Journal of Thoracic Oncology

Toxicité de l’association Nivolumab et Ipilimumab : analyse poolée des essais CheckMate 227, CheckMate 568, et CheckMate 817

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
janvier 2023

Immunothérapie, Effets secondaires des médicaments

L’association de deux inhibiteurs de points de contrôles immunitaires est largement testée dans le cancer bronchique non à petites cellules (anti CTLA4+antiPD1 dans la combinaison ipilimumab et Nivolumab, ou anti CTLA4+ anti PDL1 dans l’association tremelimumab et durvalumab, ou encore plus récemment anti TIGIT + anti PLD1 dans l’association tiragolumab et atezolizumab). L’optimisation du blocage et le bénéfice attendu en efficacité peut toutefois faire craindre un excès de toxicité comme cela avait été rapporté (avec des posologies plus élevées) dans le mélanome par exemple.

La publication rapportée ici est une analyse poolée de trois essais qui ont évalué le doublet ipilimumab+Nivolumab en première ligne dans le cancer bronchique non à petites cellules métastatique.  Il s’agit de 3 études (1ere partie de CheckMate 227, Cohorte A de CheckMate 817 et partie 1 de CheckMate 568) ayant évalué l’association d’ipilimumab à 1 mg/kg toutes les 6 semaines, au Nivolumab donné soit à 3 mg/kg soit à dose fixe 240 mg, toutes les 2 semaines. Les patients de ces essais avaient un CBNPC métastatique naïf de tout traitement, quel que soit le type histologique, et devaient être en PS 0-1.  L’analyse porte sur la tolérance chez l’ensemble des patients et chez les patients de 75 ans ou plus, en considérant les effets indésirables liés au traitement et les effets immunomédiés. 

Au total ce sont donc 1255 patients qui ont été poolés à travers ces trois essais, avec toutefois assez peu de patients de plus de 75 ans (n=174 soit 15%). Les caractéristiques démographiques de ces patients étaient comparables à la population totale poolée avec néanmoins plus de PS1. Au moment de l’analyse 1 seul patient était encore sous traitement (<0.1%). Les patients ont globalement reçu en médiane, 9 doses de Nivolumab et 3 doses d’ipilimumab. La durée médiane de traitement est relativement courte, de 4.1 mois (range : 0-25.8). On note que 21% des arrêt de traitements étaient dus à la toxicité. 

Chez les plus de 75 ans, on note en médiane 8 doses de Nivolumab et 3 d’ipilimumab avec une durée de traitement peu différente de 3.9 mois (range 0-25.6). La toxicité a été la cause d’arrêt chez 29%.

Sur l’ensemble de la population, les effets secondaires de tout grade ont concerné 78% des patients, avec notamment 34 % de grades 3-4. La diarrhée était l’évènement le plus fréquent (20%) suivi de la fatigue (18%) et du prurit (17%). Les grades 3-4 les plus fréquents étaient l’élévation de la lipase sérique (6%), la diarrhée (2%) et la fatigue (2%). Les effets secondaires conduisant à l’arrêt du traitement étaient la pneumopathie (4%), les diarrhées (3%) et la colite (2%). On note 16 décès potentiellement liés au traitement (1%) et la pneumopathie était la cause la plus souvent rapportée (n=5). 

Chez les patients de plus de 75 ans le profil de tolérance est globalement semblable avec toutefois plus de grade 3-4 (44% contre 34% pour l’ensemble de la population). On note 2 décès liés au traitement (1 myocardite et une œsophagite auto immune). 

Les arrêts de traitement ne semblent pas obérer le devenir des patients. Après un suivi médian de 29.1 mois des 225 patients évaluables, la survie à 1 an des patients ayant dû arrêter le traitement était de 78% (CI95% 72.1-83), la survie à 2 ans de 60% (CI95% 53.1-66) et à 3 ans de 50% (CI95% 42-56). 

Il s’agit de la plus vaste analyse poolée concernant la tolérance de ce doublet thérapeutique avec un suivi minimum de plus de 2 ans. Elle permet d’obtenir des données plus robustes, notamment chez les plus de 75 ans, qui n’auraient pas été interprétables prises dans chaque essai individuellement. Elle confirme que cette association est faisable et que les effets secondaires sont gérables, y compris chez les sujets plus âgés (qui étaient pourtant plus souvent en PS1). Elle confirme également ce qui est depuis régulièrement montré dans les essais les plus récents, à savoir que l’arrêt du traitement pour toxicité n’est pas forcément une mauvaise nouvelle en termes de survie pour peu qu’ils soient bien gérés. 

 

 

Reference

Safety of First-Line Nivolumab Plus Ipilimumab in Patients With Metastatic NSCLC: A Pooled Analysis of CheckMate 227, CheckMate 568, and CheckMate 817. 

Paz-Ares LG, Ciuleanu TE, Pluzanski A, Lee JS, Gainor JF, Otterson GA, Audigier-Valette C, Ready N, Schenker M, Linardou H, Caro RB, Provencio M, Zurawski B, Lee KH, Kim SW, Caserta C, Ramalingam SS, Spigel DR, Brahmer JR, Reck M, O'Byrne KJ, Girard N, Popat S, Peters S, Memaj A, Nathan F, Aanur N, Borghaei H. 

J Thorac Oncol 2023; 18 : 79-92

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