Lancet oncology

Immunothérapie adjuvante : premiers résultats de l’étude de phase III PEARLS/KEYNOTE-091 avec le Pembrolizumab

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2022

Immunothérapie, Traitement péri-opératoire

Il y a un an, nous commentions ici les premiers résultats de l’étude IMPower 010 (cliquer ici), une étude randomisée internationale de phase III à promotion industrielle qui comparait un anti PD-L1,  l’atezolizumab, en maintenance au meilleur soin de confort chez plus de 1000 malades opérés et traités par chimiothérapie adjuvante d’un cancer bronchique non à petites cellules. Cette importante étude de phase III démontrait pour la première fois une augmentation significative de la survie sans maladie chez des patients opérés d’un cancer bronchique non à petites cellules de stade II-IIIA ayant reçu une chimiothérapie adjuvante.  

Voici maintenant les premiers résultats d’une autre étude de phase III menée cette fois avec un anti PD-1, le pembrolizumab, comparé à un placebo. Il s’agit d’une étude internationale à promotion industrielle, l’étude PEARLS/KEYNOTE-091 menée en collaboration avec l’EORTC et l’ETOP. 

Pour être éligible à cette étude il fallait avoir au moins 18 ans, avoir été opéré d’un cancer bronchique non à petites cellules de stade IB (≥4cm), II ou IIIA dans la 7ème classification par résection complète (R0) associée à un curage ganglionnaire minimum (territoire lobaire et subcarénaire). Les patients devaient avoir un PS<2, ils ne devaient pas avoir reçu de radiothérapie adjuvante ou néoadjuvante. La chimiothérapie adjuvante n’était pas obligatoire mais elle était fortement recommandée pour les stades II et IIIA et discutée pour les stades  IB. 

Après la randomisation, les patients recevaient toutes les 3 semaines soit 200 mg de pembrolizumab soit une solution saline placebo jusqu’à progression, toxicité inacceptable ou décision du malade ou du médecin ou jusqu’à 18 injections (environ 1 an). La détermination du statut PD-L1 était effectuée dans un laboratoire centralisé. 

Les objectifs principaux étaient la survie sans maladie revue par un comité d’investigateurs pour l’ensemble de la population et la survie sans maladie chez les malades dont la tumeur exprimait PD-L1  à au moins 50%. Les objectifs secondaires étaient la survie sans maladie chez les malades dont la tumeur exprimait PD-L1  à au moins 1%, la survie globale, la survie chez les malades qui exprimaient PD-L1  à au moins 50% et à au moins 1%, la survie spécifique de l’ensemble de la population et la toxicité.   

Pour déceler un passage de la survie sans maladie  médiane de 42 à 66 mois de l’ensemble de la population (HR=0,75) et de 42 à 76 mois pour les PD-L1≥50% (HR=0,55) il fallait inclure approximativement 1180 participants. 

L’IDMC après la première analyse intermédiaire a conseillé la poursuite de l’étude et ce sont les résultats de la deuxième analyse intermédiaire (effectuée après au moins 118 événements de survie sans maladie chez les patients dont le statut PD-L1  était d’au moins 50%) qui sont présentés ici.

De janvier 2016 à mai 2020, sur 1955 patients enregistrés, 1178 ont été randomisés et 1177 ont constitué la population analysée en intention de traiter (un patient a été exclu du fait d’une erreur administrative de traitement).  Les caractéristiques des patients des deux groupes étaient à peu près bien réparties : l’âge médian était de 65 ans dans les deux groupes. Respectivement  dans le bras pembrolizumab et placebo 32 et 31% étaient des femmes, 64 et 58 % avaient un PS à 0, 15 et 11% étaient non-fumeurs, 67 et 62% avaient un cancer non épidermoïde, 14  % dans les 2 bras avaient in cancer de stade IB, 56 et 58% de stade II et 30 et 28% de stade IIIA, et 84 et 83% avaient reçu 3 ou 4 cycles de chimiothérapie adjuvante. Enfin les statuts PD-L1  étaient exactement les mêmes dans les 2 bras avec 28% de PD-L1 ≥ 50%. 

