Journal of Thoracic Oncology

L’immunothérapie peut être proposée aux malades atteints d’un CBNPC muté EGFR qui a progressé après inhibiteur de la tyrosine kinase

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2021

Immunothérapie, EGFR

La controverse sur la place des IO chez les patients EGFRm est loin d’être close. Dans l’article que nous commentons ici les auteurs défendent la place des inhibiteurs de points de contrôles immunitaires dans l’arsenal thérapeutique des patients EGFR mutés. L’essai IMpower 150 avec l’atezolizumab en combinaison, et plus récemment l’essai ATLANTIC avec le durvalumab en monothérapie, laissent en effet penser qu’il peut être envisagé d’utiliser les inhibiteurs de points de contrôle chez ces patients. Dans ce dernier essai prospectif notamment, s’adressant aux patients en progression après deux lignes thérapeutiques, les patients qui exprimaient PDL1 à plus de 25% (cut off retenu avec le durvalumab dans les essais concernant les CBNPC métastatiques) la médiane d’OS était de 16.1 mois. De même, dans l’essai PROLUNG qui comparait le pembrolizumab au docetaxel chez des patients prétraités, le sous groupe des patients EGFRm présentait des taux de réponses (58.3% versus 23.1%) et une PFS (6.8 mois versus 3.5 mois) en faveur du pembrolizumab. 

En association, dans l’essai de phase 3 IMpower 150, parmi les 124 patients inclus ayant une mutation EGFR, le bras expérimental associant bevacizumab, atezolizumab et chimiothérapie permettait d’améliorer la PFS (10.3 mois versus6.1 mois dans le bras standard, HR :0.41 ; CI 95% 0.23-0.75) et l’OS (29.4 mos versus 18.1 mois, HR : 0.60 ; CI95% 0.31-1.14) allant dans le sens d’une probable place de cette association après progression sous TKI. Ce bénéfice en survie se faisait bien entendu au prix d’une certaine toxicité qui pour certains pourrait constituer un frein. D’autres essais en combinaisons sont en cours dans cette indications, tels que l’essai CheckMate 722, l’essai TREASURE ou l’essai Keynote 789.

Le débat sur l’efficacité des IO chez ce type de patients est en partie lié à la charge mutationnelle généralement faible de ces tumeurs et le caractère peu immunogène de ce type de mutations, qui de fait créent un environnement péri tumoral peu inflammatoire. Cependant, l’exposition aux EGFR TKI pourrait modifier ce micro environnement en augmentant le recrutement des lymphocytes CD8+, des cellules dendritiques et des macrophages, tout en diminuant la population des lymphocytes T reg. Les TKI peuvent également modifier l’immunité adaptative en augmentant la sécrétion d’interferon. Néanmoins, ce micro environnement se modifie de nouveau lors de la progression (résistance aux TKI) avec de nouveau plus de cellules T reg. Il y aurait donc potentiellement une fenêtre optimale pour l’utilisation des IO, qui pourrait notamment être évaluées par un suivi longitudinal de l’ADNt circulant afin de détecter précocement l’échappement sous TKI et instaurer sans délai l’IO. 

Même si la place des IO mérite d’être optimisée pour évaluer pleinement son efficacité, resteront les problématiques potentielles de toxicités et d’hyper progression. Les excès de toxicités ont été décrits la plupart du temps lorsque l’immunothérapie est donnée avant le TKI mais l’instauration de l’IO après l’osimertinib notamment semble être bien tolérée. Concernant l’hyper progression qui avait été rapportée plus fréquemment en cas de mutation EGFR dans une étude rétrospective, il est difficile d’établir le lien entre le statut EGFR et la résistance aux molécules d’IO. Cette relation mérite plus d’investigations avant de pouvoir conclure formellement, mais quoi qu’il en soit elle semble nettement moindre en cas d’association des IO avec une chimiothérapie, ce qui pourrait permettrait de se prémunir de cette menace. 

Les auteurs concluent de façon assez pondérée qu’il est probablement trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur une exclusion des IO de principe chez les patients EGFRm. Compte tenu des résultats assez décevants des schémas de chimiothérapie seule après échec de TKI, il semble raisonnable de proposer l’ajout d’une IO dans le traitement, en l’absence de toxicité réellement rédhibitoire rapportée.   Même si l’efficacité attendue peut être perçue comme inferieure à ce qu’on espère chez les patients wild types, ne pas proposer d’immunothérapie « de principe » à certains de nos patients reste difficile à concevoir. 

Voir aussi sur cette question 

 

Reference

Chemotherapy Should Be Combined With Checkpoint Inhibitors in the Treatment of Patients With Stage IV EGFR-Mutant NSCLC Whose Disease Has Progressed on All Available Tyrosine Kinase Inhibitors 

Zhou F, ZhouC

J Thorac Oncol 2021; 16 : 1622-1626

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