Journal of Clinical Oncology

Immunothérapie et chimiothérapie de première ligne : de nouveaux résultats de l’étude de phase III KEYNOTE-189.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
mars 2020

Immunothérapie, Traitement des stades IV

Il y a près de 2 ans que nous commentions la publication des résultats de l’étude de phase III KEYNOTE-189 qui comparait pemetrexed et sels de platine associés à pembrolizumab à cette même chimiothérapie associée à un placebo. Les patients inclus étaient atteints de cancers bronchiques non à petites cellules non épidermoïdes métastatiques non antérieurement traités. Ils  ne devaient pas avoir de  mutation activatrice de l'EGFR ou de translocation ALK-EML4, de métastase cérébrale symptomatique ou de contre-indication à l’immunothérapie. Ils étaient randomisés sur un mode 2/1 pour recevoir 4 cycles d’une chimiothérapie par cisplatine (75mg/m2) ou carboplatine (AUC5) et pemetrexed et soit du pembrolizumab à 200 mg toutes les 3 semaines (jusqu’à 35 cycles), soit placebo. Le cross over était autorisé. 

La survie globale et la survie sans progression étaient les 2 objectifs principaux. En tout 616 patients avaient été randomisés, 410 dans le bras pembrolizumab et 206 dans le bras placebo. Ce sont les résultats de la première analyse intermédiaire effectuée en novembre 2017 qui avaient été publiés en avril 2018 et commentés sur ce site (cliquer ici). A cette date, avec un suivi médian de 10,5 mois, 137 patients du groupe comportant une immunothérapie et 36 du groupe placebo était toujours en train de recevoir le traitement. Les taux de patients vivants à 12 mois était de 69,2% dans le bras pembrolizumab vs 49,4% dans le bras placebo et la durée médiane de survie n’était pas atteinte dans le bras pembrolizumab vs 11,3 mois dans le bras placebo. Cette différence était significative (HR = 0,49 ; 95% CI : 0,38-0,64), p<0,001. Ce bénéfice était observé pour tous les modes d’expression de PD-L1 . 

A la date de fermeture, le 21 septembre 2018, la durée médiane de suivi était de 23,1 (18,6-30,9) mois. À cette date, 58 patients du groupe expérimental (14,1 %) recevaient encore au moins un traitement de l’étude alors que c’était le cas de seulement 7 (3,4%) des patients du groupe placebo. 

A cette date, 213 patients (52%) du groupe pembrolizumab et 144 (69,9%) du groupe placebo sont morts. La durée médiane de survie (95% CI) était de 22 mois (19,5-25,2) dans le groupe pembrolizumab et de 10,7 (8,7-13,6) mois des le bras placebo (HR = 0,56; 95% CI, 0,45-070). Enfin les taux estimés de survie à 2 ans étaient respectivement de 45,5% et  29,9%. Comme indiqué précédemment, ce bénéfice était observé quel que soit le niveau d’expression de PD-L1. 

A cette même date, la durée médiane de survie sans progression était de 9 mois versus 4,9 (HR, 0,48; 95% CI, 0,40-0,58); Enfin les taux estimés de survie sans progression à 2 ans étaient de 20,5% et 1,5%. Comme pour la survie, ce bénéfice de PFS était observé quel que soit le niveau d’expression de PD-L1. 

Les taux de réponses objectives confirmées étaient respectivement de 48 vs 19,4%. De même les durées de réponse étaient significativement supérieures dans le groupe expérimental (12,4 vs 7,1 mois). On notera aussi que la PFS2, c'est à dire le temps séparant la randomisation de la progression sous la ligne suivante de traitement était significativement supérieur dans le groupe expérimental (17 vs 9 mois). 

Enfin, la présence de métastases hépatiques ou cérébrales ne modifiait pas le bénéfice thérapeutique obtenu sous immunothérapie.

Pratiquement tous les patients des deux groupes ont eu des effets adverses de tous grades et les effets de grade 3 à 5 sont survenus chez pratiquement le même pourcentage de patients (71,9 % et 66,8 %).

Il y a 2 ans nous pensions que l’association d’immunothérapie et de chimiothérapie allait devenir le nouveau standard de traitement et nous nous demandions si ce serait le standard de tous les patients ou seulement de ceux qui expriment PD-L1 à moins de 50%, ceux qui l’expriment à plus de 50% restant candidats à la seule immunothérapie. Deux ans plus tard cette question persiste : en effet l’association d’immunothérapie et de chimiothérapie est bien devenue le nouveau standard des patients qui expriment PD-L1 à moins de 50%. Mais pour ceux dont l’expression est supérieure à 50%, le choix du traitement reste discutable. Certes le risque d’hyperprogression sous immunothérapie exclusive incite à privilégier l’association d’immunothérapie et de chimiothérapie. Mais l’élément essentiel est de savoir quelles sont les taux de survies prolongées sous ces deux traitements ?  La réponse à cette question nécessiterait  de connaitre les résultats lointains d’essais randomisés. En attendant, si on se risque (ce qui n’est pas recommandé) à comparer les résultats de cette étude avec ceux de l’étude KEYNOTE-024 qui n’incluait que des patients avec une expression de PD-L1 ≥ 50% (cliquer ici) on voit que, chez les malades qui expriment PD-L1  à au moins 50%,  le taux de survie à 2 ans est très proche qu’une chimiothérapie soit ou non ajoutée au pembrolizumab.

Reference

Updated Analysis From KEYNOTE-189: Pembrolizumab or Placebo Plus Pemetrexedand Platinum for Previously Untreated Metastatic Nonsquamous Non-Small-Cell Lung Cancer.

Gadgeel S, Rodríguez-Abreu D, Speranza G, Esteban E, Felip E, Dómine M, Hui R, Hochmair MJ, Clingan P, Powell SF, Cheng SY, Bischoff HG, Peled N, Grossi F, Jennens RR, Reck M, Garon EB, Novello S, Rubio-Viqueira B, Boyer M, Kurata T, Gray JE, Yang J, Bas T, Pietanza MC, Garassino MC.

J Clin Oncol 2020: 9 mars [Epub ahead of print]

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