Cancer

Toxicité de la chimiothérapie des sujets âgés et BMI

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
avril 2020

Traitement des stades IV, Cancers du sujet âgé

Existe-t-il un lien entre l’état nutritionnel des sujets âgés et atteints de cancers et la toxicité de la chimiothérapie qu’ils reçoivent ?  Pour répondre à cette question, les auteurs de cet article ont travaillé à partir d’une cohorte longitudinale de 750 patients âgés de 65 ans ou plus et pris en charge dans 10 institutions américaines. Une analyse multivariée des malades de cette cohorte dans laquelle le BMI était recueilli prospectivement a été réalisée pour examiner une éventuelle corrélation entre les facteurs nutritionnels et le risque de toxicités de grade ≥ 3 liée à la chimiothérapie. 

L’âge médian de ces malades était de 72 ans.  Parmi ces patients, 35 % avaient entre 65 et 69 ans, 26 % entre 70 et 74 ans, 22 % entre 75 et 79 ans, 22 % entre 75 et 79 ans  et 17 % avaient plus de 80 ans.  Plus du quart d’entre eux (27,6%) avaient un cancer broncho-pulmonaire. Environ les 3/4 des chimiothérapies étaient des polychimiothérapies et étaient administrées en première ligne. Près des 3/4 des patients avaient au moins 2 comorbidités. 

Seulement 2,3% des patients avaient au début de la chimiothérapie un BMI inférieur à la normale (<18,5 kg/m2), 38,8% avaient un BMI normal, 38,1% avaient un surpoids (BMI de 25 à 29,9) et 20,5% avaient une obésité (BMI ≥30).   Près de la moitié (49,2%) des patients déclaraient avoir en un amaigrissement non volontaire dans les 6 mois qui précédaient le traitement et 17,6% rapportaient un amaigrissement de plus de 10%. 

Des toxicités de grade ≥3 sont survenues chez 54,7% des patients.

Un BMI élevé au début du traitement parait associé à un risque moins élevé de toxicité de grade ≥ 3 de la chimiothérapie mais en  analyse multivariée il n’y avait qu’une tendance qui n’atteignait pas la significativité (p=0,06). En revanche cette différence devenait significative si outre le BMI, l’albuminémie était prise en compte : Le plus bas risque de toxicité de grade ≥3 était observé chez les patients obèses dont l’albumine était normale par comparaison à ceux dont le BMI était normal et dont l’albuminémie était basse (p=0,008).   

Ces différences sont importantes ainsi :

  • Chez les patients qui, au début du traitement, ont un taux d’albuminémie basse, les pourcentages de malades qui ont une toxicité de grade ≥3 sont respectivement de 68%, 65% et 49% selon que le BMI est inférieur à 25, entre 25 et 30 ou ≥30.
  • Chez ceux qui, au début du traitement, ont un taux d’albuminémie normal, les pourcentages de malades qui ont une toxicité de grade ≥3 sont respectivement de 49%, 53% et 41% selon que le BMI est inférieur à 25, entre 25 et 30 ou ≥30.

Le message des auteurs est qu’un taux d’albumine normal et un BMI élevés seraient plutôt protecteurs. Soulignons toutefois que les doses de chimiothérapie reçues chez les patients de cette étude sont peu précisées : on sait juste que 23,6 % des patients n’ont pas reçu de doses standard. Or les doses qui doivent être prescrites aux obèses sont toujours débattues :  beaucoup d’équipes administrent aux malades qui ont un surpoids des doses calculées sur leur surface théorique et non réelle ou plafonnent les doses par exemple à 2m2. Si les doses sont réduites, il est possible que les chimiothérapie soient moins toxiques mais aussi qu'elles soient moins efficaces. Dans la littérature lorsque les doses de chimiothérapie sont élevées, c'est à dire adaptées à la surface réelle, la toxicité  de la chimiothérapie est en général supérieure,  mais il n'est pas certain que l'activité soit la même lorsque les doses sont réduites. Cet article suscite donc plusieurs questions non résolues. 

 

 

 

Reference

Associations between nutritional factors and chemotherapy toxicity in older adultswith solid tumors.

Dotan E, Tew WP, Mohile SG, Ma H, Kim H, Sun CL, Caan B, Dale W, Gajra A, Klepin HD, Owusu C, Gross CP, Muss H, Chapman A, Katheria V, Hurria A.

Cancer 2020; 126 : 1708-1716

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Thématiques : Épidémiologie, Prévention
Revue : British Journal of Cancer