JAMA Oncology

KEYNOTE-799, une étude de phase II explorant l’association de pembrolizumab concomitante à la radiochimiothérapie dans les CBNPC de stades III.

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
juin 2021

Immunothérapie, Radiothérapie / Radiofréquence, Traitement des stades III

Le traitement standard des patients atteints de cancer bronchique non à petites cellules de stade III non résécables est la radiochimiothérapie suivie par un traitement de consolidation par durvalumab chez les patients  dont la maladie a été contrôlée par la radiochimiothérapie. Nous avons maintenant la confirmation que la maintenance par durvalumab  représente un important progrès pour ces malades dont la survie passe ainsi de 29 à 47 mois (cliquer ici).  Toutefois ce bénéfice ne concerne pas les patients qui progressent sous radiochimiothérapie alors qu’ils représentent tout de même 22 à 30% de l’ensemble des patients. 

Ce résultat ne pourrait-il pas être amélioré si tous les malades, - et non seulement les répondeurs et stabilisés -, recevaient l’immunothérapie ? C’est la question que pose l’étude dont les résultats sont présentés ici qui évalue l’addition de pembrolizumab, administré de façon concomitante,  à la radiochimiothérapie. 

KEYNOTE-799 est une étude internationale multicentrique de phase II non randomisée qui a été menée dans 52 centres de 10 pays. 

Les patients éligibles à  cette étude devaient avoir au moins 18 ans, un PS à 0 ou 1 et un cancer bronchique non à petites cellules de stade III non résécable avec des lésions mesurables. Ils devaient avoir des fonctions des différents organes normales et une fonction respiratoire avec un VEMS et une DLCO d’au moins 50 et 40% des valeurs théoriques. Ils n’étaient pas éligibles s’ils avaient reçu antérieurement une radiothérapie sur le thorax (y compris pour un cancer du sein ou de l’œsophage), s’ils avaient une déficience immunitaire, une maladie auto-immune ou une pneumopathie interstitielle diffuse nécessitant un traitement. 

Deux traitements étaient possibles. Ils définissaient deux cohortes :

  • La première (cohorte A) pouvait inclure des patients atteints de cancers épidermoïdes ou non épidermoïdes . Elle comportait :
    • Un cycle de carboplatine (AUC 6), paclitaxel (200 mg/m2) et du pembrolizumab (200 mg) à J1
    • Puis 3 semaines plus tard commençait un traitement hebdomadaire par carboplatine (AUC 2), paclitaxel (45 mg/m2) pendant  6 semaines et 2 cycles de pembrolizumab (200 mg) administrés toutes les 3 semaines en association à une radiothérapie thoracique en 20 fractions de 3 Gy 
  • Et la deuxième (cohorte B) qui ne pouvait inclure que des patients atteints de cancers non épidermoïdes comportait :
    • Trois cycles de cisplatine (75 mg/m2) et pemetrexed (500 mg/m2) et du  pembrolizumab (200 mg) au J1 de chacun des 3 cycles de 3 semaines, 
    • Et une radiothérapie selon les mêmes modalités durant les cycles 2 et 3. 
  • Ensuite, dans les 2 cohortes les patients recevaient 14 cycles de pembrolizumab aux mêmes doses pour une durée totale d’environ 1 an. 

Les évaluations, après qu’ait été réalisé le bilan initial, avaient lieu toutes les 9 semaines. 

Les objectifs principaux étaient 1) le taux de réponse évalués par un comité indépendant et 2) le pourcentage de patients développant une pneumopathie radique de grade ≥ 3.

Les objectifs secondaires étaient la survie globale, la survie sans progression, et la toxicité.  

Avec approximativement 108 patients par cohorte cette étude pouvait démontrer avec plus de 80% de chance que le pourcentage de pneumopathies de grade ≥3 était inférieur à 10% et que le taux de réponse excède 50%. 

Résultats

De 2018 à 2020, 112 patients ont été inclus dans la cohorte A et 104 dans la cohorte B. Leurs âges médians étaient respectivement de 66 et 64 ans et 95 % des patients étaient fumeurs ou anciens fumeurs. Par ailleurs 141 patients avait un cancer non épidermoïde  et 73 un épidermoïde. 

Les taux de réponse et de stabilisation étaient respectivement de 70,5% et 88,4% dans la cohorte A et de 70,6% et 93,1% dans la cohorte B.  Les durées médianes de réponse n’étaient pas atteintes et les temps médians d’obtention de la réponse étaient de 2,1 mois dans les deux cohortes. A 12 mois 80 et 75% des patients des 2 cohortes étaient toujours en réponse. 

Des réponses étaient obtenues que le statut PD-L1  soit ou non positif (mais le statut PD-L1  était inconnu chez plus de 20% et plus de 30% des patients des cohortes A et B). 

Des évènements secondaires rapportés au traitement de tous grades et de grads ≥ 3 ont été décrits chez respectivement 105 (93,8%) et 72 (64,3%) des patients de la cohorte A et 99 (97,1%) et 51 (50%) de ceux de la cohorte B. Quatre (3,6% et 1 (1%) de ces événements ont conduit au décès. Des pneumopathies de grades ≥3 ont été décrites respectivement chez 7 (6,3%) et 5 (4,9%) patients des cohortes A et B et des pneumopathies radiques respectivement chez 2 (1,8%) et 1 (1%) des patients des cohortes A et B. Le taux de pneumopathies possiblement radiques de grades ≥ 3 étant inférieur à 10% le premier objectif principal était atteint. 

On retiendra que le temps d’apparition de ces pneumopathies était un peu supérieur à 4 mois dans les 2 cohortes et aussi que 4 patients sont décédés de « pneumopathie » et 1 de « pneumopathie interstitielle  »  liées au traitement. 

Cette étude est donc positive sur ces deux objectifs principaux. Elle marque sans doute une nouvelle étape dans la recherche clinique qui est menée actuellement sur le rôle de l’immunothérapie dans les cancers bronchiques non à petites cellules de stade III non résécables. Souvenons-nous néanmoins qu’il ne s’agit que d’une étude de phase II non randomisée et que les deux critères de jugement qui ont été choisis nous semblent fragiles : le taux de réponse d’abord,  parce qu’on sait combien il est difficile d’affirmer la réponse chez des patients traités par radio chimiothérapie.  La toxicité pulmonaire ensuite car ce critère ne nous paraît pas parfaitement clairement défini dans cette étude, des patients étant diversement décrits comme ayant des pneumopathies immunes, des pneumopathies interstitielles, ou des pneumopathies sans autre précision …   

 

Reference

Pembrolizumab Plus Concurrent Chemoradiation Therapy in Patients With Unresectable, Locally Advanced, Stage III Non-Small Cell Lung Cancer: The Phase 2 KEYNOTE-799 Nonrandomized Trial.

Jabbour SK, Lee KH, Frost N, Breder V, Kowalski DM, Pollock T, Levchenko E, Reguart N, Martinez-Marti A, Houghton B, Paoli JB, Safina S, Park K, Komiya T, Sanford A, Boolell V, Liu H, Samkari A, Keller SM, Reck M.

JAMA Oncol 2021. Online ahead of print.

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