A la date de point en septembre 2021, la durée médiane de suivi était de 35,6 mois et les nombres médians de traitements administrés étaient de 17 dans le bras pembrolizumab et 18 dans le bras placebo et les durées médianes de traitement étaient de 11,7 et 11,8 mois.  Les principaux résultats figurent sur le tableau ci-dessous :  

 

Pembrolizumab

Placebo

p

Ensemble de la population

DFS médiane (95%CI) (mois)

53,6 (39,2-NA)

42 (51,3-NA)

 

HR de DFS (95%CI)

0,76 (0,63-0,91)

0,0014

Décès à la date de point (n)

98

111

 

Survie médiane (95%CI) (mois)

NA

NA

 

HR de survie (95%CI)

0,87 (0,67-1,15)

0,17

PD-L1 ≥50%

DFS médiane (95%CI) (mois)

NA

NA

 

HR de DFS (95%CI)

0,82 (0,57-1,18)

0,14

Des événements adverses de tous grades sont survenus chez 96% des patients du bras pembrolizumab et 91% des patients du bras placebo et des événements adverses de grade ≥3 chez 34 et 26% patients (hypertension (6%,6%) et pneumopathie (2 et 0%). Des événements adverses conduisant à l’arrêt du traitement ont été observés chez 20 et 6% des malades. Des événements adverses sévères sont survenus chez 24 et 15% des participants (pneumopathies infectieuses (2 et 2%) pneumopathie inflammatoire (2 et 0%), diarrhées (1 et 0%). 

Des évènements secondaires de tous grades rapportés au traitement ont été observés chez 75 et 52% des participants et de grade ≥3 chez 15 et 4% des patients. 

Des évènements secondaires immunologiques et des réactions à la perfusion de tous grades ont été observés chez 39 et 13 % des participants et de grade ≥3 chez 8 et 2% des patients. 

Enfin 4 patients du bras pembrolizumab sont décédés à la suite d’un évènement  adverse (1 par choc cardiogénique et myocardite, 1 par choc septique et myocardite, 1 par pneumopathie infectieuse et 1 par mort subite ) et aucun dans le bras placebo. 

Ces premiers résultats vont dans le même sens que ceux de l’étude IMPower 010. Ils ont été obtenus dans une étude de phase III sur plus de 1000 malades ce qui rendent ces résultats robustes. Il sera intéressant de suivre les résultats plus tardifs de cette étude, concernant la survie globale bien sur et aussi les résultats obtenus chez les malades qui expriment PD-L1 à plus de 50% car les résultats actuels sont difficiles à expliquer. Enfin, il faudra comparer ces résultats à ceux de l’immunothérapie néoadjuvante en n’oubliant pas que le traitement néoadjuvant est donné à tous les malades alors que l’adjuvant n’est donné qu’aux patients qui ont passé au préalable deux étapes importantes, celle de la chirurgie et celle et de la chimiothérapie adjuvante et ceux-ci sont forcément moins nombreux.  

 

 

 

Reference

O'Brien M, Paz-Ares L, Marreaud S, Dafni U, Oselin K, Havel L, Esteban E, Isla D, Martinez-Marti A, Faehling M, Tsuboi M, Lee JS, Nakagawa K, Yang J, Samkari A, Keller SM, Mauer M, Jha N, Stahel R, Besse B, Peters S; EORTC-1416-LCG/ETOP 8-15 – PEARLS/KEYNOTE-091 Investigators. 

Pembrolizumab versus placebo as adjuvant therapy for completely resected stage IB-IIIA non-small-cell lung cancer (PEARLS/KEYNOTE-091): an interim analysis of a randomised, triple-blind, phase 3 trial. 

Lancet Oncol. 2022 Sep 9. Epub ahead of print. 

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