Journal of Thoracic Oncology

L’immunothérapie ne doit pas être proposée aux malades atteints d’un CBNPC muté EGFR qui a progressé après inhibiteur de la tyrosine kinase

Mode d'évaluation :
1 point : les articles apportant des connaissances réellement nouvelles par rapport à la littérature;

2 points : les études contribuant, notamment pour les essais thérapeutiques, à l'apport d'un niveau de preuve A (méta-analyse ou essais randomisés de phase III portant sur un grand nombre de malades) ou B (essais randomisés à effectifs réduits (B1) ou études prospectives ou rétrospectives (B2);

3 points : les études susceptibles de modifier les pratiques.
octobre 2021

Immunothérapie, EGFR

L’analyse récente de l’essai de phase 2 (cliquer ici) associant le bevacizumab, l’atezolizumab et un doublet de chimiothérapie par platine et pemetrexed, que nous avons rapportée ici même il y a quelques jours, laissait penser que l’immunothérapie par inhibiteurs de points de contrôles pouvait avoir une place dans l’arsenal thérapeutique des patients EGFRm. Néanmoins ceci est largement débattu, notamment dans la publication que nous commentons ici. En effet, en monothérapie, les données d’IMMUNOTARGET par exemple ne retrouvent que 12% de taux de réponse et une médiane de PFS de 2.1 mois chez ces patients.  Dans les essais CheckMate 057, Keynote 010 et OAK, aucun avantage en survie globale n’était retrouvé pour le sous groupe des patients EGFRm. Plus récemment, un essai de phase 2 évaluant le camrelizumab (anti PD1) ne retrouvait aucune réponse chez les patients EGFRm exprimant pourtant PDL1 à plus de 50%. Ceci avait conduit à la clôture prématurée de la cohorte EGFRm dans cette étude. 

Plusieurs mécanismes peuvent expliquer cette absence de réponse. La charge tumorale notamment est particulièrement faible chez les patients EGFRm par rapport aux patients wild type. Les tumeurs EGFRm ont par ailleurs un phénotype moins inflammatoires (froides), et les  mécanismes d’échappement immunitaire semblent moins dépendants de PDL1 et passent plus souvent par une perte du CMH de classe 1 ou une activation de CD73 ou de la voie de TIGIT. Des essais sont d’ailleurs en cours pour évaluer les associations ciblant CD73 et PD1 ou PDL1. 

L’environnement péri tumoral semble également modifié par l’exposition aux TKI de l’EGFR avec une baisse de l’infiltration lymphocytaire, majoritairement constitué par des lymphocytes T épuisés. L’exposition à des anti PD1 ou anti PDL1 ne semble pas suffisante pour inverser le phénomène, et des combinaisons avec des anti LAG3 par exemple semblent indispensables pour contrer cet échappement immunitaire. Certaines données, toutes rétrospectives, retrouvent un lien possible entre l’hyperprogression sous IO et la présence d’une mutation EGFR.

Enfin, au-delà de l’absence attendue d’efficacité, le traitement par IO après TKI de l’EGFR expose à un risque accru de toxicités immuno-induite. Dans une large base de données de 2018, chez 70 cas de traitements par TKI suivis par du Nivolumab, on retrouve par régression logistique un risque de pneumopathie interstitielle de 5.09 (CI95% 2.87-9.03) contre 1.22 (CI95% : 1.00-1.47) en l’absence de Nivolumab. On notera néanmoins que la plupart des patients avaient reçu le Nivolumab en premier, mais c’est probablement l’association des deux traitements, quel que soit l’ordre, qui majore le risque. On retrouve la même chose dans une analyse rétrospective de 41 patients traités par osimertinib après IO, 15% d’entre eux développant des toxicités immunes sévères, notamment si le TKI est débuté dans les 3 mois.

Cette publication plaide clairement contre l’utilisation des IO en cas de mutation EGFR mais c’est surtout en première ligne que les données sont solides. Cela confirme en tout cas qu’en pratique courante, en cas de positivité de PDL1 en immunohistochimie (notamment supérieure à 50%), il est indispensable d’attendre les résultats de la biologie moléculaire pour exclure une mutation EGFR avant de choisir un traitement par IO. Au-delà de la première ligne, après échappement sous TKI, les données sont moins claires. Certes dans IMpower 150 il s’agit d’analyses en sous groupes et la puissance statistique est insuffisante, certes les données de phase 2 plus récentes ne comprennent pas de bras comparateurs, mais il semble néanmoins exister une certaine efficacité lorsque les IO sont combinées à la chimiothérapie et au bevacizumab. C’est probablement la tolérance de ces associations qui constituera un facteur limitant. 

Voir aussi sur cette question 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Reference

Combination Chemotherapy Alone Should Be Used in the Treatment of Patients With Stage IV EGFR-Mutant NSCLC Whose Disease Has Progressed on All Available Tyrosine Kinase Inhibitors.

Zhang JT, Wu YL.

J Thorac Oncol  2021; 16 : 1627-1631

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