Journal of Clinical Oncology

Traitement adjuvant des carcinomes neuroendocrines à grandes cellules : cisplatine et Irinotecan ou cisplatine et VP16 ?

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
novembre 2020

Traitement péri-opératoire, Tumeurs neuro-endocrines

Les carcinomes neuroendocrines à grandes cellules font partie des tumeurs neuroendocrines bronchiques de haut grades au même titre que les cancers à petites cellules. La prise en charge des stades I à IIIA dans cette histologie fait toutefois appel à la chirurgie et sur la base d’analyses rétrospectives de registres, une chimiothérapie adjuvante est proposée à ces patients. Elle repose par extrapolation sur le doublet classique administré dans les cancers à petites cellules, mais des données issues d’essais réalisées chez des patients asiatiques (non reproduites sur patients caucasiens) laissaient apparaitre une supériorité du doublet platine/irinotecan par rapport à platine/etoposide chez des patients ayant un cancer à petites cellules métastatiques (cliquer ici pour un accès gratuit)

Compte tenu de ces résultats, une étude rapportée ici évaluant ce nouveau doublet a été conduite par le JCOG en adjuvant chez des patients correctement opérés (R0) de cancers neuroendocrines à grandes cellules de stades I-IIIIA.   Il s’agit d’une étude multicentrique (57 centres Japonais) de phase III dont l’objectif principal était initialement la survie mais un amendement en Mars 2019 a changé cet objectif en faveur de la survie sans récidive (en tant que marqueur de substitution validé permettant d’extrapoler l’OS, et parce que les progrès supposés des traitements ultérieurs pouvaient impacter sur la survie). Au total ce sont 221 patients qui ont été inclus entre Avril 2013 et Octobre 2018, recevant soit platine/etoposide (n=111) soit platine/irinotecan (n=110). 

Finalement l’étude a été interrompue pour futilité après la deuxième analyse intermédiaire planifiée. En effet, après un suivi médian de 24.1 mois, le taux de récidive ou décès était de 30% dans le bras etoposide contre 31% dans le bras irinotecan.  Il n’y avait pas de différence en survie sans récidive à 3 ans entre les deux bras, à respectivement 65.4% (95% CI, 54.4%-74.4%) et 69.0% (95% CI, 58.4%-77.5%), p=0.619. La médiane de survie sans récidive n’était pas atteinte, dans aucun des deux bras. Après la première analyse intermédiaire, les chances que le bras irinotecan soit supérieur au bras etoposide n’étaient que de 15.9%. La seule différence notable est issue des profils de toxicités puisque le bras etoposide est pourvoyeur de plus de toxicités hématologiques notamment granulocytaires, en dépit d’une plus large utilisation de facteurs de croissance (54% versus 12% dans le bras irinotecan), avec 9% de leucopénies de grade 4 versus 2% dans le bras irinotecan, et  78% de neutropénie grade 4 versus 13%.  Les neutropénies fébriles étaient observées chez 20% des patients du bras etoposide contre seulement 4% du bras irinotecan. 

A l’inverse, les toxicités cliniques non hématologiques étaient plus fréquentes dans le bras irinotécan avec une anorexie de grade 3-4 dans 11% versus 6% dans le bras etoposide, des diarrhees grades 3-4 dans 8% versus 1% respectivement… De fait, on note une différence significative de patients ayant terminé le traitement adjuvant comme prévu, avec 87% dans le bras etoposide contre 73% dans le bras irinotecan (p=0.007).

Il s’agit néanmoins de résultats à prendre avec précautions. Les carcinomes neuro endocrines à grandes cellules restent rares, 10 centres de cet essai n’ont inclus qu’un patient en 5 ans. L’étude a été amendée du fait d’un nombre trop peu important d’évènements sur la survie, et elle a été interrompue précocement après la deuxième analyse intermédiaire pour futilité. Malgré tout, et même si les auteurs analyseront plus tard les données de survie pour vérifier qu’aucun signal tardif d’efficacité ne se dégage, l’irinotecan ne semble pas apporter de bénéfice, même chez des patients asiatiques, et ne reproduit pas ce qui avait été rapporté dans le cancer à petites cellules métastatique. Le standard actuel en adjuvant pour ces patients reste donc etoposide/platine.

Reference

Randomized Phase III Study of Irinotecan Plus Cisplatin Versus Etoposide Plus Cisplatin for Completely Resected High-Grade Neuroendocrine Carcinoma of the Lung: JCOG1205/1206.

Kenmotsu H, Niho S, Tsuboi M, Wakabayashi M, Ishii G, Nakagawa K, Daga H, Tanaka H, Saito H, Aokage K, Takahashi T, Menju T, Kasai T, Yoshino I, Minato K, Okada M, Eba J, Asamura H, Ohe Y, Watanabe SI.

J Clin Oncol  2020 Nov 2 :  Online ahead of print

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