Le camrelizumab est un anticorps monoclonal humanisé anti PD-1 qui a notamment fait l’objet d’une étude de phase III randomisée CAMEL que nous avons commentée l’an dernier (cliquer ici). Cette étude avait inclus des patients de 18 à 70 ans atteints de cancer bronchique non à petites cellules non épidermoïde qui étaient randomisés pour recevoir en première ligne soit une association de camrelizumab, carboplatine et pemetrexed suivie d’une maintenance par camrelizumab et pemetrexed, soit cette même chimiothérapie suivie de pemetrexed en maintenance. Les deux objectifs principaux étaient la survie sans progression appréciée par un comité indépendant chez tous les patients et chez ceux dont la tumeur exprimait PD-L1. Ces deux objectifs principaux étaient atteints puisque les survie sans progression médianes de l’ensemble des malades et des patients exprimant PD-L1 étaient significativement augmentées avec des HR respectivement à 0,60 (0,45-0,79) et 0,56 (0,39-0,82).
CAMEL-sq, dont les résultats viennent d’être publiés, est une étude randomisée de phase III qui a été menée dans 53 hôpitaux chinois. Elle inclue des patients de 18 à 75 ans atteints de cancer bronchique non à petites cellules épidermoïde non antérieurement traités et présentant au moins une lésion mesurable. Ils devaient avoir un PS à 0 ou 1. Ils ne devaient pas avoir de métastases cérébrales non traitées et ne devaient pas avoir reçu de traitement immunosuppresseur dans les 2 semaines qui précédaient le traitement et ne devaient pas avoir de mutation activatrice de l'EGFR ou de translocation ALK-EML4 (tests non exigés).
Les patients éligibles étaient randomisés pour recevoir 4 à 6 cycles de :
- Soit toutes les 3 semaines 200 mg de camrelizumab et carboplatine AUC 5 et paclitaxel à 175 mg/m2 suivi d’une maintenance par camrelizumab pendant au maximum deux ans.,
- Soit cette même chimiothérapie associée à un placebo.
Les critères de stratification étaient le tabagisme, la présence de métastases hépatiques et le sexe.
L'objectif principal était la survie sans progression appréciée par un comité indépendant. Les objectifs secondaires étaient la survie globale, la survie sans progression appréciée par les investigateurs et les taux et durée de réponse.
Une recherche d’ADN tumoral circulant était réalisée initialement puis tous les deux cycles de traitement.
Résultats
De novembre 2018 à décembre 2019, l’éligibilité de 606 patients a été étudiée et 390 ont été enrôlés et randomisés. Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient bien réparties, y compris en ce qui concerne l’expression de PDL1.
A la date de point, les durée médianes de suivi étaient respectivement de 13,5 mois et 11,6 mois dans les bras expérimental et standard et les pourcentages des patients décédés ou en progression étaient respectivement dans ces deux bas de 64 et 85%.
Comme le montre le tableau ci-dessous l’objectif principal était atteint puisque la survie sans progression médiane de l’ensemble des malades étaient significativement augmentée dans le bras expérimental :
| Camrelizumab et chimiothérapie | Placebo et chimiothérapie | p |
Ensemble des patients |
PFS médiane (mois) | 8,5 | 4,9 | |
HR de PFS (95% CI) | 0,37 (0,29-0,47) | <0,0001 |
Taux de PFS à 12 mois (%) | 37,9 | 9,2 | |
Survie médiane (mois) | NA | 14,5 | |
HR de survie (95% CI) | 0,55 0,40-10,75) | <0,0001 |
Taux de réponses objectives (%) | 64,8 | 36,7 | <0,0001 |
Durées de réponse (mois) | 13,1 | 4,4 | |
Dans une analyse de sous-groupes, la survie sans progression était toujours plus élevée dans le bras expérimental quel que soit l’âge, le PS, le stade, la présence de métastases cérébrales ou hépatiques et le statut PD-L1 positif ou négatif. En revanche, il n’y avait pas de bénéfice significatif attribuable au Camrelizumab chez les femmes et les non-fumeurs.
La survie globale était également plus élevée quel que soit le PS, la présence de métastases cérébrales ou hépatiques et le statut PD-L1 positif ou négatif. En revanche, les malades de plus de 65 ans, les femmes, les non-fumeurs et les malades atteints d’un cancer de stade III ne bénéficiaient pas significativement du Camrelizumab.
Tous les patients du bras expérimental et 99% de ceux du bras standard ont eu au moins un évènement secondaire rapporté au traitement. Par ailleurs respectivement 74% et 72% des patients du bras expérimental et standard ont eu un au moins un évènement secondaire rapporté au traitement de grade ≥3. Enfin les effets adverses sévères rapportés au traitement étaient respectivement de 33 et 21% et 3 et 2% des patients ont eu un décès possiblement attribuable au traitement.
Comme dans l’étude CAMEL, l’événement adverse le plus fréquemment rapporté dans le bras expérimental est décrit comme «reactive cutaneous capillary endothelial proliferation » ; il s’agit probablement de vascularite leucocytoclasique et elle est rapportée chez 69% des patients. Les deux autres effets immunologiques les plus fréquents étaient les hypothyroïdies (11%) et les rash (6%).
A noter enfin que la clearance de l’ADN tumoral circulant après deux cycles était significativement associée avec une plus longue survie sans progression et survie globale .
Cette étude dont la méthodologie n’est pas discutable confirme une fois encore la supériorité de l’immunochimiothérapie sur la chimiothérapie. Cette démonstration est faite ici dans une étude chinoise de première ligne avec le Camrelizumab qui, associé à du carboplatine et du taxol, est comparé chez les malades atteints de cancers épidermoïdes à un placebo.
Reference
Ren S, Chen J, Xu X, Jiang T, Cheng Y, Chen G, Pan Y, Fang Y, Wang Q, Huang Y, Yao W, Wang R, Li X, Zhang W, Zhang Y, Hu S, Guo R, Shi J, Wang Z, Cao P, Wang D, Fang J, Luo H, Geng Y, Xing C, Lv D, Zhang Y, Yu J, Cang S, Yang Z, Shi W, Zou J, Zhou C; CameL-sq Study Group.
Camrelizumab Plus Carboplatin and Paclitaxel as First-Line Treatment for Advanced Squamous NSCLC (CameL-Sq): A Phase 3 Trial.
J Thorac Oncol 2022; 17 : 544-557