation de soins palliatifs par un spécialiste en milieu hospitalier ou en ambulatoire après un diagnostic de cancer broncho-pulmonaire. Pour éliminer des biais potentiels les cohortes ayant reçu ou non des soins palliatifs ont été construites selon un appariement utilisant les scores de propension de façon qu’elles soient similaires en prenant en compte notamment l’âge, le score de comorbidités, les caractéristiques de la tumeur etc.

Au total 23 154 patients présentant un cancer broncho-pulmonaire de stade IIIB ou IV ont été inclus dans cette étude. Leur âge moyen était de 68 ans et 98 % d’entre eux étaient des hommes. La plupart (89 %) avaient une tumeur de stade IV et 69 % un cancer bronchique non à petites cellules. Les participants à cette étude ont reçu un traitement avec chimiothérapie ou radiothérapie pendant une durée médiane de 37 jours et 33 jours après le diagnostic.

Parmi ceux-ci, 13 109 ont reçu des soins palliatifs avec d’importantes variations régionales allant de 5 à 95%. La durée médiane de survie après le diagnostic de cancer était de 136 jours.

Globalement la survie ajustée (aHR) était diminuée chez les patients qui recevaient les soins palliatifs (aHR=1,19; 95% CI, 1,15-1,23). Cependant l’effet des soins palliatifs sur la survie était différent selon le moment où ils étaient reçu :

  • Entre 0 et 30 jours l’effet était franchement délétère (aHR=2,3; 95% CI, 1,97-2,30).  
  • Entre 31 et 365 jours au contraire, l’effet était favorable  (aHR=0,47; 95% CI, 0,45-0,49).  

Par ailleurs le fait de recevoir des soins palliatifs réduisait le risque de mourir dans un service de soins de courte durée. 

Cette étude de cohorte rétrospective conclue que les soins palliatifs prolongent la survie s’ils sont administrés après le premier mois de traitement et réduisent le risque de mourir dans un service de soins de courte durée. Ce deuxième bénéfice est probablement réel car on imagine que les patients qui ont reçu des soins palliatifs sont mieux repérés et risquent donc moins d’être dirigés dans un service de soins de courte durée lorsque leur état s’aggrave. L’hypothèse que cette prise en charge palliative après un mois améliore la survie est en revanche beaucoup plus discutable car, même s’il y a eu un appariement des malades, le fait que cette étude soit rétrospective ne garantit nullement l’absence de biais. On ne sait pas du tout notamment quels étaient les soins de confort administrés chez des patients non adressés en consultation de soins palliatifs. On ignore aussi comment ces patients ont été traités : peut-être que les patients dont les symptômes étaient mieux contrôlés grâce aux soins palliatifs étaient plus ou mieux traités ? 

On remarquera enfin que la durée médiane des traitements est extrêmement courte (la durée médiane de chimiothérapie n’était que de 37 jours) comme l’est d’ailleurs la durée médiane de survie qui est 136 jours ce qui veut dire que ces malades étaient particulièrement gravement atteints et que beaucoup ont été sous-traités. 

 

 

 

Reference

Association of Early Palliative Care Use With Survival and Place of Death Among Patients With Advanced Lung Cancer Receiving Care in the Veterans Health Administration.

Sullivan DR, Chan B, Lapidus JA, Ganzini L, Hansen L, Carney PA, Fromme EK, Marino M, Golden SE, Vranas KC, Slatore CG.

JAMA Oncol 2019. [Epub ahead of print]

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